Depuis deux saisons, personne chez le Canadien n’a passé autant de temps sur la glace en compagnie de Shea Weber que Ben Chiarot.

Toutes situations confondues, en saison et en séries éliminatoires, les deux gros défenseurs se sont côtoyés pendant près de 2000 minutes de jeu, investies en grande partie à dissuader les attaquants adverses de s’avancer trop près de leur gardien de but. Et ça, c’était seulement sur la patinoire.

Ces jours-ci, pour la première fois depuis qu’il est arrivé à Montréal, Chiarot se retrouve sans son partenaire attitré. Affaibli par les blessures, Weber fera vraisemblablement l’impasse sur toute la saison, peut-être même sur sa carrière.

Comme bien d’autres avant lui, le défenseur a prévenu qu’on ne « peut pas remplacer » la présence et l’ascendant de Weber, « un futur membre du Temple de la renommée du hockey ».

En revanche, Chiarot se voit lui-même jouer un rôle plus important, tant sur la glace que dans le vestiaire, en l’absence de celui qu’il considère comme son « meilleur ami dans l’équipe ».

« En jouant à côté de lui, en lui parlant et le voyant chaque jour, j’ai beaucoup appris de lui, sur la manière dont il se comporte, sur son leadership », a raconté Chiarot, mercredi, après l’entraînement du Tricolore.

Personne ne sera jamais Shea Weber, mais si je peux apporter un petit quelque chose, je serai content.

Ben Chiarot

L’élève veut faire honneur au maître, en somme.

Après avoir profité du mentorat de Weber, c’est au tour du vétéran de 30 ans de transmettre son savoir, son expérience. Et le rôle ne lui déplaît pas du tout.

Au camp d’entraînement, Chiarot a jusqu’ici été principalement jumelé à Mattias Norlinder. À 21 ans, le Suédois fait ses débuts en Amérique du Nord.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Mattias Norlinder

« Si je peux aider des jeunes à être plus à l’aise, je vais le faire, a-t-il dit. Ça m’est arrivé souvent, dans ma carrière, d’être jumelé à de jeunes défenseurs plus offensifs, et je n’ai pas de problème avec ça. »

En Norlinder, il reconnaît un habile patineur doté d’un « bon instinct offensif ». « Il ne manque pas de confiance en lui, il veut la rondelle sur son bâton, a commenté Chiarot. Je ne vois rien d’immature dans son jeu. Il a un avenir florissant. »

Nouvelles règles

Une nouvelle directive adoptée par la LNH pourrait valoir des ennuis à Chiarot cette saison.

En fait, on souhaite appliquer avec plus de rigueur l’article 59 du livre de règlements du circuit, qui définit un double échec – soit lorsqu’un joueur en frappe un autre avec son bâton qu’il tient à deux mains.

Ce n’était pas un secret très bien gardé : Weber et Chiarot étaient généreux à l’excès à cet égard lorsqu’ils désiraient dégager l’avant de leur filet. Sur le site de Sportsnet, l’article qui explique les nouvelles dispositions est justement coiffé d’une photo de Weber en action. Les arbitres ont longtemps été patients, face à cette pratique en général et envers le duo du Canadien en particulier.

« Ça ne changera rien, ce n’est pas quelque chose que je fais », a dit Chiarot, pince-sans-rire, devant un parterre de journalistes qui se sont esclaffés.

Plus sérieusement, il a reconnu qu’il lui faudrait « défendre un peu différemment ». « Il y a une manière d’avoir deux mains sur son bâton et de pousser un joueur dans la direction désirée. Ça fait partie du jeu, tasser les plus gros bonshommes… »

Il estime que l’adaptation pourrait ressembler à celle qui avait suivi le durcissement des règles sur l’accrochage. « Au début, il y avait 15 punitions par soir, rappelle-t-il. On va trouver le juste équilibre. »

« Je ne pense pas que ça va jouer contre nos défenseurs », a abondé l’entraîneur-chef Dominique Ducharme, ajoutant que « ce que [la ligue] cherche, c’est éliminer les coups vraiment apparents ».

Lors du match hors concours de lundi dernier, Morgan Rielly, des Maple Leafs de Toronto, a fait les frais de cette nouvelle application. Quant à Chiarot, qui a notamment engagé le combat avec Nick Ritchie en fin de première période, il a été le défenseur le moins utilisé par Ducharme.

Avec davantage de temps de jeu, on verra s’il saura résister à l’envie de renouer avec ses vieilles habitudes.

En bref

Norlinder blessé

Mattias Norlinder a suivi l’entraînement en tenue de ville, mercredi. Le jeune défenseur s’est blessé lors du match de lundi et le personnel d’entraîneurs a préféré le tenir loin de la glace pour « quelques jours ». Il serait donc surprenant qu’il soit en uniforme pour l’un des deux matchs contre les Sénateurs d’Ottawa, prévus vendredi et samedi. Il n’empêche que « ce n’est rien de majeur », a assuré Dominique Ducharme.

Price, Edmundson

Parlant de blessés, Ducharme n’a toujours pas précisé l’échéancier du retour en action de Carey Price. Le gardien, opéré à un genou pendant l’été, est encore en rééducation et il ne s’est toujours pas entraîné avec ses coéquipiers. Son cas est réévalué sur une base quotidienne. Initialement fixée au début de la saison, la date de son retour semble désormais incertaine. Quant au défenseur Joel Edmundson, qui devait se joindre aux principaux groupes d’entraînement cette semaine, il s’est encore contenté de patiner en solitaire. « Une journée, il va mieux, et le lendemain, c’est sensible. On veut être patients avec lui », a insisté Ducharme. On ne sait pas de quel type de blessure souffre Edmundson.

Voilà Niku

Embauché vendredi dernier, Sami Niku a rencontré ses nouveaux coéquipiers. À son premier entraînement, il a alterné avec Cody Goloubef sur un duo avec Ben Chiarot. Défenseur offensif, Niku a vécu toutes sortes de mésaventures chez les Jets de Winnipeg, qui ont résilié son contrat. Dominique Ducharme est demeuré prudent sur les plans du CH à l’endroit du Finlandais de 24 ans, qui pourrait bien amorcer la saison avec le Rocket de Laval, dans la Ligue américaine. Quant à Niku, après avoir salué les journalistes en français, il a expliqué qu’il souhaitait donner « un nouveau départ » à sa carrière. Il aurait gagné plus d’argent en restant chez les Jets, mais il désirait avant tout obtenir une occasion de revenir dans la LNH. « Plus mature » que dans le passé, il se dit conscient qu’il « doit prouver » qu’il peut évoluer à ce niveau sur une base régulière. Il pourrait disputer les deux matchs du week-end, selon Ducharme.

Pezzetta en vedette

Auteur de deux buts contre les Maple Leafs, Michael Pezzetta a vécu une soirée magique à son premier match hors concours en carrière. Dans une vidéo diffusée par le Canadien, on a même entendu Jonathan Drouin s’étonner que son coéquipier n’ait pas reçu une étoile à la fin de la rencontre. Choix de sixième tour du CH en 2016, cet adepte du jeu robuste s’alignera certainement avec le Rocket encore cette année. Il voulait toutefois faire bonne impression à Montréal. Il peut dire : mission accomplie. « C’est la première fois que je le voyais sur le banc, et j’ai aimé son intensité, son engagement, a noté Dominique Ducharme. C’est un vrai coéquipier. Il est intense et amène beaucoup de vie. » Pezzetta, lui, a parlé du « sentiment incroyable » qu’il a éprouvé en voyant l’appui de tous ses coéquipiers. Au cours des prochains mois, il souhaite continuer à gagner en confiance afin de montrer qu’il possède « plus d’habiletés » que ne le montrent ses statistiques modestes dans la Ligue américaine (19 points en 107 matchs). « J’ai la vitesse pour patiner dans la LNH, croit-il. Il y a une place pour moi dans cette ligue. »

Un geste raciste « inacceptable »

Dominique Ducharme et Ben Chiarot ont été invités à commenter la suspension de 13 matchs imposée à Andri Denyskin. Pendant un match en Ukraine, ce dernier a posé un geste raciste qui a choqué toute la planète hockey. Sur les réseaux sociaux, les internautes se sont désolés que la peine n’ait pas été plus sévère. Chiarot a parlé d’un geste « dégoûtant », « complètement inacceptable », qui « n’a pas sa place au hockey ou dans la société ». « On ne veut pas voir ça, a enchaîné Ducharme. En 2021, on est rendus ailleurs. On doit être meilleurs que ça. Dans notre ligue, je n’ai jamais été témoin de commentaires [racistes]. Est-ce qu’on est parfaits ? Non, tout le monde peut s’améliorer. Mais les gens sont beaucoup plus conscientisés par rapport à ces choses-là. »