(Montréal) Les partisans qui souhaitent voir plus de Québécois dans la LNH doivent prendre leur mal en patience, car comme la réalité du hockey a changé au fil des dernières décennies, la LHJMQ n’a eu d’autres choix que d’emboîter le pas.

Gilles Courteau est catégorique : l’évolution du hockey de la LNH a aussi influencé la mentalité d’autres ligues, comme celle qu’il dirige. Le commissaire de la LHJMQ se souvient de l’époque où son circuit était composé « à 95 % de Québécois ». Mais même si celle-ci est révolue, ça ne veut pas dire que c’est négatif.

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Le commissaire de la LHJMQ, Gilles Courteau

Les inquiétudes des amateurs se font sentir chaque année lors du repêchage de la LNH. Le nombre de Québécois sélectionnés en première ronde — ou sélectionnés tout court — est souvent moins élevé comparativement à ce qui se fait ailleurs dans la Ligue canadienne de hockey ou même aux États-Unis.

Au cours des 10 derniers repêchages de la LNH, 123 Québécois ayant joué dans la LHJMQ ont été sélectionnés, pour une moyenne de 12 par année. Et la tendance n’est pas à la hausse. Depuis 2016, une seule fois, en 2018, la LHJMQ a dépassé cette moyenne. La ligue n’a produit que 10 Québécois à chacune des deux dernières séances de la LNH.

Ces chiffres peuvent sembler très inquiétants, mais ils sont le reflet des nouveaux mandats de la LHJMQ depuis quelques décennies déjà, en raison des expansions dans les Maritimes et de l’arrivée de plusieurs Européens en Amérique du Nord. La ligue doit maintenant développer du talent de partout dans le monde tout en permettant aux équipes d’être compétitives.

Une des demandes de la LNH à notre endroit était d’ajouter des Européens à notre ligue. Quand nous avons procédé à des expansions dans les Maritimes, nous nous sommes également assuré d’avoir l’exclusivité des joueurs développés là-bas, a fait savoir Courteau. Je ne fais pas que centrer la LHJMQ sur les Québécois. Ça fait maintenant partie de la réalité du hockey. Notre objectif est de trouver environ 400 joueurs, peu importe leur provenance, afin de présenter un spectacle de qualité et d’avoir les meilleurs joueurs sur la glace.

Gilles Courteau

Sous la tutelle de Courteau, qui est devenu président en 1986, la LHJMQ a vu huit de ses joueurs être réclamés au tout premier rang du repêchage de la LNH. Alexis Lafrenière a d’ailleurs mis fin à une disette de 17 ans sans Québécois — soit depuis Marc-André Fleury en 2003 — quand les Rangers de New York ont jeté leur dévolu sur lui, en octobre dernier. Sidney Crosby (2005), Nathan MacKinnon (2013) et Nico Hischier (2017) se sont succédé entre-temps.

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Le Suisse Nico Hischier a été sélectionné au premier rang par les Devils du New Jersey, en 2017

Courteau ne se montre pas inquiet devant ces statistiques et il insiste même sur le fait que la ligue bénéficie de ces sélections, que les joueurs soient Québécois, Canadiens ou Européens.

« De voir Alexis Lafrenière être repêché au premier rang, c’est tout aussi valorisant pour moi et la ligue que quand c’était le cas de Sidney Crosby ou Nathan MacKinnon», a reconnu Courteau.

Je suis également heureux quand je vois d’anciens joueurs européens de la LHJMQ performer à un haut niveau dans la LNH. Ça me plaît autant de voir Nikolaj Ehlers avec les Jets de Winnipeg que Pierre-Luc Dubois ou Mathieu Perreault. Je regarde un gars comme Jakub Voracek, avec les Flyers de Philadelphie, c’est tout un joueur de la LNH et il l’a aussi été pour nous.

Gilles Courteau

Conciliation hockey et études

On entend souvent dire que le hockey au Québec est en perte de vitesse, au profit de sports plus estivaux comme le soccer, le baseball ou le basketball. Courteau y voit plutôt un changement dans les pratiques du hockey dans la province.

Au-delà de la performance, la venue du hockey en milieu scolaire vient ajouter une option supplémentaire aux parents de joueur et il vient aussi mettre à l’avant-plan les études, un volet qui a été développé par Courteau dans la LHJMQ et qui lui tient particulièrement à cœur.

« Je vois plutôt ça comme une structure de plus qui s’offre à un athlète qui veut jouer au hockey. Quand tu sais en tant que parent que ton enfant va aller à l’école, qu’il va s’entraîner sur les lieux, utiliser le transport scolaire pour se déplacer et jouer au hockey le week-end, ce sont des éléments importants à considérer, a-t-il expliqué. De notre côté, nous avons également mis l’accent sur l’école avec l’implantation d’un programme de bourses d’études et la fréquentation scolaire obligatoire. »

Courteau n’hésite toutefois pas à dire que la LHJMQ est toujours ouverte à collaborer avec Hockey Québec et les autres organisations dans les Maritimes dans le but de développer et d’améliorer le talent et offrir plus d’opportunités aux joueurs qui espèrent atteindre les plus hauts niveaux.

« Lorsqu’il est requis de le faire, la ligue participe à différents colloques, symposiums ou stages dans les quatre provinces où nous avons les droits exclusifs. Je dirais que la LHJMQ collabore beaucoup », a-t-il ajouté.

Bien qu’il n’y ait qu’une trentaine de Québécois réguliers dans la LNH cette saison, l’avenir semble plutôt prometteur alors que plus de la moitié d’entre eux sont âgés de 27 ans ou moins. La province espère maintenant que les Lafrenière, Dubois, Pierre-Olivier Joseph, Samuel Poulin, Jakob Pelletier ou Hendrix Lapierre, entre autres, viennent insuffler un vent de fraîcheur auprès des jeunes joueurs de hockey québécois.