(Montréal) Gilles Courteau était assis dans sa voiture lorsqu’il a compris tout le poids qui reposait sur ses épaules en tant que nouveau président de la LHJMQ. Il était loin de se douter que 35 ans plus tard, il serait encore le visage et le maître à penser de la ligue.

Courteau venait à peine d’être nommé à ce poste, en 1986, quand il a décidé de faire un petit arrêt à Trois-Rivières, là où tout a commencé pour lui une dizaine d’années plus tôt, alors qu’il était statisticien des Draveurs.

L’accueil qu’il a reçu lui a fait réaliser les responsabilités qui venaient avec son nouvel emploi, mais l’a aussi préparé à guider le navire dans la bonne direction.

« J’étais à un match au Colisée de Trois-Rivières et pendant la rencontre, j’entendais des partisans se plaindre de l’arbitrage, mais je n’en faisais pas de cas. Quand la partie s’est terminée et que j’ai voulu quitter, il y avait environ 50 à 75 personnes au bas des escaliers qui m’attendaient pour me crier après. J’ai dû passer par le vestiaire des Chevaliers de Longueuil pour sortir de l’aréna. Quand je suis entré dans ma voiture, je me suis vite rendu compte que je n’étais plus un simple statisticien », a raconté Courteau.

Au cours des quelques années suivantes, Courteau a tranquillement mis son empreinte sur la ligue. Il a notamment fait passer le nombre d’équipes de 10 à 12 et il a commencé une première percée dans les Maritimes, avec la venue des Mooseheads de Halifax, le 17 mars 1994.

C’est toutefois en 1996 que Courteau a vécu l’un de ses premiers moments marquants en tant que président de la LHJMQ. Couronnant une superbe saison de 56 victoires et de 114 points, les Prédateurs de Granby ont remporté la coupe Memorial, mettant fin à une disette de 15 ans pour la ligue et de 25 années pour le Québec.

La première conquête de la coupe Memorial comme commissaire, ç’a été un moment marquant et émotif. Ça faisait plusieurs années qu’on en entendait parler, a affirmé Courteau. Non seulement la ligue ne gagnait pas, mais elle était souvent parmi les premières à se faire éliminer de la compétition. Cette victoire des Prédateurs a été un grand moment pour moi, mais aussi pour la LHJMQ.

Gilles Courteau

Depuis cette conquête, la LHJMQ a redoré son blason au sein de la Ligue canadienne de hockey. Elle a remporté le trophée le plus important du hockey junior canadien à huit reprises au cours des 23 dernières saisons complétées et cinq fois lors de la dernière décennie.

Sur la glace, Courteau a mené à bien plusieurs expansions, dont celles dans les Maritimes, et la ligue compte maintenant 18 équipes. Hors glace, il a mis en place plusieurs programmes pour les joueurs et il s’est assuré que la LHJMQ puisse les encadrer pendant leur stage junior afin qu’ils deviennent des professionnels et de bons citoyens.

Je suis fier de l’évolution de la LHJMQ. Au fil des années, nous avons mis en place des bourses d’études, nous avons implanté la fréquentation scolaire obligatoire et nous avons clarifié le statut du joueur pour qu’il soit reconnu comme un athlète-étudiant. Je suis heureux de voir l’encadrement des équipes envers les joueurs et le spectacle que nous offrons. Ça part de la qualité de nos équipes, de nos propriétaires et des gens qui travaillent dans les bureaux de la ligue.

Gilles Courteau

C’est d’ailleurs cette qualité et ce travail d’équipe qui lui ont permis de faire face à toutes les éventualités. Comme celle qui occupe son quotidien depuis déjà plus d’un an.

L’adversaire invisible

À seulement deux semaines du début des séries éliminatoires, l’an dernier, la LHJMQ a été forcée de prendre une décision difficile et d’annuler le reste de sa saison en raison de la pandémie de COVID-19. Pour la première fois de son histoire, la coupe du Président ne serait pas soulevée par une équipe championne.

Bien qu’il ait fait face à bon nombre de défis pendant ses 35 ans comme président et commissaire du circuit, Courteau n’avait jamais eu à affronter une menace aussi sérieuse.

Par chance, les représentants des équipes et lui ont été proactifs. Martin Lavallée, l’adjoint au commissaire, a travaillé d’arrache-pied pour mettre en place des protocoles de retour au jeu et de mesures sanitaires et une cinquantaine de personnes siégeaient à différents comités pour faire accepter ces protocoles par les quatre provinces où une équipe du circuit est basée. Les joueurs et les entraîneurs ont ensuite tout fait pour respecter les règles.

Ces efforts ont été récompensés parce que la LHJMQ s’est révélée la seule ligue junior au Canada à avoir amorcé sa saison à temps et jusqu’à tout récemment, elle était la seule ligue junior à jouer des matchs.

Depuis le début de cette pandémie, mes étoiles vont à tous nos joueurs et à tous les membres des organisations. Je salue leur comportement et leur discipline, a insisté Courteau. Nous savions qu’il y aurait des obstacles, mais tout le monde a mis l’épaule à la roue. Le plus extraordinaire pour nous c’est qu’il y aura des séries et nous couronnerons un champion de la coupe du Président.

Gilles Courteau

Et ce ne sont pas les obstacles qui ont manqué. Il y a d’abord eu des éclosions au sein de l’Armada de Blainville-Boisbriand et du Phoenix de Sherbrooke. La ligue a ensuite eu recours à un environnement protégé à Québec avant que la santé publique force l’interruption de la saison, en novembre.

Les équipes au Québec ont pu reprendre leurs activités à la fin du mois de janvier, mais c’est du côté des Maritimes qu’une tuile est tombée sur la tête de Courteau. Les trois formations situées au Nouveau-Brunswick n’ont pas pu revenir au jeu avant le mois de mars et les équipes en Nouvelle-Écosse et à l’Île-du-Prince-Édouard ont dû disputer quelques matchs devant des gradins vides, ce qui n’était pas initialement prévu.

Néanmoins, Courteau n’a jamais douté que la saison poursuive son cours et que les séries aient bel et bien lieu.

« Nous étions toujours dépendants des réactions de la santé publique face à la pandémie, mais nous n’avons jamais pensé que la saison serait annulée, a-t-il déclaré. L’aspect sur lequel nous devions travailler était de maintenir l’intérêt de nos joueurs et de nos équipes. C’est pour cette raison que nous avons apporté plusieurs modifications à notre calendrier. »

Par ailleurs, le commissaire de la LHJMQ a avoué que la santé financière de la ligue avait subi un dur coup « comme plusieurs autres entreprises partout au Canada » en raison de la pandémie, mais il a confirmé que les 18 équipes seraient au rendez-vous pour la saison 2021-22.