Réglons une chose d’entrée de jeu: le Canadien ne participera pas aux séries éliminatoires cette saison.

Avec les victoires des Panthers, des Hurricanes et des Flyers, hier soir, le CH se retrouve désormais à dix points de la Floride et du troisième rang dans la division Atlantique, avec un match de moins à disputer, et à neuf points des Blue Jackets de Columbus, dernier club qualifié.

Montréal est aussi à dix points des Flyers de Philadelphie, dernier club exclu, et à six points des Maple Leafs de Toronto, quatrièmes au classement dans la division Atlantique.

Les plus optimistes citent souvent le cas des Blues de St. Louis pour maintenir leur foi. Les Blues ont réussi une remontée rarement vue. Ils l’ont entamée beaucoup plus tôt aussi. À pareille date l’an dernier, ils se retrouvaient à cinq points d’une place en séries, avec un match en main.

Marc Bergevin se retrouvera donc le camp des vendeurs d’ici la date limite des échanges. Trois joueurs du Canadien se retrouvent d’ailleurs sur la très populaire liste annuelle des hockeyeurs susceptibles de changer de camp, concoctée par Frank Seravalli, de TSN. Ilya Kovalchuk vient au troisième rang, Marco Scandella au 18e rang et Jeff Petry au 20e rang. Tomas Tatar et Nate Thompson n’y sont pas.

Le cas Kovalchuk fait évidemment jaser à Montréal. Son enthousiasme contagieux, sa production, huit points en autant de matchs, ont apporté un vent de fraîcheur sur une saison morose. Son embauche à 36 ans suscitait beaucoup de scepticisme, et pour cause. Après quelques semaines, personne ne remet en doute sa place au sein d’un premier ou deuxième trio.

Au point où plusieurs se demandent s’il ne vaudrait pas mieux lui offrir un contrat d’un an ou deux. Et pourquoi pas?

Si Kovalchuk et son agent Pat Brisson préfèrent attendre au 1er juillet pour signer un nouveau contrat avec l’équipe de leur choix, sans fermer la porte au Canadien pour autant, aussi bien l’échanger d’ici la date limite des transactions pour obtenir un choix au repêchage.

Mais si le Russe manifeste son intention de rester à Montréal, il faut y penser. On évoquait au départ la possibilité de recevoir un choix de quatrième ou cinquième ronde pour ses services. Puis certains ont parlé d’un choix de troisième.

Thomas Vanek avait amassé 38 points, dont 15 buts, en 48 matchs à Detroit, en 2017, avant d’être échangé aux Panthers de la Floride pour un choix de troisième ronde et un espoir déjà déchu. Vanek avait 33 ans.

Gustav Nyquist, 29 ans, avait 49 points, dont 16 buts, en 62 matchs pour les Red Wings à la date limite des échanges. Il a coûté des choix de deuxième et quatrième rondes.

Le Canadien n’obtiendra certainement pas de choix de première ronde pour Kovalchuk, dont personne n’était intéressé après sa rupture de contrat avec les Kings en décembre. Un choix de deuxième ronde demeurerait surprenant, mais sait-on jamais.

«En ce moment, il est sur l’adrénaline, Claude Julien a fait une bonne job, les équipes vont le surveiller jusqu’à la date limite des échanges, mais je serais surpris qu’on donne un choix de deuxième ou troisième ronde pour lui, me confiait ce matin le recruteur professionnel d’un club de l’Est. Surtout que ça ne s’est pas bien passé à Los Angeles. Mais on ne sait jamais. La suite nous le dira.»

Par ailleurs, une équipe aspirante à la Coupe Stanley ne repêchera pas parmi les 15 premiers. Même un choix de deuxième ronde se situerait entre le 46e et le 61e rang, un choix de troisième ronde entre le 76e et le 91e rang.

Or les chances d’obtenir un joueur de la LNH sont minces à une telle étape du repêchage. Il y a toujours des éclairs de génie, mais ils sont rares. Prenons les cuvées de 2007 à 2016. Sur 160 joueurs repêchés en deuxième portion de la troisième ronde, 13 sont devenus des joueurs d’impact: Alex Killorn, Adam Henrique, Bryan Rust, Jordan Binnington, Shayne Gostisbehere, Colton Parayko, Frederik Andersen, Matt Murray, Jake Guentzel, Oliver Bjorkstrand, Anthony Duclair, Elvis Merzlikins et Brayden Point.

Le Canadien aurait donc 8% de chances de mettre la main sur un tel joueur avec un choix de troisième ronde, mais 73% de chances de repêcher un joueur qui ne disputera jamais 100 matchs dans la Ligue nationale.

Les statistiques sont légèrement supérieures pour les joueurs repêchés en deuxième moitié de seconde ronde. Le taux atteint 11%, mais s’élève à 23% si on inclut les joueurs de soutien. Le choix de Nikita Kucherov, 58e choix en 2011, frappe l’imaginaire, mais il constitue un choix isolé.

Le taux de succès est nettement plus élevé pour les choix de début de deuxième ronde. La stratégie la plus payante avec les acheteurs consiste à retarder l’obtention des choix. Chicago constituait une puissance lorsqu’ils ont cédé Phillip Danault et un choix de deuxième ronde en 2018 pour Dale Weise et Tomas Fleischmann en 2016. Les Hawks ont eu le temps de connaître leur déclin et le Canadien a pu repêcher Alexander Romanov au début de la deuxième ronde il y a deux ans.

Le Canadien a repêché 15 fois parmi les trois premières rondes depuis trois ans. Il détient un choix de première ronde, deux choix de deuxième ronde, un choix de troisième et trois choix de quatrième en prévision du repêchage de juin.

Si jamais Kovalchuk maintient son rythme endiablé et désire maintenir son association avec le Canadien, Marc Bergevin devra y penser deux fois avant de l’échanger pour un choix plus lointain au repêchage. À moins de s’entendre avec Kovalchuk pour le ramener le 1er juillet.

Le CH voudra des résultats dès l’an prochain et il faut des leaders positifs pour entourer les jeunes. Jaromir Jagr a connu une saison de 66 points à 44 ans avec les Panthers de la Floride et il a eu un formidable ascendant sur Aleksander Barkov et Jonathan Huberdeau. Il a aidé les meilleurs jeunes des Panthers à se développer, et tant pis si Rocco Grimaldi et Logan Shaw ont moins joué en raison de sa présence au sein du premier trio.

Kovalchuk ne volera pas le poste de Nick Suzuki, Jesperi Kotkaniemi ou Ryan Poehling l’an prochain. Au pire, il donnerait à Cole Caufield une saison supplémentaire pour se développer et compliquerait l’entrée de scène d’un Vejdemo ou d’un Evans. Sans conséquence.

Le Canadien a repêché 14 joueurs entre le 45e et le 91e rang entre 2007 et 2016. Seuls Artturi Lehkonen et Yannick Weber sont dans la LNH. Lehkonen, souvent critiqué à Montréal, est d’ailleurs au 20e rang de la cuvée 2013 au chapitre des points. Mais il est un rare exemple de succès pour un choix de fin de deuxième ronde.

Quatrième et cinquième rondes? Deux joueurs, Brendan Gallagher et Victor Mete, ont percé, sur vingt choix. Quinze n’ont jamais disputé de match dans la LNH, 17 on joué moins de dix matchs.

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La réflexion sur Ilya Kovalchuk s'applique aussi pour Nate Thompson, le grand frère des jeunes attaquants du CH. Quitte à recevoir un choix de sixième ou septième ronde, vaut-il mieux le garder dans un rôle de mentor l'an prochain? Et plutôt monnayer un Tatar, par exemple, dont la valeur est nettement plus élevée? Simon-Olivier Lorange fait le point. Mais Thompson aussi peut être échangé et revenir en juillet.