Les joueurs du Canadien avaient hier une dernière occasion de montrer à Marc Bergevin qu'ils méritent de l'aide. Que l'édition actuelle est assez bonne pour que le directeur général pige dans l'avenir pour des gains à court et à moyen terme.

Ironiquement, c'est en gagnant que les joueurs auraient pu dire le plus clairement qu'ils ont besoin de renfort. Parce qu'ils lui auraient montré qu'ils peuvent accomplir de grandes choses. C'est d'ailleurs un peu ce que Mike Babcock sous-entendait après l'entraînement des Maple Leafs vendredi, quand il a dit que « nous, en tant que joueurs et entraîneurs, on doit faire notre bout de chemin afin de pousser le DG à nous aider ».

Mais l'inverse est aussi vrai.

C'est justement l'inverse que l'on a vu hier, dans la défaite de 6-3 du Tricolore face aux Leafs.

D'un côté, il y avait les Maple Leafs et leur force de frappe redoutable. Vous avez vu ces avantages numériques ? Avec Auston Matthews, Mitch Marner, William Nylander, avec Kasperi Kapanen qui éclôt, cette attaque peut largement pallier les défaillances défensives. Les Torontois ont également montré une force de caractère impressionnante pour rester dans le match après avoir été déclassés au premier vingt.

Les considérations du plafond salarial vont peut-être empêcher Kyle Dubas d'ajouter la pièce manquante, mais les joueurs ont fait ce qu'ils ont pu pour montrer à leur DG qu'ils ont le potentiel d'aller loin.

De l'autre côté, il y avait le Canadien, avec évidemment moins de force de frappe. Entendons-nous : les Montréalais ont encore une fois offert une performance fort honorable face à leurs rivaux torontois. Un mauvais bond de la rondelle ici, une pénalité discutable là... Les dieux du hockey n'étaient clairement pas du côté du CH.

Mais comme Brendan Gallagher l'a très justement indiqué : « Ils ont eu un bond chanceux, mais ça ramenait simplement le match à égalité. À partir de ce moment, ils ont été la meilleure équipe. »

Ça revient un peu au constat que l'on faisait il y a deux semaines : c'est la différence entre les bonnes et les très bonnes équipes. Les bonnes équipes, comme le Canadien, parviennent à tenir tête à des adversaires plus forts sur papier. Les très bonnes équipes, comme les Leafs, trouvent une façon de gagner ces matchs où l'adversaire a dominé le jeu pendant plus longtemps.

Montréal a joué trois très bons matchs contre Toronto cette saison. Trois défaites malgré tout.

Les très bonnes équipes parviennent aussi à asséner le coup fatal, ce que le Bleu-blanc-rouge n'a pas fait hier. Ici, rendons toutefois hommage à Frederik Andersen, qui a réussi ses plus beaux arrêts après que le CH eut pris une avance de trois buts.

Alors, que fait le DG d'une équipe simplement bonne, plutôt que très bonne ? Sans dire qu'il reste les bras croisés, il doit bien mesurer le coût de ce qu'il obtient, et ne pas gaspiller de ressources pour des joueurs dits de location. Les Blue Jackets peuvent bien le faire ; la situation contractuelle des futurs joueurs autonomes Sergei Bobrovsky et Artemi Panarin leur impose une forme de pression. Bergevin ne subit pas cette pression ; son équipe devrait se remettre de la perte de Jordie Benn s'il devait profiter de son autonomie l'été prochain !

Une avance perdue

Mine de rien, c'est une sixième défaite cette saison pour le Canadien lors de matchs où il menait après 40 minutes. Seuls les Panthers ont perdu plus de matchs dans cette situation cette saison.

Cette fois, c'est visiblement le but de Tyler Ennis, en fin de deuxième période, qui a fait basculer le match. Ce filet permettait aux Leafs de se rapprocher à 3-2.

« Notre groupe a rencontré assez d'adversité, on devrait savoir comment réagir », a rappelé un Brendan Gallagher qui chuchotait dans le vestiaire.

« On menait 3-0, on devait gagner. On n'a pas le choix d'en tirer des leçons pour que ça ne se reproduise plus, parce que c'est un sentiment assez merdique. »

Les leçons à tirer, c'est un peu comme les entraîneurs qui disent se concentrer sur le processus plutôt que les résultats. En première moitié de saison, c'est un discours qui tient parfaitement la route. Mais quand il reste 20 matchs à jouer, et que la course aux séries est aussi serrée que ce qu'on voit dans l'Est, l'heure n'est plus aux leçons. Du moins pour les équipes qui pensent aller loin.