Noah Juulsen n’a jamais été le plus démonstratif des joueurs. Pourtant, hier matin, dans le vestiaire du Rocket de Laval, il nous attendait avec un sourire franc. Celui d’un joueur qui sortira bientôt de 10 mois d’incertitude. On sourirait à moins.

« Ç’a été long. C’est dur pour un joueur, pour n’importe qui en fait, d’attendre si longtemps. Mais tout va bien en ce moment, j’ai hâte de retourner sur la glace. Je suis excité. Quand le moment va venir, je serai prêt. »

Et ce moment devrait venir d’une journée à l’autre.

« Le plan était trois séances d’entraînement, a expliqué Joël Bouchard. Il a eu une pratique à Rockford [après être allé rejoindre le Rocket sur la route], une autre mardi, une autre jeudi, et on planifie de le faire jouer en fin de semaine.

« On a un processus pour entrer un gars dans la formation. On ne peut pas le lâcher lousse dans un match parce que le médecin a dit qu’il était correct. On doit laisser le joueur s’acclimater. On ne va pas lancer un joueur dans la jungle, on veut le placer dans des situations gagnantes. »

Le Rocket de Laval joue vendredi contre les Bruins de Providence et samedi contre les Bears de Hershey. Il reste à voir quand arrivera le grand jour.

Je n’ai pas peur du tout. Je me dis que je serai peut-être un peu rouillé, par contre. Ce sera probablement la vitesse qui demandera le plus grand ajustement. Les entraînements sont rapides, mais jamais comme un match.

Noah Juulsen

En quelques minutes de discussion, on ne compte plus le nombre de fois où Juulsen a répété « qu’il se sentait bien » et « qu’il était prêt ». On le sent sincère, mais surtout impatient. À 22 ans, il a perdu plusieurs matchs d’expérience à un moment crucial de son développement. Il a aussi laissé échapper une chance crédible de se faire une place dans la formation du Canadien de Montréal.

Plus encore, il a certainement hâte de tirer un trait sur cette épreuve humaine.

Parce que ça fait presque 10 mois que Juulsen n’a pas disputé un seul match de hockey professionnel, une éternité dans un monde qui évolue si vite. Parce que des rumeurs circulaient que sa carrière était compromise, ce qu’il nie d’ailleurs fermement.

« Ça n’a jamais été proche de la fin de ma carrière. Si ça avait été le cas, je serais chez moi à Vancouver. Mais j’étais au camp et je suis prêt à jouer maintenant. »

Rappel des faits. Le 27 décembre dernier, Juulsen a dû se rendre à l’évidence : il devait prendre une pause. Les deux rondelles reçues au visage le 19 novembre contre les Capitals de Washington avaient eu raison de lui. Il a passé les mois qui ont suivi à combattre des problèmes de vision périphérique.

À force d’efforts, Juulsen est revenu à l’entraînement sur glace quelques semaines avant la fin de la saison du Rocket. Au bilan, il confiait même qu’il aurait joué si le Rocket avait participé aux séries.

Si bien que, logiquement, Juulsen était présent au premier entraînement du camp du Canadien, le 13 septembre, une séance brutale de presque deux heures. Mais le lendemain, aucune trace de lui. Le Canadien annonçait simplement que le défenseur souffrait de « maux de tête ». L’entraîneur-chef Claude Julien allait un peu plus loin, en ajoutant qu’« avec sa situation de l’an passé, les soigneurs n’avaient voulu prendre aucun risque ».

Quelques jours plus tard, on apprenait que Juulsen allait demander une deuxième opinion sur son état de santé, et l’inquiétude revenait.

Que s’est-il passé ?

Peu importe la manière de retourner la question, ce n’est pas Juulsen qui va dévoiler de grands pans de sa vie. Il s’ouvre peu sur la chronologie des événements. Même Bouchard refuse d’entrer dans les détails : « Sa blessure est derrière lui. Tout a été réglé. »

Voici donc l’essentiel des réponses de Juulsen. Il était là le jour 1, il n’y était plus le jour 2. Que s’est-il passé, au juste ?

« C’était une chose hors glace, un résultat de test, et c’est parti de là. Je suis allé chercher une deuxième opinion, j’ai obtenu des réponses, je me sens bien maintenant. Je suis content.

– Et quels étaient les symptômes ?

– J’avais des maux de tête. Donc on m’a dit d’arrêter de jouer, et c’est parti de là.

– À quel moment ont commencé les maux de tête ?

– Ça a commencé la veille du premier entraînement. Je pensais que c’était simplement un mal de tête, mais ça ne voulait pas partir. Donc j’ai arrêté de jouer. »

Qu’est-ce qui l’a convaincu alors d’aller chercher une deuxième opinion médicale ?

« Ça persistait sur une longue période. Je voulais une autre opinion et j’ai obtenu des réponses de cet autre médecin. C’était bon pour moi, comme personne et comme joueur. »

Ce n’est absolument pas une commotion, c’est la bonne nouvelle. C’était lié à mes problèmes de vision. C’est là où on en est. J’ai fait des tests, et me voici maintenant en santé et prêt à jouer.

Noah Juulsen

Et comment a-t-il géré ses maux de tête ?

« Je devais me reposer, et ils avaient un traitement pour moi. Je l’ai suivi, et ça a fonctionné. »

Le seul moment où Juulsen laissera voir la fissure dans l’armure est lorsqu’on lui demande si cette « situation » est arrivée au pire moment possible. Après des mois d’inactivité, au début du camp, et à un moment où, manifestement, le Canadien avait un poste disponible à la ligne bleue.

Sa grimace trahit une certaine frustration.

« Oui, j’ai été découragé par le moment où ça s’est passé. »

Puis il se referme aussi vite.

« J’étais au camp, j’étais prêt. Me voici maintenant. Je suis prêt. »