Le 25e anniversaire du match de Manon Rhéaume avec les Draveurs de Trois-Rivières, le 26 novembre 1991, permet d'abord de commémorer la contribution exceptionnelle d'une femme à la cause du hockey féminin. Mais c'est aussi l'occasion de mettre ce sport, et le sport féminin en général, de nouveau à l'avant-scène.

C'est du moins l'opinion exprimée par Danièle Sauvageau lors d'une entrevue qu'elle a récemment accordée à La Presse canadienne.

«On dirait que cette 25e année arrive à point, observe l'ancienne entraîneuse de l'équipe nationale du Canada. Le sport féminin en général, que ce soit le hockey ou un autre, fait encore face à des enjeux de reconnaissance, de talent ou d'investissement. Le sport féminin doit franchir une autre étape pour assurer une certaine pérennité.»

Depuis la présentation du premier championnat du monde en 1990 à Ottawa, le hockey féminin est parvenu à faire des avancées, la plus importante étant sa présence aux Jeux olympiques à compter de 1998 à Nagano.

En participant à un match de la saison régulière de la Ligue de hockey junior majeur du Québec, puis à une rencontre préparatoire dans la LNH en 1992, Manon Rhéaume a également contribué à faire progresser son sport, affirme Sauvageau.

«Ç'a été un moment très important dans l'histoire du hockey féminin, un moment très positif, même si beaucoup disaient qu'il s'agissait d'un «stunt» de marketing. C'est une porte qu'elle a ouverte qui ne pouvait plus se refermer.

«Pour moi, Manon était une ambassadrice, ajoute Sauvageau. Elle ouvrait des portes, faisait jaser à cause de ses actions. Elle faisait émerger la réflexion. Sans ces moments, nous n'aurions pas ce que nous avons aujourd'hui. Le nom de Manon Rhéaume est connu sur la planète au niveau du hockey féminin.»

L'audace de Rhéaume aura laissé une impression favorable auprès de toute une génération de hockeyeuses québécoises. La liste inclut une autre pionnière, France Saint-Louis, avec qui elle a vécu la douloureuse défaite aux mains des États-Unis lors de la finale des Jeux de 1998.

«Le fait qu'elle a démontré qu'elle pouvait jouer avec les gars a aidé à faire parler de hockey féminin, note Saint-Louis. Et aujourd'hui, elle est impliquée au niveau du hockey pour les jeunes. Elle a fait beaucoup pour le hockey féminin.»

C'est aussi le cas de Caroline Ouellette qui en 1991, à l'âge de 12 ans, se voyait jouer dans la LNH, et de Marie-Philip Poulin, qui n'avait que huit mois quand Rhéaume a été envoyée dans la mêlée à Trois-Rivières.

«Manon est une personne tellement fantastique, tellement généreuse et toujours de bonne humeur, déclare Ouellette. Quand nous nous sommes rencontrées, nous sommes devenues tout de suite de bonnes amies. C'est une grande femme qui a traversé beaucoup d'obstacles pour faire reconnaître notre sport.»

Et il y a les gardiennes Kim Saint-Pierre et Charline Labonté.

Cette dernière, aujourd'hui porte-couleurs des Canadiennes de Montréal dans la Ligue canadienne de hockey féminin, a franchi une barrière de plus que Rhéaume en participant à 28 matchs dans la LHJMQ, réparties sur deux saisons, avec le Titan d'Acadie-Bathurst en 1999 et 2000.

«Lorsque j'ai signé mon contrat avec le Titan, elle m'a envoyé une carte pour me féliciter, confie Charline, qui ne l'avait alors toujours pas rencontrée.

«Quand tu as 16 ans et que ton idole prend le temps de t'écrire, ça fait quelque chose. Manon est un modèle vivant, une pionnière, surtout pour moi qui suis une gardienne de buts.»

«Elle a réussi quelque chose que personne d'autre n'a accompli à ce jour, renchérit Saint-Pierre, qui a pris le relève de Rhéaume avec l'équipe nationale en 1999. Le hockey féminin est rendu à un tout autre niveau. On pratique un sport pour atteindre les plus hauts niveaux, et elle a réussi.»