Pas question de parler de la guigne de la deuxième année pour Benjamin St-Juste. Le demi défensif des Commanders de Washington a consolidé sa place dans la formation partante et son nom résonne de plus en plus aux quatre coins de la NFL. Le Québécois de 25 ans a passé une quinzaine de minutes au téléphone avec La Presse, du domicile de sa conjointe au Colorado, pour discuter du passé, du présent et de l’avenir.

Il restait 35 secondes au match. C’était le 13 octobre dernier, à Chicago, dans le cadre du Thursday Night Football, à heure de grande écoute à la télévision nationale américaine. Les Bears tiraient de l’arrière 12-7 face aux Commanders. Après trois jeux infructueux dans la zone payante, ils ont tenté le tout pour le tout, au quatrième essai, à quatre verges des buts. « Dans la NFL, en quatrième essai, il faut marquer, il faut que le ballon se retrouve entre les mains de ton meilleur joueur et le meilleur joueur de l’autre bord, c’était Darnell Mooney », explique St-Juste en disséquant le jeu dans les moindres détails, même si la séquence remonte à presque quatre mois.

« J’étais un contre un avec lui. Je savais que la balle arriverait de mon côté. » À ce moment, il devait « rester calme » : « Je devais me concentrer sur ma technique. »

À la levée du ballon, Mooney a entamé un tracé à options. Il a vendu un slant, un tracé à 45 degrés vers l’intérieur, mais il a changé de trajectoire pour se diriger vers l’extérieur, « ce qui est très difficile à couvrir pour un demi défensif », insiste l’athlète de Rosemère.

« Grâce à mon agilité et à mon jeu de pieds, j’ai réussi à faire le changement de direction assez vite pour revenir à une verge devant la ligne des buts. »

Le quart Justin Fields a lancé le ballon en direction de Mooney sur le coin de la zone des buts. St-Juste explique : « Le but, c’était de mettre mon bras entre ses deux bras lorsque le ballon arriverait. Comme ça, il ne pourrait pas fermer ses mains pour attraper le ballon et avoir le contrôle. Et après, avec mon autre bras, j’ai réussi à le sortir de la ligne des buts pour être sûr que ce ne soit pas un touché. »

Mooney n’a jamais pénétré dans la zone avec le ballon. St-Juste venait d’effectuer le plus gros jeu de sa carrière pour assurer la victoire des siens. « J’ai même reçu le ballon du match de la part de coach Rivera. »

Le Québécois a pris le temps de savourer le moment. « Ce ne sont pas des choses qui arrivent chaque jour. »

Ce genre de frénésie lui « donne juste le goût d’en faire plus et de rejouer comme ça pour [son] équipe », insiste-t-il.

Un bilan positif

Grâce à l’importance de ce jeu, mais aussi à son efficacité tout au long de la saison,
St-Juste s’est fait remarquer partout dans la ligue. À l’intérieur même de son équipe, il est devenu indispensable. Il a été de l’alignement de départ des 12 matchs auxquels il a pris part. Il a dû s’absenter cinq fois pour guérir une blessure à une cheville.

PHOTO TIRÉE DE WIKIPÉDIA

Le Québécois Benjamin St-Juste, demi défensif des Commanders de Washington

Ç’a été un gros bond entre ma première et ma deuxième année.

Benjamin St-Juste

En vérité, il décrit sa saison 2022 comme « une saison de développement, de progrès, de hauts et de bas, tant sur le plan individuel que collectif ».

Il a provoqué 1 échappé, réussi 2 sacs du quart et 42 plaqués. Son rendement a presque doublé dans toutes les catégories. « Je crois que mon avenir est prometteur à Washington. »

D’autant plus que l’équipe ne cesse de s’améliorer. Les Commanders ont terminé l’année à une victoire d’une place en éliminatoires, en plus d’avoir été la première équipe à infliger une défaite aux Eagles de Philadelphie.

Un nouveau défi

St-Juste participera néanmoins au Super Bowl, mais dans un rôle d’analyste. Il se joindra à l’équipe du Réseau des sports (RDS) lors de la présentation du reportage de dimanche soir.

« Je suis excité de travailler avec eux, se réjouit-il. […] Quand ils me l’ont offert, j’ai accepté sur-le-champ. Je pense que je vais adorer ça, je suis très à l’aise avec les entrevues. »

L’ajout de St-Juste au panel est pertinent, puisqu’il affronte régulièrement les Eagles, des rivaux de division. « Ça reste du football, donc je suis capable de donner du bon contenu et de l’information aux Québécois qui écouteront le match et qui aiment ça apprendre. Ça donne une autre perspective d’avoir un gars qui joue contre les joueurs qui seront sur le terrain. »

À qui l’avantage ?

Selon St-Juste, nous aurons droit à un excellent affrontement. À son avis, il y aura une abondance de points.

Ce sont deux équipes qui marquent beaucoup. Elles ont des joueurs explosifs, de bons quarts-arrières. Je m’attends à ce que chacune des équipes marque au moins 21 points. Autrement, ce serait surprenant.

Benjamin St-Juste

Les Commanders ont été la seule équipe à battre Jalen Hurts cette saison. Pour les Chiefs, dont la défense suscite énormément de questions à l’approche de ce grand match, il faudra exceller dans les zones profondes pour espérer pouvoir rivaliser avec les Eagles.

« Il faut limiter les jeux explosifs, c’est-à-dire tous les jeux de 35 verges ou plus, comme de longues passes à DeVonta Smith ou A.J. Brown. Les Eagles aiment tirer profit de jeux comme ça et c’est de cette manière qu’on a réussi à les battre cette saison. »

La recette gagnante serait donc de « limiter les Eagles à des jeux courts, comme des petites courses ».