Lors de sa première visite à Montréal, Babe Ruth avait frappé les deux plus longs circuits jamais vus ici. La balle avait tellement voyagé qu’elle était passée par-dessus les saules du parc voisin.

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Bon, pour son premier match chez nous, samedi soir, Lionel Messi n’en a pas fait autant. L’Argentin n’a ni logé un laser de 50 mètres dans la lucarne, ni déjoué sept adversaires avant de compter sur une bicyclette initiée par sa propre passe.

En fait, il a été blanchi. Aucun but, aucune passe décisive. Une première pour lui cette saison. Sauf qu’il est souvent passé proche, surtout dans le dernier quart d’heure, si bien que cette partie d’anthologie a rempli ses promesses.

L’ambiance au stade Saputo était festive. Électrique. Comme celle d’un réveillon. Toute la famille footballistique québécoise était sur son 36. Ici, Joey Saputo et son père Lino. À la cloche, Valerio Gazzola. Là, Gabriel Gervais, Mauro Biello, ainsi qu’à peu près toutes les légendes locales de l’histoire de l’Impact. Même Olivier Renard, parti dans la tourmente cette semaine, était de retour à la maison.

Dans les gradins, c’était plein à ras bord. Salle comble. Messi a été accueilli chaleureusement. Un peu trop, d’ailleurs, au goût de l’entraîneur du CF Montréal, Laurent Courtois.

Je comprends pourquoi les gens encourageaient Messi. Mais comme entraîneur-chef, entendre mon stade s’emballer pour l’autre gars pendant que mon club perd, c’est difficile.

Laurent Courtois, entraîneur-chef du CF Montréal

Ces encouragements étaient inévitables. Lionel Messi, c’est de la très belle et très rare visite. Jamais n’avait-il disputé de match ici auparavant. Dès son arrivée dans la métropole, vendredi soir, il a reçu un accueil triomphal. Des dizaines de personnes se sont rassemblées devant le portique de l’hôtel Ritz-Carlton, où il séjournait, pour le saluer. Même scène samedi en fin d’après-midi, cette fois le long de la rue Sherbrooke Est, entre le stade Saputo et le parc Maisonneuve. Des centaines de personnes s’entassaient sur les trottoirs et le terre-plein dans l’espoir de l’entrevoir à travers une fenêtre de l’autocar de son équipe.

Dans le stade, ses admirateurs sont arrivés jusqu’à deux heures en avance afin d’être aux premières loges pour son échauffement. Les enfants portaient surtout son maillot rose de l’Inter Miami. Les jeunes adultes, son chandail de l’Argentine. Les gens de mon âge, celui du FC Barcelone. Après, ce n’était pas une marée rose non plus. Rien de comparable avec les matchs du Canadien en Floride pendant le temps des Fêtes, lorsque l’aréna est bleu-blanc-rouge. Samedi soir, le stade Saputo est resté bleu-blanc-noir.

Et son match, dans tout ça ?

Même sans courir, Messi a été au cœur de plusieurs actions spectaculaires. Dès la deuxième minute, il a servi une belle passe dans l’enclave à Julian Gressel, dont le tir a été bloqué par Joel Waterman. Quinze minutes plus tard, il a obtenu un coup franc en plein centre du terrain, à quelques pieds de la surface de la réparation. Dans sa zone préférée. Le CFM a aligné devant lui un mur aussi compact que les barrières de sécurité ceinturant le stade. Messi a visé la partie supérieure du filet. Raté. Le petit attaquant a profité d’une autre belle chance peu après, lorsque Waterman a malencontreusement servi un caviar à Luis Suárez, qui a refilé le ballon à son coéquipier. Le défenseur montréalais a toutefois été en mesure de racheter son erreur et de contrer Messi, avant qu’il ne se rende jusqu’à Jonathan Sirois.

L’Argentin a été plus menaçant en deuxième demie. À la 58minute, il s’est démarqué de trois joueurs montréalais en zone centrale pour amorcer la montée ayant mené au but de Benjamin Cremaschi. À la 83minute, Messi a raté le filet de peu avant qu’un hors-jeu ne soit appelé.

La foule a apprécié. « MESSI, MESSI, MESSI », a-t-elle entonné, avec entrain. C’est le bout de la soirée que Laurent Courtois n’a pas particulièrement aimé.

À la 87minute, le gagnant de la plus récente Coupe du monde a raté un deuxième coup franc bien placé. Puis, dans les derniers moments du match, il a dansé habilement entre plusieurs joueurs montréalais, près de la surface, sans succès.

Lionel Messi n’a peut-être pas compté de but. Mais comme Babe Ruth il y a 100 ans, il a conquis des cœurs et marqué l’esprit des spectateurs montréalais.