Super Bowl. Prolongation. Quatrième essai. Une verge à franchir, sans quoi c’est la défaite. Le suspense ultime.

Tout joueur de football, peu importe son âge, peu importe son talent, a déjà rêvé de vivre un moment comme celui-là. Sauf que cette fois, ce n’était pas qu’un fantasme. C’était la réalité. Patrick Mahomes devait assurer, sans quoi ses Chiefs de Kansas City allaient s’incliner contre les 49ers de San Francisco, au terme d’un duel épique de plus de quatre heures.

C’est lorsqu’il y a péril que les plus grands champions se démarquent. C’est sous la pression que les légendes brillent le plus fort. Mahomes a pris le jeu sur ses épaules. On gagne avec les meilleurs. On perd avec les meilleurs. Le quart-arrière des Chiefs a feint une remise. Les 49ers ont mordu. Mahomes est ensuite sorti de la poche de protection du côté droit, où un trou s’est formé. Il a foncé sans hésiter. Gain de huit verges. Premier essai. Les Chiefs restaient en vie.

Puis Mahomes a mahomisé.

Il est devenu inarrêtable.

Cinq passes réussies consécutives. Une course de 19 verges. Une remise à Isiah Pacheco, pour un court gain. La défense des Niners, jusque-là hermétique, se décomposait sous nos yeux, comme les pauvres soldats brûlés par les dragons de Daenerys dans Game of Thrones. Dans la zone payante, Mahomes a passé à Travis Kelce, pour avancer de sept verges. La victoire ne se trouvait plus qu’à trois enjambées. Une courte passe à Kelce qui marque, caméra sur Taylor Swift qui célèbre, caméra sur Kelce qui lui envoie une volée de bisous, caméra sur Taylor qui lui chuchote « I Love You », caméra sur Kelce qui lui fait au cœur avec ses doigts. Le script s’écrivait tout seul.

Tellement prévisible que Mahomes s’est plutôt tourné vers un coéquipier que personne ne surveillait. Un joueur qui n’avait inscrit aucun touché cette saison. Un receveur qui, avant le Super Bowl, n’avait capté que deux passes dans toutes les séries. Mecole Hardman. Touché. Victoire. Pour une deuxième année de suite, et une troisième fois en cinq ans, les Chiefs étaient sacrés champions de la NFL.

Ce titre occupera une place privilégiée dans le palmarès exceptionnel de Patrick Mahomes. D’abord, parce qu’il l’a obtenu à l’arraché, en prolongation, dans un contexte de remontée. Aussi, parce que l’adversaire était coriace – et franchement malchanceux. Ici, un botté de dégagement qui dévie sur un pied avant d’être échappé. Là, un botté de transformation bloqué. Ce petit point perdu aura fait la différence entre un gain des 49ers en temps réglementaire et l’obligation de disputer une période (fatale) de plus.

Mahomes, sans surprise dans les circonstances, a été nommé joueur par excellence de la rencontre. C’était déjà la troisième fois qu’il remportait cet honneur dans sa carrière. Qui en a fait autant, dans ses sept premières saisons ? Personne. Pas même l’homme avec le plus gros manteau de cheminée en Amérique, Tom Brady.

Lorsque ce dernier était à son apogée, on se disait que jamais on ne reverrait un quart aussi dominant dans l’histoire. Ou du moins, de notre vivant. C’était simplement impossible. Avec sa performance dimanche, Mahomes nous a rappelé que les records sont faits pour être battus. Et qu’il est en bonne position pour rattraper, voire dépasser Brady.

La bête noire du Canadien

Deux défaites en deux jours. Encore une fois.

C’est devenu un mauvais pli pour le Canadien. Sa fiche lorsqu’il dispute deux matchs en 24 heures, cette saison ? Une victoire, neuf défaites. C’est le pire rendement de la Ligue nationale, avec celui des Flames de Calgary.

N’est-ce pas un peu normal, monsieur le chroniqueur ? Après tout, le Tricolore n’est-il pas une des pires équipes de la ligue ? En effet. Sauf que ça n’explique pas tout. Ça ne justifie pas l’immense écart entre sa moyenne au repos (.571) et celle sans journée de répit (.100).

Pires différentiels repos/sans répit

  • Devils du New Jersey -487
  • Flames de Calgary -474
  • Canadien de Montréal -471
  • Kings de Los Angeles -357
  • Lightning de Tampa Bay -333
  • Islanders de New York -326

Note : Écart entre la moyenne sans journée de répit et celle au repos

C’est quoi, le problème ? La forme physique ? Peut-être. Or, la moitié des équipes présentent un meilleur rendement lorsqu’elles jouent un deuxième match en 24 heures que lorsqu’elles profitent d’au moins une journée de répit. C’est notamment le cas des Sharks de San Jose, des Blue Jackets de Columbus et des Sénateurs d’Ottawa, que personne ne confondra avec les Oilers d’Edmonton des années 1980. Aussi, ce n’est pas comme si le Canadien misait seulement sur des vétérans à bout de souffle. Sa formation est la deuxième plus jeune de toute la ligue.

Et si ce n’est pas la forme physique, c’est quoi ? La fatigue psychologique ? L’inexpérience ? La préparation ? La direction devra trouver le point faible avant la prochaine saison. Parce que si le Canadien avait la même moyenne sans répit qu’au repos, il serait aujourd’hui en plein cœur de la course aux séries.

La LNH doit envoyer un message fort

J’ai souvent critiqué le travail du comité de protection des barbares – pardon, du comité de discipline – de la LNH. Trop de sanctions clémentes. Trop de décisions inconstantes. Trop de bienveillance envers les agresseurs.

Quand j’ai vu le double-échec dangereux et inutile de Morgan Rielly au visage de Ridly Greig, samedi soir, j’ai craint une autre peine insignifiante de deux matchs. Pire, une simple amende. C’est vous dire comment j’ai été étonné d’apprendre que le comité a proposé à Rielly une rencontre en personne, ce qui lui laisse présager une longue suspension.

Pour ceux qui ont raté l’agression, elle est survenue avec cinq secondes à jouer dans la partie entre les Sénateurs d’Ottawa et les Maple Leafs de Toronto. Greig, en échappée, a compté un but en tirant de toutes ses forces à quelques pieds d’un filet désert. Rielly s’est ensuite rué vers lui pour lui assener un coup délibéré au visage, avec un bâton entre ses mains.

Greig a-t-il nargué les Leafs ?

Bien sûr. Après, sur l’échelle de la provocation, un lancer frappé dans un filet désert, c’est au ras des pâquerettes. L’attaquant des Sénateurs ne s’est quand même pas mis à quatre pattes pour souffler la rondelle jusqu’au fond du filet. Il n’a pas célébré son but en dansant le floss devant le banc adverse.

La réplique de Rielly était disproportionnée. Le vétéran des Leafs doit apprendre à mieux gérer sa frustration qu’un enfant de 4 ans à qui on a volé trois Skittles. Il mérite une sanction exemplaire. Au comité de discipline, maintenant, de nous surprendre agréablement.