Verrons-nous cette semaine la meilleure équipe de baseball de l’histoire ?

C’est le lanceur Chris Bassitt, des Blue Jays de Toronto, qui a soulevé cette possibilité il y a quelques jours. Il venait de prendre connaissance de la sélection qui représentera la République dominicaine à la Classique mondiale de baseball. « C’est probablement le meilleur alignement de l’histoire. Du premier au neuvième frappeur, ce sont tous des candidats au titre du joueur le plus utile. Littéralement. Lorsque nous comparerons cette formation avec les autres, dans 20 ans, nous dirons que c’est la meilleure jamais assemblée. »

Tut, tut, tut, jeune homme. C’est quoi, ce blasphème ?

Et les Yankees de 1927, avec Babe Ruth et Lou Gehrig ?

Et les Reds de 1976, avec Pete Rose, Joe Morgan et Tony Perez ?

Et les Red Sox de 2004, avec David Ortiz, Manny Ramirez et Pedro Martinez ?

Et les Expos de… OK, peut-être pas les Expos. Mais respectons les classiques, quand même. Bon, maintenant, montrez-moi l’alignement des Dominicains.

Il y a de la vitesse, c’est vrai. Des magiciens dans l’avant-champ. Des gros bras dans le champ. De la puissance au bâton. Beaucoup, beaucoup de puissance au bâton. Les lanceurs, ça ressemble à quoi ? Ils ont le Cy-Young de la Nationale, quand même. Et le partant du match sans point ni coup sûr de la Série mondiale. Et la moitié de l’enclos des champions en titre, les Astros de Houston. Pas mal, pas mal.

Chris Bassitt aurait-il raison ? Passons l’ordre des frappeurs en revue.

PHOTO ROSS D. FRANKLIN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Julio Rodríguez, des Mariners de Seattle

1– Julio Rodríguez, voltigeur de centre. Recrue de l’année dans l’Américaine la saison dernière. Un taureau. Il frappe. Il court. Il couvre plus de terrain que tous les autres voltigeurs de centre de la ligue. Combien de joueurs, dans l’Américaine, ont terminé dans le top 10 des buts volés et de la moyenne de puissance au bâton ? Un seul. Lui.

2– Juan Soto, voltigeur de gauche. Un frappeur menaçant. Depuis deux ans, les lanceurs lui ont accordé 280 buts sur balles. C’est 107 de plus que tout autre joueur de la Nationale.

3– Manny Machado, troisième-but. Il vient de signer un nouveau contrat de 350 millions. Pourquoi ? Parce qu’il frappe très fort. Déjà 6 saisons de 30 circuits et plus – et il n’a que 30 ans. Deuxième au scrutin du joueur le plus utile de la Ligue nationale l’année dernière.

4– Rafael Devers, frappeur désigné. Lorsque Bassitt a fait sa déclaration, Vladimir Guerrero fils occupait le quatrième rang des frappeurs. Malheureusement, le cogneur des Blue Jays s’est blessé, la semaine dernière, et il ratera le tournoi. Le plan B des Dominicains ? Rafael Devers. Depuis 2019, il a réussi 264 coups sûrs de plus d’un but. C’est plus que Guerrero. Plus qu’Aaron Judge. Plus que Mike Trout. Plus que tous les autres joueurs des ligues majeures, en fait. Son défaut ? La défense. Il a des mains de granit. Ça prendra donc aussi un plan B au premier but.

5– Teoscar Hernández, voltigeur de droite. Il possède le bras d’un lanceur de javelot et beaucoup de puissance au bâton, comme le prouvent ses bâtons d’argent de 2020 et 2021.

PHOTO SAM NAVARRO, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Jeremy Peña, des Astros de Houston

6– Jeremy Peña, arrêt-court. Dynamique, spectaculaire, il vient de remporter les titres de joueur le plus utile de la série de championnat de la Ligue américaine ET de la Série mondiale – à sa première saison dans les ligues majeures ! Quoi d’autre ? Il a frappé 20 doubles, 22 circuits et gagné le Gant doré à la position défensive la plus difficile.

7– Wander Franco, deuxième-but. Une future vedette. Lorsqu’il a été promu avec les Rays de Tampa Bay, à l’été 2021, il était le plus jeune joueur du circuit. Son impact fut immédiat. Il a terminé au troisième rang du vote de la recrue par excellence, et ce, même s’il avait disputé deux fois moins de parties que ses rivaux. Des blessures l’ont ralenti la saison dernière. Que peut-il accomplir en santé ? On le saura dans les prochains jours.

8– Quelqu’un au premier but. En l’absence de Vladimir Guerrero fils, quelqu’un devra jouer au premier coussin. Bon, ce n’est pas la position la plus exigeante. Je peux en témoigner, c’est là que mon entraîneur me cachait en défense. Mais offensivement, il y a des options intéressantes : Willy Adames (31 circuits, 98 points produits en 2022), Eloy Jimenéz (,295 en 2022), Nelson Cruz (459 circuits), Robinson Canó (335 circuits) et Jean Segura (,277 et 13 buts volés l’été dernier).

9– Gary Sanchez ou Francisco Mejía, receveurs. Ici, rien à signaler.

C’est un alignement terrifiant, bourré de jeunes au potentiel explosif. Rodríguez et Franco n’ont que 22 ans. Soto, 24 ans. Peña, 25 ans. Après, la République dominicaine dominera-t-elle la Classique mondiale ? Peut-être pas. C’est un étrange tournoi, dans lequel des pros affrontent des amateurs. Ce n’est pas une métaphore. Le voltigeur de centre de la République tchèque est professeur de géographie et le frappeur désigné, analyste financier.

Les Dominicains passeront facilement le premier tour – un tournoi à la ronde. Mais après, le lanceur adverse est en feu ? Les carottes sont cuites. Une seule défaite et c’est l’élimination. Les éditions précédentes de la Classique furent d’ailleurs marquées par d’énormes surprises. Pas plus tard que jeudi, l’Italie a battu Cuba 6-3, avec une équipe majoritairement composée de joueurs italo-américains.

La plus grande menace des Dominicains ? Les Américains. Avec Mike Trout, Mookie Betts, Paul Goldschmidt, Pete Alonso et Kyle Tucker, leur attaque est excellente, voire supérieure à celle des Dominicains. Mais au monticule, c’est franchement ordinaire. Avantage majeur aux Dominicains, qui misent sur le meilleur lanceur de la Ligue nationale, Sandy Alcantara, ainsi que sur six lanceurs des Astros de Houston, dont Cristian Javier (4-1, 48 retraits sur des prises en 32,2 manches en séries depuis 2020). Si ce n’est pas la meilleure équipe de l’histoire sur papier – j’exclus les formations des matchs des Étoiles –, ça s’en approche fortement.

PHOTO GERALD HERBERT, ASSOCIATED PRESS

Édouard Julien, des Twins du Minnesota

Et le Canada, dans tout ça ? Il est là. Ayez toutefois des attentes modestes. L’équipe ne mise que sur deux vedettes, Freddie Freeman et Tyler O’Neill. Les autres joueurs sont surtout des réservistes, des gars des ligues mineures, et même des retraités, comme Phillippe Aumont, hors des circuits professionnels depuis trois ans. Le Québec est bien représenté. En plus d’Aumont, on trouve trois joueurs d’avant-champ (Abraham Toro, Otto Lopez, Édouard Julien), qui devraient tous être dans la formation partante. Observez bien Édouard Julien. Coqueluche des partisans des Twins du Minnesota, c’est un espoir de premier plan, qui lutte pour un poste dans la formation des ligues majeures. Un bon tournoi pourrait aider sa cause.

Maintenant, play ball !

République dominicaine c. Venezuela, samedi 19 h
Royaume-Uni c. Canada, dimanche 15 h (TVA Sports)