La longue saison du baseball majeur a pris son envol, jeudi. Le Québécois Charles Leblanc, lui, a amorcé la sienne deux jours plus tôt, dans le niveau AAA, après un changement d’adresse inattendu. Changement qui ne semble pas l’avoir déstabilisé, bien au contraire.

Le 8 décembre dernier, Charles Leblanc était en Californie lorsqu’il a remarqué de l’activité intrigante sur son compte Instagram.

« J’ai vu qu’une fan page et un reporter des Marlins avaient commencé à me suivre », raconte-t-il, lui qui était alors membre de l’organisation des Rangers du Texas.

« J’ai trouvé ça vraiment bizarre et j’ai dit au coach des frappeurs avec qui j’étais à ce moment-là qu’il se passait quelque chose. Il m’a dit que c’était le Rule 5, il est allé voir sur l’internet et, comme de fait, je venais de me faire prendre par les Marlins. Honnêtement, je ne savais même pas que c’était la journée du Rule 5 ! »

Sans entrer dans les détails, « le repêchage de la règle 5 », organisé tous les mois de décembre, permet à des équipes de sélectionner certains athlètes d’autres organisations qui ne se trouvent pas dans leur formation de 40 joueurs, ces derniers étant protégés. Il sert notamment à éviter à des joueurs d’être oubliés. Bref, à leur donner une chance de se faire valoir ailleurs.

PHOTO TIRÉE DU SITE DU BASEBALL MAJEUR

Charles Leblanc

C’était un peu out of nowhere, je ne m’attendais pas à changer d’organisation. Mais c’est toujours le fun de savoir qu’une organisation te veut, qu’ils ont des plans pour toi.

Charles Leblanc

Et vous en avez parlé, de ces plans ?

« Non, malheureusement, explique le Lavallois, sélectionné dès le quatrième rang de ce repêchage spécial. C’est la réalité du baseball professionnel, les équipes ne sont pas vraiment transparentes par rapport à leurs attentes. Donc, il faut faire une bonne première impression et performer le mieux possible. »

Si Charles Leblanc ne connaît pas les plans des Marlins de Miami à son égard à moyen ou à long terme, il ne les connaissait pas davantage à très court terme. Cet entretien a eu lieu lundi soir, à 24 heures du match d’ouverture du Jumbo Shrimp – oui, la Crevette géante… – de Jacksonville, club-école AAA de la formation floridienne. Et il ne savait pas s’il serait de l’alignement partant.

« Non, ça va être une surprise quand je vais arriver au parc, a-t-il dit. J’espère jouer, c’est toujours le fun, les matchs d’ouverture. Ça fait ressortir un peu les papillons devant ses fans. »

Finalement, ç’a été le cas. Leblanc a entrepris le match au troisième but – il peut également occuper le premier et le deuxième coussin – et au neuvième rang du rôle des frappeurs.

La veille, il parlait donc de laisser une bonne première impression. À sa deuxième présence au marbre, mardi soir, il a frappé un circuit au champ opposé. À la suivante, un double dans la gauche. Puis, à sa dernière, en fin de neuvième manche, il a soutiré un but sur balles alors que les siens accusaient un retard d’un point.

Le lendemain soir, son circuit en solo en fin de sixième manche donnait les devants 6-5 au Jumbo Shrimp.

Qui dit mieux ?

Un été difficile

Charles Leblanc, produit de l’Université de Pittsburgh, a été repêché en quatrième ronde par les Rangers du Texas en 2016.

Il a gravi les échelons un à un, jusqu’à ce qu’il se joigne l’an dernier à l’Express de Round Rock, au niveau AAA. Où il a connu un départ canon. Solide en défense, il a vu sa moyenne à la plaque atteindre la barre stratosphérique de ,400 au début du mois de juin.

« Je suis à seulement un appel de jouer dans les ligues majeures », avait-il lâché à notre chroniqueur Alexandre Pratt quelques jours plus tard. Et puis, il est tombé dans un creux de vague. Un long et profond creux de vague.

Les superstitieux diront qu’il s’est porté malheur. Quoi qu’il en soit, il a frappé pour moins de ,200 en juin, en juillet et en août. En juillet, un famélique ,123.

C’est le baseball, il y a des hauts et des bas. Mais c’est sûr que c’était un bas un peu plus creux que ce à quoi je suis habitué.

Charles Leblanc

Le joueur de 6 pi 3 po explique qu’il avait modifié son approche dans la cage et son élan avant la saison. Afin de générer plus de puissance, ce à quoi s’attendent les équipes de leurs joueurs imposants.

En mai, la chance lui souriait. Mais quand celle-ci a commencé à lui faire faux bond, ces ajustements se sont retournés contre lui. Parce qu’il n’était pas encore suffisamment à l’aise avec cette nouvelle approche pour remonter la pente rapidement.

Ça a pris du temps. Mais en septembre et en octobre, il avait trouvé l’équilibre entre l’ancien et le nouveau Charles Leblanc. Entre celui qui visait beaucoup le champ opposé et celui qui cherchait davantage la puissance. Il a conclu la campagne avec une moyenne de ,229, 17 circuits et 57 points produits en 96 matchs.

Mais, surtout, avec la conviction d’« avoir appris comment revenir à la base et retrouver le droit chemin ».

Bien sûr, les ligues majeures demeurent l’objectif. « Le plus vite possible. »

« Mais dans le passé, j’ai tellement été déçu, admet-il. Je suis un des meilleurs joueurs de l’équipe à ce moment-là, ça fait un mois et demi que je suis en feu, je me dis que c’est sûr que je vais me faire monter de niveau et il n’y a pas de move qui se fait. Je ne veux juste pas, mentalement, me donner un objectif de temps. »

Chat échaudé…

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Otto López blessé

Le Québécois d’origine dominicaine Otto López avait été retranché par les Blue Jays de Toronto la semaine dernière, mais il n’a pas entamé la saison dans le AAA avec les Bisons de Buffalo pour autant. Le Montréalais soigne une blessure et les Jays ont choisi de le garder dans l’environnement du club, à Dunedin, en Floride, nous a laissé savoir lundi son agent, Jethro Supré. Otto López fait partie de la liste de 40 joueurs de la formation torontoise.