Vainqueur pour la quatrième fois depuis le départ, le Colombien Fernando Gaviria s'est affirmé définitivement comme «le» sprinteur du Giro en gagnant la 13e étape, vendredi à Tortona (nord-ouest), à la veille de rejoindre les hauteurs d'Oropa.

Si le plateau manque de bon nombre de spécialistes (Kittel, Cavendish, Sagan, Kristoff, Démare et Bouhanni notamment), Gaviria se montre impressionnant pour ses débuts dans un grand tour. Au point que Mark Cavendish, la référence du sprint contemporain, s'est fendu d'un commentaire significatif avant même le quatrième succès du Colombien: «Dieu merci, il ne courra pas le Tour cette année ! Il nous aurait rendu notre job très dur.»

Le néophyte de l'équipe Quick-Step, impressionnant dans la ligne droite finale, a sauté sur la dernière occasion proposée aux sprinteurs dans ce 100e Giro. Déjà victorieux des 3e (à Cagliari), 5e (à Messine) et 12e (à Reggio Emilia) étapes,  Gaviria a devancé nettement l'Irlandais Sam Bennett, son dauphin pour la première fois.

«C'était une «remontada» !», s'est réjoui le Colombien, qui a conforté son maillot cyclamen du classement par points après ce sprint qu'il a qualifié de «difficile». De fait, il n'a pu prendre la roue de son lanceur habituel, l'Argentin Maximiliano Richeze, qui était suivi par l'Australien Caleb Ewan, alors que Bennett était en tête.

Quand il s'en est rendu compte, Richeze a coupé son effort et a frôlé la chute avec Ewan. Pendant ce temps, Gaviria se faufilait à toute vitesse le long des barrières et affolait les statistiques. Dès son premier Giro, il est devenu à 22 ans le coureur colombien qui a gagné le plus d'étapes !

Coppi-Pantani: l'étape des légendes

«Je veux devenir un coureur de classiques», explique le nouveau phénomène du sprint, formé sur la piste (deux fois champion du monde de l'omnium) mais doté d'un gabarit de puncheur. Taillé, en somme, pour Milan-Sanremo, un peu plus que pour Paris-Roubaix qui, dit-il, est la course de ses rêves.

Cette étape de plaine, qui affichait à peine 100 mètres de dénivelé sur les 167 kilomètres, a laissé le classement inchangé, en faveur du Néerlandais Tom Dumoulin, avant une journée hommage. Le 100e Giro fête samedi deux légendes du cyclisme italien, marqué à jamais par les exploits du «campionissimo» Fausto Coppi dans l'immédiate après-guerre et le destin tragique de Marco Pantani dans les années 1990.

L'étape, réduite à 131 kilomètres, part d'un village de 100 habitants, la plus petite ville-étape de l'histoire de la course. Mais Castellania est le village de naissance en 1919 de Coppi, le mythe absolu du cyclisme en raison de ses exploits à répétition (deux doublés Giro-Tour, cinq Tours d'Italie, etc), de son panache et de son caractère innovateur. Mais aussi de son histoire personnelle, sa liaison avec la «Dame blanche» (Giulia Occhini) qui scandalisa à l'époque et lui valut, pour abandon du domicile conjugal, une condamnation à deux mois de prison avec sursis.

Le final arrive sur les hauteurs de Biella, au sanctuaire d'Oropa, l'un des plus importants des Alpes. En 1999, Pantani (décédé en 2004) avait réalisé un numéro ahurissant. Retardé au pied de la montée par un saut de chaîne, il avait mené une course-poursuite folle pour gagner l'étape. «Pantani est trop fort», avait soupiré Laurent Jalabert, battu de 21 secondes. Six jours plus tard, le «Pirate» devait quitter la course pour un contrôle sanguin hors norme.