Après deux saisons sur le circuit WorldTour, Guillaume Boivin revient courir en Amérique du Nord pour l'équipe Optum-Kelly Benefit Strategies, où il espère retrouver le plaisir perdu de faire du vélo.

Le Montréalais de 25 ans était partagé entre la déception et le soulagement lorsqu'il a annoncé à La Presse sa nouvelle destination pour 2015. Ce n'est pas sans un pincement au coeur qu'il quitte le peloton européen et l'équipe italienne Cannondale, qui fusionnera avec Garmin l'an prochain. Faute d'offre formelle d'un autre groupe, il est cependant convaincu que la formation continentale Optum représente le meilleur environnement pour relancer sa carrière.

«Je ne courrai pas WorldTour et les gens peuvent voir ça comme un échec, a reconnu Boivin en entrevue téléphonique jeudi matin. Mais ce n'est pas la fin du monde. J'ai juste 25 ans. Je ne vois pas ça comme un recul.» Plutôt comme un repositionnement afin de mieux avancer.

De plus en plus un travail

Dans l'incertitude depuis plusieurs semaines, Boivin a réfléchi à sa situation durant la dernière Vuelta, à laquelle il participait pour la deuxième fois. Il s'était mis une tonne de pression sur les épaules, et les résultats n'étaient pas au rendez-vous. La tête non plus. Le sport qui le passionnait ressemblait de plus en plus à un travail. L'idée de retourner sur le circuit américain s'est graduellement imposée.

«Juste pour retrouver le plaisir sur le vélo, la fougue que j'avais dans le temps, glisse Boivin, qui a complété le Tour d'Espagne au 149e rang. Ç'a toujours été ce qui me caractérisait comme coureur et comme athlète. Physiologiquement, je ne pense pas être un si grand athlète que ça. Ç'a toujours été ma tête qui m'a permis d'aller chercher des résultats. Je n'avais plus cette mentalité-là dans les derniers mois, la dernière année et demie. C'était en train de disparaître un peu.»

Ralenti par la maladie au printemps, isolé dans son appartement italien, le blues de l'éloignement a fini par saper le moral de l'ancien médaillé de bronze aux Championnats du monde U23. «Je comprends la décision de David Veilleux, souligne-t-il. Je crois que c'est un des motifs pour lesquels il a décidé d'arrêter. Ce n'est vraiment pas facile de s'exiler seul pendant toute l'année.»

Sportivement, Boivin craignait d'être cantonné dans un rôle d'équipier si une porte s'était ouverte dans une équipe européenne. «Souvent, tu finis par être un peu un pion dans l'équipe, résume-t-il. Aller chercher des bidons, ça ne me dérange pas de le faire de temps en temps, mais ce n'est pas ce que je veux faire toute ma vie dans le vélo.»

Pas en territoire inconnu

Dans les circonstances, l'offre d'Optum est tombée à point. Le sprinter a senti un intérêt authentique de la part du directeur général Jonas Carney, qu'il connaît depuis quelques années.

Il ne tombe pas en territoire inconnu puisque plusieurs coureurs québécois sont passés par cette filière, dont Veilleux et son ancien coéquipier Martin Gilbert, qui l'a encouragé à tenter l'aventure.

Il arrivera aussi avec le talentueux sprinter abitibien Pierrick Naud, qui évolue avec Garneau-Québecor cette saison, et le grimpeur Mike Woods, révélation de l'année au Canada.

«Jonas croit beaucoup en moi et il va faire son possible pour que je retrouve le chemin du succès», s'enthousiasme Boivin, heureux aussi de pouvoir passer plus de temps avec sa femme.

«J'aurai la chance d'être le leader de l'équipe sur plusieurs courses. Les plans ne sont pas définitifs, mais j'aurai un beau programme pour me redonner confiance. Chose certaine, je vais avoir du plaisir, ce qui est vraiment important à retrouver pour moi.»

L'équipe devrait passer quelques semaines en Europe au printemps avant de s'attaquer, entre autres, au Tour de Californie, à la classique de Philadelphie, au Grand Prix de Saguenay ainsi qu'aux tours de Beauce, du Colorado et de l'Alberta. «Le classement de l'America Tour sera un de mes objectifs», annonce-t-il.