Confrontés à une baisse de leurs revenus de commandites, les dirigeants des fédérations canadiennes de sports d'hiver évoquent souvent le désintérêt des grandes sociétés du pays après les Jeux de Vancouver. La situation s'était pourtant déjà produite en 1988, après les Jeux de Calgary...

«Certaines fédérations n'étaient pas prêtes pour affronter l'après-Vancouver, estime Marcel Aubut, président du Comité olympique canadien (COC). Il fallait au contraire s'organiser pour affronter les mauvais moments, prévoir les contrecoups des Jeux à la maison et travailler déjà à la préparation des prochains jeux.

«C'est ce que nous avons fait au COC et les résultats sont éloquents puisque nous venons d'annoncer un programme de 100 millions [sur quatre ans], avec des contributions importantes du secteur privé.»

Mauvaise approche?

Le dynamisme de Marcel Aubut et de son équipe a en effet réussi à convaincre le «Canada Inc.» qu'un investissement dans le sport était profitable. Le champion olympique Alexandre Bilodeau, aussi étudiant en finances à l'Université Concordia, y voit un symptôme de certaines lacunes au niveau des fédérations sportives.

«J'ai l'impression que certains de nos responsables du marketing approchent encore les entreprises en parlant de mécénat et en comparant cela à des dons de charité», disait-il récemment en entrevue.

«Ce n'est évidemment plus le cas. Les compagnies veulent avoir des retombées, de la visibilité. Il faut les approcher avec un vrai plan de marketing. Et on a la chance de leur offrir des résultats concrets, des athlètes qui brillent et qui sont souvent champions du monde dans leur discipline.

«Des commandites, on peut en trouver, assure Bilodeau. Je pourrais remplir ma combinaison de course si j'en avais la possibilité!»

Nos meilleurs athlètes bénéficient d'ailleurs de commandites lucratives. Erik Guay, Alex Harvey, Sébastien Toutant ou Kaya Turski, par exemple, sont tous membres de l'écurie Red Bull et gagnent très bien leur vie.

Manquer le bateau?

Pourquoi alors les fédérations ne sont-elles pas en mesure de monnayer le succès collectif des athlètes canadiens aux Jeux d'hiver. En soulignant les aspects négatifs de l'après-Vancouver, n'est-on pas passé à côté du formidable effet d'entraînement des 14 médailles d'or récoltées?

Me Aubut le croit. «Tout le monde doit revoir ses approches pour affronter le nouveau contexte économique, bien moins favorable qu'il y a quatre ou cinq ans, estime-t-il. Si nos fonds vont surtout au sport de haut niveau, nous allons aussi aider les fédérations à améliorer leurs capacités de trouver des sources de financement.

«Nos experts peuvent conseiller et former le personnel des fédérations afin de leur donner les bons outils en finances et en marketing. Il faut aussi faire preuve d'imagination, ne pas hésiter à innover...»

Souvent des anciens athlètes, les dirigeants des fédérations sportives canadiennes n'ont visiblement pas été formés en ce sens. Confrontés à une crise importante, ils peuvent toutefois utiliser leurs qualités d'athlètes pour aller de l'avant, en favorisant le travail d'équipe par exemple.

Les fédérations canadiennes de ski - acrobatique, alpin, biathlon, nordique, surf - ont récemment annoncé qu'elles travailleraient en commun pour offrir à d'éventuels commanditaires la possibilité de rejoindre une grande variété de publics cibles.

Voilà un pas dans la bonne direction, reconnaît Marcel Aubut, mais il en faudra beaucoup d'autres pour assurer la pérennité des succès canadiens aux Jeux d'hiver.

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L'ENNEMI DANS LA MAISON...

Le Comité olympique canadien a récemment annoncé qu'il contribuerait de façon significative à la mise sur pied et au financement d'une délégation canadienne compétitive aux prochains Jeux panaméricains, en 2015, qui seront disputés à Toronto.

Une bonne nouvelle pour le sport canadien, mais pas nécessairement pour les sports d'hiver. L'histoire démontre en effet que la présentation des grandes compétitions sportives internationales au pays entraîne une mobilisation des ressources autour de chacune d'elles, souvent au détriment des autres sports.

Les fédérations nationales de sports d'hiver, qui devront déjà composer avec une année post-olympique, n'ont qu'à bien se tenir...