Après avoir renoué avec leurs camarades sur les terrains (et les terrasses) cet été, les sportifs amateurs de tous âges et niveaux sont de nouveau renvoyés au vestiaire. En sifflant ce second entracte, Québec va pousser les adeptes de sports collectifs à se rabattre sur des activités individuelles. Mais pas évident de garder la motivation hors cadre social ! Voici quelques tuyaux pour garder le tempo en solo et gérer les ados échaudés.

Améliorer des aptitudes individuelles

Selon Sylvain Guimond, docteur en psychologie du sport, et Amélie Soulard, psychologue et consultante en performance mentale à l’Institut national des sports du Québec, c’est le moment ou jamais de forger des habiletés ou de combler des lacunes techniques, chose que l’on ne prend pas toujours le temps de faire en saison : maniement de la rondelle, dribles, précision des tirs, etc. « Ça permet d’accepter cette phase-là, et quand on reviendra au jeu, on n’aura pas perdu le côté technique, qui se sera peut-être même amélioré », indique M. Guimond. Mme Soulard suggère d’utiliser un miroir, de se filmer ou encore de solliciter l’avis de son entraîneur.

Travailler la tête, le corps, l’autonomie

Amélie Soulard prône également l’entraînement cardio et musculaire, parfois délaissé en saison. Mais pour elle, c’est aussi le moment de peaufiner sa préparation mentale, grâce à la visualisation. « Si on ne peut pas s’entraîner avec notre équipe, on peut visualiser et revoir mentalement des moments cruciaux, des matchs, des compétitions », dit-elle, ce qui permet de décortiquer des erreurs, de les comprendre, de les corriger.

Parmi les moteurs de la motivation, hormis le développement de compétences et le lien social, elle pointe l’autonomie, à muscler également, en s’efforçant à prendre des initiatives seul, sans reposer sur l’autorité de l’entraîneur ou la structure du groupe.

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Courir, pédaler ou lever des poids seul peut vite s’avérer rebutant pour les extravertis des stades et arénas.

Garder le contact technologique

En quête d’un bien-être physique, les sportifs grégaires recherchent aussi du lien social, surtout ces derniers temps. L’arrêt des activités de groupe ne doit pas sonner le délitement complet de ces contacts, et tous les moyens, même technologiques, sont bons pour les entretenir. « On a vu toutes sortes d’activités sur Zoom, où les gens peuvent s’entraîner ensemble, partager leurs résultats. Ce n’est pas idéal, mais c’est déjà mieux que sans ces réseaux. Les instructeurs devraient rester en contact avec leurs jeunes, c’est extrêmement important », souligne M. Guimond.

Varier les menus

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Briser la monotonie est l’une des clés du maintien de la motivation des entraînements en solo. On peut tester de nouvelles activités, ou changer de parcours lors de courses à pied ou de randonnées à vélo.

Courir, pédaler ou lever des poids seul peut vite s’avérer rebutant pour les extravertis des stades et arénas. Antidote à la morosité de la solitude forcée : diversifier le menu. « Si on fait toujours le même parcours, la motivation va diminuer. Il faudrait le varier, ajouter des obstacles, courir en montagne, se construire un but dans la cour et travailler sa précision, etc., illustre Amélie Soulard. Habituellement, varier les entraînements est une tâche qui incombe à l’entraîneur, mais il est temps de construire notre autonomie en ajoutant nous-mêmes de la diversité. » C’est aussi le moment d’essayer de nouvelles activités, de se lancer des défis, d’établir une structure et des objectifs.

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Course, exercices avec la rondelle, tirs, vélo : Sammy et Lucas entretiennent leur autonomie, leur lien social et le développement de leurs compétences sportives, trois moteurs de la motivation évoqués par la psychologue Amélie Soulard.

Et nos ados ? Un exemple à suivre

La belle théorie énoncée précédemment a été très bien mise en pratique par Lucas Vitello et Sammy Pallante, deux défenseurs de l’équipe de hockey midget Espoir des Lions du Lac Saint-Louis. La suspension des sports collectifs entrant en vigueur ce jeudi laisse un grand vide dans leur agenda, eux qui sont accoutumés à trois entraînements et deux matchs par semaine. « On a été très déçus, on espérait reprendre la saison avec nos coéquipiers et cela semble compromis », lâchent les deux jeunes de 15 ans. Mais plutôt que de se laisser abattre, ils ressortent leur plan B du printemps, avec des séances régulières et soutenues en solo ou en duo (dans les zones rouges, le gouvernement indique que les activités individuelles ou en duo sont autorisées dans le respect des consignes sanitaires). « On va améliorer notre jeu en vue de la reprise de la saison », annoncent-ils. Au programme : exercices en patins à roues alignées dans un stationnement du quartier, tirs, passes, sprints, vélo…

De quoi rassurer Germaine Vitello, la mère de Lucas. « On le tient occupé tout le temps. Même si de la crainte ou de l’inquiétude survenaient, on est là pour le rassurer et lui parler », confie celle qui s’est empressée de communiquer avec d’autres parents d’ados sportifs quand la suspension est survenue.

Des initiatives dignes de recevoir la bénédiction du psychologue Sylvain Guimond, qui recommande aux parents s’inquiétant pour leurs enfants privés de sport de garder un contact étroit avec eux. « En temps normal, la semaine d’un jeune est très structurée. Quand c’est chambardé, ça les insécurise. Il est important de remplir ces vides-là pour qu’il sente qu’on garde une structure, avertit-il. Il faut les garder actifs, être à l’écoute, et détecter des phrases qui peuvent être des signaux d’alarme. »

Selon Amélie Soulard, trouver un partenaire d’entraînement tout en respectant la distance de deux mètres, comme le font Lucas et Sammy, est une brillante idée. « Mais c’est aussi peut-être le temps d’aller chercher d’autres “coéquipiers”, comme des gens de notre famille, pour connecter avec eux et faire des activités ensemble. Jouer au hockey avec sa mère, peut-être pas, mais pourquoi ne pas aller marcher en montagne ? »