Comment diminuer le nombre de jouets à Noël sans décevoir les enfants

Joannie Dubois et sa conjointe Gabrielle Ménard ont bien réfléchi aux cadeaux qu’elles placeront sous le sapin pour leur petite Félixe, 2 ans. Elles veulent lui offrir une activité de même que des objets durables, de préférence de seconde main, le tout en quantité raisonnable. « On veut vraiment faire des choix intelligents », confie Joannie Dubois.

La famille de Félixe n’est pas la seule à vouloir limiter le nombre de jouets offerts aux enfants dans le temps des Fêtes. « Depuis la pandémie, les Québécois essaient d’éviter la surconsommation, d’allonger la durée de vie des objets, de limiter tout ce qui est achat superflu et d’acheter local. On peut tout à fait penser que ces comportements généraux vont, bien entendu, s’appliquer à Noël », explique Élisabeth Robinot, professeure à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, spécialiste en comportement du consommateur et membre de l’Observatoire de la consommation responsable.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Joannie Dubois, Gabrielle Ménard, leur chien Lucille et leur fille Félixe

Lorsqu’on lui demande ce qui guide ses choix de cadeaux, Joannie Dubois évoque notamment une conscience écologique, valeur qu’elle veut inculquer à sa fille dès maintenant.

Bien que l’aspect environnemental incite aussi Lina Maria Jaramillo Cardona à limiter le nombre de présents offerts à ses deux enfants, elle croit que c’est aussi une question de culture. « Mon mari et moi sommes d’origine colombienne et en Colombie, on a un cadeau de Noël, c’est tout », raconte-t-elle, en précisant que, dans son pays d’origine, ce n’est pas le père Noël qui distribue les présents, mais plutôt l’Enfant Jésus.

PHOTO FOURNIE PAR LINA MARIA JARAMILLO CARDONA

Lina Maria Jaramillo Cardona, en compagnie de son mari, Carlos, et de leurs enfants, Antonio et Victoria

Si notre enfant est habitué à recevoir beaucoup de jouets le 25 décembre, comment en diminuer le nombre sans le décevoir ? La solution se trouve dans la communication, répond Nathalie Parent, psychologue et auteure.

D’emblée, je poserais la question à l’avance à l’enfant ou à l’adolescent : “Qu’est-ce que tu en penses si on diminuait la quantité de cadeaux ?”

Nathalie Parent, psychologue et auteure

Le jeune est déçu par la suggestion ? On lui dit que l’on comprend sa réaction, continue Nathalie Parent. Puis on lui explique ce qui motive la décision.

PHOTO FOURNIE PAR NATHALIE PARENT

Nathalie Parent, psychologue et auteure

« On peut aussi aller lire la définition du mot “cadeau” ou encore réfléchir avec l’enfant à ce que représente pour lui un cadeau. […] Est-ce quelque chose pour faire plaisir à l’autre ? Il y a plein de façons de faire plaisir à quelqu’un sans nécessairement passer par une grande quantité de cadeaux », poursuit la psychologue, qui estime qu’on peut avoir cette discussion avec notre enfant à partir de l’âge de 8 ans environ.

Vers un Noël plus écoresponsable

En plus de diminuer le nombre de présents, il y a d’autres pratiques qu’on peut adopter pour un Noël plus écoresponsable.

« Enseigner la qualité, c’est un premier pas qui peut être fait. Éviter les choses qui ne servent à rien, les “bébelles” », suggère Corinne Gendron, professeure spécialiste en responsabilité sociale et environnementale à l’ESG UQAM.

Se tourner vers le seconde main, comme le font Joannie Dubois et sa conjointe, est aussi une belle solution de rechange. « De plus en plus de familles veulent se départir des jouets qu’elles n’utilisent plus. Il y a donc un accès assez facile aux jouets d’occasion, en très bon état en plus », affirme Élisabeth Robinot.

Comment un enfant réagira-t-il s’il apprend que sa nouvelle poupée a déjà appartenu à quelqu’un d’autre ? Moins qu’on peut l’imaginer, croit Élisabeth Robinot.

Dans les écoles, on parle de plus en plus de développement durable. On sensibilise énormément nos enfants à ces questions-là. C’est quelque chose de positif de refaire circuler les jouets.

Élisabeth Robinot, spécialiste en comportement du consommateur

Acheter local et éviter le suremballage sont aussi de bonnes options pour un Noël plus vert, soulignent les spécialistes consultées.

Des expériences plutôt que des jouets

Mère de deux enfants âgés de 5 et de 7 ans, Émilie Fayolle privilégie les activités aux jouets. Elle a tenté l’expérience à Noël dernier et avoue que ses enfants ont été un peu déçus. Elle a tout de même décidé d’utiliser la même formule pour leur anniversaire. À sa fille, elle a donné un cours d’initiation à l’équitation, tandis qu’à son fils, elle a offert une journée de motocross. « Depuis, ils m’en parlent tout le temps. […] Finalement, j’ai l’impression que ça leur fait de plus beaux souvenirs, par rapport aux jouets », confie-t-elle.

« Les études démontrent que dans l’esprit des individus, les expériences demeurent plus longtemps. Il y a un plus haut niveau de satisfaction comparativement à un objet, confirme Élisabeth Robinot. On a tout intérêt à favoriser les expériences. »

Si on opte pour une activité et que l’enfant est déçu le matin de Noël, car il n’a rien de nouveau avec quoi jouer, que fait-on ? On nomme la déception, répond Nathalie Parent.

On peut lui dire : « Tu as le droit d’être déçu, je peux comprendre. Maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? Est-ce qu’on passe notre journée à être déçu ou on choisit d’aller s’amuser ensemble avec ce qu’on a ? », suggère la psychologue.