Et si les anciennes salles de projection des studios de l’ONF devenaient des cinémas de quartier ? Les stationnements, des parcs ? Et la cafétéria, un restaurant ? « Nous, ce qu’on veut, ce sont des idées », lance Marcelo Gomez-Wiuckstern, de la Société immobilière du Canada (SIC).
Lors du deuxième week-end de décembre, la SIC a tenu deux journées de portes ouvertes aux anciens studios de l’Office national du film (ONF), situés dans l’arrondissement de Saint-Laurent en marge de l’autoroute 40.
Six visites guidées étaient offertes au public. Le but ? Demander aux citoyens concernés leur avis… mais aussi les faire rêver. Que faire des 50 000 mètres carrés qui se trouvent derrière le 3155, chemin de la Côte-de-Liesse, situé près d’une future gare du REM qui permettra de se rendre rapidement au centre-ville ?
« Tout est possible dans un contexte de viabilité », fait valoir Marcelo Gomez-Wiuckstern, vice-président aux communications corporatives et affaires publiques à la SIC.
« On veut voir quels sont les besoins sociaux avec les groupes communautaires. Aussi voir ce qui manque en matière de commerces : des épiceries, de petits cafés ? », renchérit Christopher Sweetnam Holmes, directeur de l’immobilier à la SIC.
La SIC veut prendre le pouls à la fois des organismes communautaires, de la communauté artistique, des promoteurs et des élus pour le premier « atelier de travail public » qui aura lieu le 24 janvier.
La Société immobilière du Canada a néanmoins des objectifs, dont offrir des logements abordables et sociaux pour contrer la crise du logement et être un modèle de développement écologique.
Après le départ de l’ONF en 2019, la SIC a pris possession des lieux et les a bien entretenus, assure son directeur de l’immobilier, Christopher Sweetnam Holmes. « La SIC est une société de la Couronne fédérale autonome qui transforme les anciens sites fédéraux pour les réintégrer dans la communauté, précise-t-il. Nous ne sommes pas un développeur comme les autres. On peut prendre plus de temps pour consulter, recueillir des idées et faire des choses plus innovatrices. »
Pour transformer les lieux, il faut les comprendre.
Christopher Sweetnam Holmes, directeur de l’immobilier à la SIC
Décor d’une autre époque
Le temps s’arrête lorsqu’on visite l’ancienne maison de l’ONF : le décor rappelle une autre époque, mais tout est encore là et en bon état. La salle de maquillage, les loges, les salles de projection, les noms des employés devant leur ancien bureau, les salles réfrigérées où on entreposait les bobines, la cafétéria, l’immense studio où on reproduisait des décors… On trouve même toujours des sous-planchers de sable et de gravier dans le studio de bruitage et une enseigne lumineuse de Norman McLaren où il a voulu reproduire telle une radiographie les idées qui se succédaient dans sa tête. « Nous sommes dans l’édifice Norman McLaren. On va trouver une place pour cette œuvre exceptionnelle », assure Christopher Sweetnam Holmes.
La plus grande salle de projection de 280 places bénéficie « d’une acoustique incroyable », vante-t-il. Sur l’immense console, on pouvait faire des retouches finales.
Est-ce que ça pourrait tout simplement demeurer une salle de cinéma ? « C’est une possibilité. Tout est sur la table, insiste Marcelo Gomez-Wiuckstern, vice-président aux communications corporatives et affaires publiques à la SIC. S’il y a un usage futur viable, c’est une possibilité. »
Commémorer 65 ans d’histoire
Il y a près de 70 ans, l’ONF avait décidé de s’établir dans un champ loin du centre-ville pour créer un effet de « campus », rappelle Christopher Sweetnam Holmes. Le fait de déménager son quartier général d’Ottawa à Montréal était aussi une façon de favoriser la production francophone et de rompre avec l’État et la période de la Seconde Guerre mondiale où l’ONF participait à l’effort de propagande.
Christopher Sweetnam Holmes rappelle toutes les innovations technologiques nées entre les murs du 3155, chemin de la Côte-de-Liesse. Il cite Dans le labyrinthe, film présenté sur plusieurs écrans à Expo 67, qui a mené à la naissance du format IMAX.
Les six pavillons du complexe occupés par l’ONF de 1956 à 2019 – et quelque 3000 employés – sont toujours loués à l’occasion pour des tournages. C’était « unique » pour la SIC d’offrir des visites guidées au public pour un de ses projets, souligne Marcelo Gomez-Wiuckstern. « Ce sont des édifices au passé tellement riche. Des gens ont habité autour sans les visiter. »
Pour le vice-président aux communications de la SIC, ce sont des souvenirs, car il a été chargé de production à l’ONF au début de sa carrière. C’est sans compter que son beau-père, Claude Chantelois, y a travaillé pendant 20 ans au service des ressources humaines.
Patience
Si la Société immobilière du Canada s’engage dans le « redéveloppement responsable et concerté » des lieux, il faudra être patient avant la première pelletée de terre. La SIC espère obtenir en 2025 une approbation des autorités municipales du plan directeur qui émanera des consultations publiques. Ensuite, il y aura plusieurs phases de développement réalisées en collaboration avec différents promoteurs. Le rôle de la SIC sera alors de protéger les usages mixtes, notamment avec des servitudes.
« Une chose que je peux garantir : ce sera un nouveau quartier », promet Marcelo Gomez-Wiuckstern.
La SIC en bref
La Société immobilière du Canada est une société d’État fédérale autofinancée qui se spécialise en immobilier, en aménagement et en gestion d’attractions. La SIC a été en dormance avant de relancer ses activités en 1995 avec la privatisation des terrains du CN.
La SIC est propriétaire de la Tour du CN, par exemple, mais aussi du site du Vieux-Port de Montréal et du Centre des sciences. Elle a trois autres grands projets en cours dans le Grand Montréal : la Pointe-du-Moulin avec le Silo no5, le site de la Pointe-de-Longueuil et le bassin Wellington.