« Notre devise, c’est qu’ici, on n’est pas chez nous. On est chez eux », lancent Sylvie Racine et André Filion, qui détiennent pourtant les titres de propriété de cette étonnante résidence écoénergétique dans Lanaudière, nichée entre deux lacs.
Alors, de qui parle-t-on quand on évoque « eux » ? Il s’agit des hôtes de ces bois, animaux comme végétaux, que le couple a voulu préserver autant que faire se peut lors de l’aménagement de l’immeuble. Cette philosophie du respect, ils l’ont également appliquée à la méthode de construction, misant sur l’efficacité écoénergétique et les principes d’une maison passive. Pas si singulier ? Peut-être pas en 2023, mais précisons que l’immeuble a été érigé en 2007, alors que les préoccupations environnementales étaient loin d’occuper autant les esprits.
Tout découle de la logique : M. Filion, aujourd’hui retraité, est physicien de formation et a travaillé pour Ressources naturelles Canada à titre de responsable du développement de technologies d’énergies renouvelables. « En fin de carrière, je suis tombé sur un article dans un journal spécialisé qui présentait une maison solaire en France ayant gagné un prix d’architecture. Son esthétique et ses capacités écoénergétiques ont attiré notre attention », se souvient-il.
Inspirés par ce modèle, Sylvie et André se sont mis en quête d’un terrain à distance raisonnable de Montréal pour y faire germer une résidence de même style, mais avec leur touche personnelle. Ils ont jeté leur dévolu sur un coin de Lanaudière qu’ils connaissaient bien, puisqu’ils venaient pêcher dans la réserve faunique de la Mastigouche, située à deux pas de là. L’aire à vendre répondait aussi aux exigences de leur future maison passive. « On cherchait le terrain avec une boussole, pour trouver une orientation plein sud », soulignent-ils.
Pour l’œil et pour l’âme
Une fois la zone de près de 2 acres acquise, plusieurs critères ont guidé la construction. Premièrement, l’esthétique, inspirée de la maison passive française découverte dans le magazine. « C’est très important pour nous, je suis passionnée d’architecture et de décoration », indique Sylvie Racine.
Il en a résulté des formes hors norme, avec un toit à la lisière du cubisme, et des jeux de triangles et de rectangles harmonieusement enchevêtrés, le tout peint en « kaki subtil » (même si les photos donnent la fausse impression d’une teinte jaunâtre). L’intérieur a aussi ses éléments déroutants, avec une curieuse ouverture ovale dessinant une mezzanine, le tout complété par un mobilier et des matériaux de haute qualité. Réparties sur deux étages et un sous-sol, 14 pièces composent le puzzle résidentiel. On note également la très belle terrasse au rez-de-chaussée et le balcon triangulaire à l’étage.
L’autre ligne directrice fut bien entendu l’efficacité énergétique des lieux, la spécialité de M. Filion. Parmi les ingrédients de la formule, on trouve des fenêtres à triple vitrage orientées plein sud, un foyer de masse, une imposante pierre en granit servant à emmagasiner la chaleur, une dalle de béton chauffée au glycol endossant aussi un rôle de masse thermique, et des murs intégralement montés en blocs isolants Nudura, présentant des coulées de béton de 6 po. Deux bornes de recharge pour véhicules électriques ont aussi été installées dans le garage double, séparé.
Cependant, par rapport au modèle d’inspiration original, il a fallu apporter quelques ajustements pour épouser le climat québécois.
L’architecte avec lequel on travaillait l’a modifiée pour qu’elle soit mieux adaptée au Québec, car certains éléments n’auraient pas fonctionné à cause du froid. Par exemple, la maison originale était munie de portes-fenêtres, car le climat du sud de la France le permet. On a coupé pour des fenêtres à triple vitrage, ce qui permet des économies d’énergie de 30 % à 40 %.
André Filion, copropriétaire
Impact minimal
Un troisième principe a également servi de cap à tenir : le respect de l’environnement, le terrain étant abondamment boisé et jouxtant deux petits lacs navigables où les moteurs à essence sont proscrits. « Il y a des familles de huards, des aigles à tête blanche, des bernaches, des tortues, des grenouilles, on ne veut pas détruire ça. Quand a construit, on a enlevé les arbres un par un, au minimum », évoque Mme Racine.
Le couple s’est même heurté à l’incompréhension de certains concessionnaires, notamment en magasinant huit panneaux solaires pour coiffer le toit du cabanon. « Ils nous disaient : “Ça n’en vaut pas la peine, vous ne rentrerez pas dans votre argent.” Mais nous, ce n’est pas un gain économique que l’on cherchait, on voulait le faire pour l’environnement... »
Désormais, il est temps pour la maison passive de passer la main. Qui en sera l’héritier ? Sans doute quelqu’un qui a l’environnement et l’architecture singulière à cœur.
Consultez la fiche de la propriétéLa propriété en bref
Prix demandé : 1 199 900 $
Évaluation : 300 000 $
Construction : 2007
Pièces : 14 pièces, dont 3 chambres, 2 salles de bains et 1 salle d’eau
Superficie du terrain : 79 358 pi2
Impôt foncier : 2630 $
Taxe scolaire : 268 $
Courtier immobilier : Rémi Vincent, Engel & Völkers