Des propriétaires nous ouvrent les portes de leur demeure d’exception, offerte sur le marché de la revente.

Déjà, le nom laissait présager une balade dans le passé. Le Moulin à eau de la Grande-Barbue… on aurait dit un conte de Fred Pellerin. On imaginait déjà un réveillon de famille où on se délecterait d’oie, de ragoût et de sucre à la crème. Le domaine du comédien Jean Leclerc à Saint-Césaire est tout ça et tellement plus. Récit d’une vie consacrée à rattraper le passé.

« À l’été 1975, le temps d’un rôle dans une pièce de théâtre, j’ai loué une magnifique maison patrimoniale dans Bellechasse, raconte M. Leclerc. Je venais de la ville, je ne connaissais pas les maisons en pierre. Je me sentais comme dans Docteur Jivago. Le propriétaire, un curateur de musée, m’a proposé de l’acheter, mais ce n’était pas très pratique pour un Montréalais. Son conseil : “Si tu trouves un moulin à vendre dans ta région, n’hésite pas ! Ils sont tellement rares que ce sera un bon investissement.” »

Rares, les moulins à eau le sont. M. Leclerc a passé le mot à son entourage et… a attendu. Un jour, on lui a parlé d’un moulin à vendre quelque part en Montérégie. « C’est grand, la Montérégie, mais j’étais déterminé. J’ai ouvert les Pages Jaunes et j’ai appelé tous les agents immobiliers jusqu’à ce que je tombe sur la bonne. »

Au premier abord, il a eu un sérieux coup de foudre avant même d’entrer. « J’ai fait une offre sur-le-champ. Puis, j’ai passé la nuit à me demander si je n’étais pas devenu un peu fou. »

Le moulin avait été commandé en 1829 par le seigneur Pierre-Dominique Debartzch. L’emplacement était idéal, car la force hydraulique nécessaire au fonctionnement de la roue à godets venait de la rivière qui serpente le terrain, la Grande-Barbue. Il a été en activité jusqu’en 1970. En 1976, la famille Angers qui l’exploitait depuis 1870 était prête à s’en défaire.

PHOTOS FOURNIES PAR ENGEL & VÖLKERS

Le moulin à eau de la Grande-Barbue est désigné monument historique.

Le moulin, sa maison et le vaste terrain avaient besoin de travaux. « Beaucoup de travaux. J’étais jeune, ma carrière allait bien et je me sentais invincible. » Sauf qu’il ne connaissait rien au travail manuel ni à la rénovation, comme le lui a rappelé son père découragé quand il a vu l’état des lieux à sa première visite. « Surtout que le toit ballottait au vent », se rappelle le fils en riant.

Avec l’aide d’amis et d’artisans, Jean Leclerc a passé le plus clair des 46 dernières années à bâtir ou restaurer méticuleusement sa maison et aménager le terrain qui l’entoure, ajoutant au passage quatre bâtiments, une piscine, des terrasses et tous les arbres qui s’y trouvent. Un travail titanesque.

« La semaine, je jouais à New York. Le vendredi, je prenais l’avion de 17 h pour rentrer à la maison où je troquais le costume pour le crowbar. Et je retournais à New York le lundi matin ! »

Outre les travaux de restauration qu’il a dû effectuer au fil des ans (tout était à refaire), il a créé un univers du XIXe siècle avec les commodités du XXIe.

PHOTO FOURNIE PAR ENGEL & VÖLKERS

Un plancher de grange a servi à la fabrication des comptoirs. La hotte est un ancien entonnoir de meunier inversé. Les portes d’armoires ont été réchappées d’un peu partout.

Les intérieurs ont été soigneusement aménagés avec des objets d’époque accumulés au fil des ans. M. Leclerc est un collectionneur né. Canards, angelots, armoires, rien ne lui échappe. « Je visite les antiquaires, les cultivateurs, les granges, les vieilles maisons. Quand je trouve, j’achète ! » Un exemple ? Les surfaces de travail de la cuisine et les marches de l’escalier viennent d’une vieille grange achetée pour 50 $.

« Pour la grange au complet ?

— Oui, mais il fallait qu’on la vide et qu’on la nettoie après ! »

Après l’avoir dépouillée de ses madriers qui ont servi à la charpente des pièces communes, M. Leclerc et ses amis s’apprêtaient à balayer le sol quand ils ont découvert des lattes de bois sous la paille. « On est revenus le lendemain pour les récupérer, une belle surprise. »

Le domaine extérieur est impressionnant. On se croirait dans un jardin enchanté. Et cette petite rivière agitée qui entoure le terrain… Nous l’avons visité un sombre jour de décembre où la pluie, plutôt que la neige, nous attendait. Qu’importe, il y a tant à dire sur cette propriété qu’on y serait restée longtemps à écouter son propriétaire raconter anecdotes et autres aventures.

M. Leclerc est dans sa 78e année. Après tant d’efforts et de travail, il est temps de passer à une autre étape. Il souhaite, on le comprend, que les prochains propriétaires veuillent conserver ce bijou patrimonial.

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La propriété en bref

Prix demandé

1 999 000 $

Année de construction

1829

Description

9 pièces comprenant 4 chambres, 2 salles de bains, 4 foyers au bois et 1 poêle à bois. Piscine creusée, 4 autres bâtiments, dont 1 résidence secondaire. Le moulin à eau de la Grande-Barbue est désigné monument historique.

Superficie du terrain

99 714 pi⁠2

Évaluation municipale

530 100 $

Impôt foncier

4652 $

Taxe scolaire

486,21 $

Courtière

Carole Lemieux, Engel & Völkers Montréal