Une chambre d’enfant, c’est un univers en soi. Un lieu pour grandir, découvrir, se réfugier. Un espace qui se transforme au fil des ans pour permettre à la personnalité de nos petits trésors d’éclore. Comment y construire un décor qui leur permettra de s’épanouir ? Des experts nous offrent quelques pistes de solution.

La chambre, apaisante et intime

Durant les premières années de vie d'un enfant, la chambre est essentiellement un endroit pour dormir.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Une chambre conçue par la designer d’intérieur Josée Cyr

« C’est probablement l’aspect le plus important à considérer chez les jeunes enfants », estime Sarah Lippé, professeure titulaire au département de psychologie de l’Université de Montréal. « Il faut que l’endroit soit sécurisant parce qu’il va accueillir le sommeil le soir, avec des peluches ou des objets que l’enfant va trouver apaisants. »

À mesure que l’enfant prend de l’âge et de l’autonomie, il va avoir besoin d’un refuge psychologique avec « son petit coin et ses petites choses », souligne-t-elle, à l’abri de son frère ou de sa sœur, d’autant plus s’ils partagent la même chambre. « Quand les enfants deviennent adolescents, ils ont besoin de leur intimité et c’est leur chambre qui va correspondre à cette pièce-là », ajoute la professeure.

Lorsqu’elle conçoit des chambres d’enfant, la designer d’intérieur Josée Cyr tient à faire participer le principal intéressé à la création de cet espace, en établissant ses intérêts, les couleurs et les motifs qui lui plaisent, à partir de photos ou de coupures. « J’aime que l’enfant soit là parce que ça va être son lieu à lui », insiste-t-elle.

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Détail de la décoration d’une chambre conçue par Josée Cyr

Mais avant de se lancer — si l’espace permet plus que la présence d’un lit et d’une commode —, il faut se poser quelques questions : est-ce qu’il va jouer, étudier, s’exercer à un instrument de musique, faire du bricolage ou lire dans cette pièce ? Les réponses permettront de déterminer les besoins en matière de meubles afin d’optimiser l’espace, le rangement étant le défi principal dans les chambres d’enfant.

« Les enfants ont besoin d’espace, mais comme on en a moins, paradoxalement, on peut leur faire un petit écrin dans ces chambres qu’on leur crée en portant une attention à chaque mètre pour qu’ils s’y sentent bien », avance Alexandra Viragh, auteure, entre autres, des livres Feng Shui, force d’harmonie et Espaces d’harmonie pour les enfants – L’univers de la psycho-décoration.

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Avant de se lancer, il faut se demander à quelles activités l’enfant s’adonnera dans sa chambre.

Des espaces vitaux

Cette experte suisse en la psycho-décoration, une théorie qu’elle a élaborée à partir du feng shui et du vastu shastra en les adaptant à notre mode de pensée occidentale, croit qu’il existe trois espaces vitaux auxquels il faut porter une attention particulière dans une chambre d’enfant : le lit, le bureau et le coin jeu.

L’enfant a avant tout besoin d’une protection à l’arrière de la tête lorsqu’il dort, explique-t-elle, donc il faut s’assurer de dormir contre un mur ou d’avoir une tête de lit pleine, en bois ou rembourrée. Pour les tout-petits, ça veut dire éviter les lits à barreaux contre une fenêtre ; mais si on ne peut pas bouger le lit, on peut mettre un molleton qui rendra la tête de lit opaque. Ainsi, l’enfant ne sera plus stimulé par le flux de l’air et de la lumière qui la traverse — des neuro-stimulants qui l’incitent à rester réveillé, explique Alexandra Viragh.

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Le lit est l’un des trois espaces vitaux, selon l’experte en psycho-décoration Alexandra Viragh.

J’invite vraiment, quand on a de la difficulté à aménager un espace, à créer un lit à baldaquin, ou avec une cabane, des voilages — une voile de bateau ou un style parachute —, parce que les enfants adorent ça.

Alexandra Viragh, spécialisée en psycho-décoration

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Détail de la décoration d’une chambre partagée conçue par Josée Cyr

Le bureau, quant à lui, ne doit jamais faire face au mur, à son avis, parce que c’est comme si l’enfant était puni quand il travaille. Sa solution ? Il suffit de le décoller du mur et de le faire pivoter quand l’enfant fait ses devoirs, pour qu’il ait une vue sur sa chambre, idéalement près de la fenêtre, et une tout autre perspective.

De la même façon, un tapis de jeu pourra être en retrait lorsqu’il n’est pas utilisé, puis placé, au moment de jouer, dans un endroit où l’enfant se sentira en sécurité — « donc pas entre la porte et la fenêtre », précise Alexandra Viragh. On peut aussi avoir un pouf, des coussins qu’on met par terre ou un plaid sur un lit ; l’important, selon elle, c’est qu’il y ait un espace qui soit moelleux, chaud, chaleureux et protégé. Et on n’oublie pas que pour qu’un enfant joue bien, note-t-elle, c’est important qu’il puisse bien ranger ses jouets : le meuble de rangement doit donc être plus grand que nécessaire pour qu’on n’ait pas l’impression de devoir résoudre un casse-tête pour y faire entrer les jouets.

« On interagit avec notre environnement et notre habitation en permanence et on a tous une relation spontanée, intuitive, avec l’espace, qu’il ait été aménagé selon certaines règles du feng shui ou avec goût, douceur et une belle intention », souligne Alexandra Viragh.

Consultez le site d’Alexandra Viragh Consultez le site de Josée Cyr, designer d’intérieur
Feng Shui — Force d’harmonie

Feng Shui — Force d’harmonie

Trajectoire

334 pages

Espaces d’harmonie pour les enfants – L’univers de la psycho-décoration

Espaces d’harmonie pour les enfants – L’univers de la psycho-décoration

Dangles

352 pages

Un décor qui se transforme

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

C’est très important que l’enfant ait un espace où il peut exposer tous ses rêves.

Les spécialistes sont unanimes : la chambre d’un enfant doit laisser suffisamment de place au changement pour qu’il puisse l’adapter à ses goûts, ses envies passagères et ses découvertes. Précisions en quatre points.

Une vitrine pour ses rêves

Alexandra Viragh a souvent vu des « chambres de rêve » aménagées à des coûts si élevés que l’enfant se retrouve à vivre dans le décor de ses 4 ans jusqu’à la fin du primaire. « Si la chambre n’est pas aussi esthétique que le reste de la maison, ce n’est pas grave parce que le but, c’est que l’enfant s’amuse. C’est très important qu’il ait un espace où il peut exposer tous ses rêves — les pompiers, les voitures de police — parce que ça lui permet d’en libérer certains et de passer à autre chose. Une déco, c’est de l’information psychique ; et une fois qu’il a tout expérimenté, il trouve sa voie. Ses murs sont des supports pour se développer psychiquement », explique-t-elle. La designer d’intérieur et présidente de Versa Style Design Lucie Pitt abonde dans ce sens et suggère d’enduire un mur ou une section avec de la peinture qui donne un effet de tableau blanc : cette surface, plus lumineuse et moins poussiéreuse qu’un tableau noir avec de la craie, lui permettra d’exprimer sa créativité à sa guise.

Un univers de couleurs

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Pour le lit, privilégier des couleurs douces, froides ou pastel.

Selon l’experte en psycho-décoration Alexandra Viragh, on devrait privilégier des couleurs douces, froides et pastel pour le lit, qui invitent au sommeil, au contraire des teintes vives, chaudes et toniques, ou des couettes « bariolées, avec des Batman ou des voitures » (qu’on peut remplacer par des affiches à côté du lit, précise-t-elle). En revanche, elle va à l’encontre des décorateurs qui conçoivent des chambres autour d’une même teinte : « L’enfant a besoin d’expérimenter la vie sous toutes ses formes dans sa chambre. On a besoin d’avoir un aspect multicolore », dit-elle, puisque les couleurs transmettent des informations émotionnelles. Elle donne l’exemple d’une chambre avec une décoration thématique de jungle, dans des tons de vert et de brun. « Il va manquer quelque chose à l’enfant. C’est comme si on lui disait : “Tu as un seul jouet pour ta chambre.” Il a tout le temps les mêmes repères psychiques et émotionnels. » L’enfant a envie de rose ? On opte pour des draps, des voilages ou même des ampoules de cette couleur, qui pourront plus facilement être changés que la peinture sur les murs. Il existe aussi des lampes qui peuvent projeter différentes teintes et ainsi varier les atmosphères, au gré des envies et des besoins de l’enfant — comme du bleu ou du violet pour l’apaiser le soir —, rappelle Alexandra Viragh.

Un environnement adaptable

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Dans cette chambre aménagée par la designer Josée Cyr, une bibliothèque a été utilisée pour créer une séparation dans la pièce partagée par deux enfants.

La designer Lucie Pitt ne jure que par des meubles et des accessoires de rangement modulaires et évolutifs. Les cubes de rangement, entre autres, très pratiques pour les tout-petits, peuvent toujours servir par la suite dans des modules adaptables du genre IKEA, quand l’enfant grandit. En bas âge, elle recommande des lits évolutifs, puis, quand l’enfant commence à étudier, un lit de style « loft », avec la couchette à l’étage supérieur et un espace vide en dessous où l’on peut installer un bureau, des tablettes de rangement, ou même un lit plus petit si la chambre est partagée. « C’est comme un petit appartement pour les enfants, c’est leur petit monde. Et quand ils sont ados, on peut mettre un canapé sous le lit loft », propose-t-elle.

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Un centre d’intérêt

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Un cadre a servi de point focal dans cette pièce décorée par la designer Josée Cyr.

Lucie Pitt rappelle enfin un point essentiel : comme les adultes, les enfants ont eux aussi besoin d’un « point focal », cet élément qui va attirer le regard quand on entre dans une pièce et refléter leurs passions. Un t-shirt de soccer encadré, une murale de graffitis en papier peint pour un amateur de planche… Même un tapis, qui va ajouter personnalité et couleur, et servir d’espace de jeu. « L’enfant va s’identifier aussitôt qu’il entre dans la chambre », précise-t-elle. Quand les enfants sont jeunes, on peut changer les thématiques plus souvent, en investissant moins, parce que leurs goûts changent rapidement ; vers l’âge de 10 ou 11 ans, il vaut mieux aller vers quelque chose « de plus mature », ajoute la designer, et choisir une thématique qui va l’accompagner un peu plus longtemps. « Tout le monde a besoin de son espace, même les jeunes enfants, estime Lucie Pitt. Et ce n’est pas nécessaire de dépenser beaucoup d’argent pour rendre un enfant heureux. »

Consultez le site de Versa Style Design