Il vient parfois un peu gâcher l’ambiance dans la cour arrière. Non, on ne parle pas de l’enfant turbulent du voisin, mais de ce mur de béton, de briques ou de bois, délaissé depuis de trop nombreuses années, et qui se dresse tristement dans le décor. Un bon coup de peinture lui (et nous) ferait le plus grand bien. Mais pour qui a les moyens, n’est-ce pas là l’occasion de s’offrir une belle œuvre murale d’artiste, haute en couleur ? On vous guide dans le processus.
Vérifier les règlements
Avant de contacter un artiste, mieux vaut joindre sa municipalité pour vérifier si la réalisation d’une peinture murale doit être autorisée ou non. En effet, la réglementation peut varier d’une ville à l’autre. À Montréal, elle relève des arrondissements. Par exemple, un résidant de Ville-Marie ou du Plateau « peut faire peindre une murale sans obtenir au préalable une autorisation, sauf si la murale est produite sur un mur de pierres ou d’ardoise, qui ne sont jamais peintes. En outre, la murale privée ne doit pas être une publicité ou servir de publicité à un commerçant, à moins d’obtenir une dérogation du conseil d’arrondissement », indique Linda Boutin, relationniste pour la Ville de Montréal.
Trouver et choisir un artiste
Il ne manque pas d’artistes muralistes au Québec. Plutôt que de choisir au hasard, mieux vaut fouiner un peu et dénicher le style qui nous convient. « Les gens devraient avoir une idée de ce qu’ils veulent, quel style et quels artistes ils aiment », recommande la peintre montréalaise Alessandra McGovern. « Si un artiste fait de l’abstrait et que quelqu’un l’approche pour faire un portrait réaliste sur le mur, ça ne marche pas vraiment. »
Julian Palma, autre muraliste de la relève, le confirme et préconise de « chercher quelque chose qui nous parle dans le langage de l’artiste ».
D’accord, mais où les trouver ? Observez les ruelles : souvent, des signatures sont apposées. Écumez Instagram ou Facebook : avec les mots-clics #murale et #mural suivis du nom de la ville, par exemple. Sinon, des organismes disposent de listes d’artistes locaux, comme MU ou le festival Canettes de ruelle.
> Consultez le site de MU Montréal
Discuter du thème
En 2016, la famille de Benoit Tessier et d’Ariane Pichette, qui habite à Rosemont, a fait exécuter une murale sur les deux murs de son garage privé, profitant du festival Canettes de ruelle. L’artiste Antoine Tava avait présenté un premier aperçu au couple, qui n’était pas convaincu. « On voulait quelque chose de plus joyeux pour les enfants, qui rappelait le jeu », soulignent Benoit et Ariane, qui ont finalement opté pour deux sympathiques personnages tenant un bâton de baseball.
« Il faudrait que le thème et le style soient intéressants, aussi bien pour le client que pour l’artiste », indique Julian Palma, qui réalise maintenant des maquettes avant de lancer un chantier. Alessandra McGovern rappelle qu’avoir une idée facilite et accélère le travail de conception.
(P)réparer le terrain
Attention, les murales n’aiment pas les surfaces endommagées et décrépites, qui amenuisent leur durée de vie. Un client peut toujours nettoyer, voire réparer la surface, pour aider le processus. Généralement, les artistes la désinfectent avec un vaporisateur TSP avant la couche d’apprêt.
Alessandra et Julian, qui travaillent tous deux avec de la peinture au latex, précisent que plus les surfaces sont lisses, mieux c’est. « Avec un mur de briques texturé, on pourra moins faire de détails par rapport à une surface de béton lisse », nous apprennent-ils. Astuce : on peut demander d’acheter de la peinture en surplus et de laisser le soin au client, si les couleurs et les motifs ne sont pas trop abondants, de faire des retouches en cas de tags ou de détérioration.
Attendre que la magie opère
Combien de jours sont nécessaires pour le travail ? Cela dépend de la surface du projet, de sa complexité, de la rapidité de l’artiste et… de la météo. Peindre sous la pluie n’est pas idéal pour la pérennité de l’œuvre. La qualité du matériel, influant sur le nombre de couches, est aussi à prendre en compte. À titre indicatif, pour un petit projet de 6 pi sur 10 pi, peu complexe, on compte une petite semaine. Et la durée de vie de la murale ? Avec une peinture au latex, elle s’élève à une dizaine d’années ; mais à l’aérosol, cela sera moins durable.
Rémunérer l’artiste
Question aussi cruciale que délicate. Car là aussi, une constellation de paramètres entrent en jeu : la surface du projet, sa nature, le matériel requis, la renommée de l’artiste, l’état du support, etc.
Le tarif final est donc extrêmement variable et doit être discuté avec le muraliste en fonction du projet. « Ça peut prendre une journée et coûter 500 $, comme ça peut prendre d’une à deux semaines et revenir à 2500 $ », prévient Julian Palma, qui n’inclut pas le coût du matériel dans ces sommes. Pour nous donner un ordre d’idée, Alessandra McGovern a estimé, selon ses tarifs personnels, le coût de la réalisation d’une murale peu complexe de 6 pi sur 10 pi, qui oscillerait autour de 1600 $. « Souvent, les personnes pensent juste au produit final, mais ne voient pas le travail qu’il y a derrière, notamment celui de conception », souligne-t-elle.