Une maison jumelée située à Varennes, sur le marché pendant sept mois, n’obtient aucune promesse d’achat. Une anomalie, selon le courtier immobilier chargé de la vendre, qui recommande à son client de faire appel aux services d’une professionnelle de la valorisation résidentielle (home staging). Le jeu en vaudra-t-il la chandelle ?
Le contexte
Mise en vente en mars dernier, la maison de Bruno Audet n’avait toujours pas trouvé preneur en octobre. Et le prix n’est pas en cause, selon le courtier immobilier qui le représente, François Leduc. Selon lui, une maison jumelée à Varennes, en bon état, se vend aux environs de 260 000 $. Ici, le prix affiché est de 245 000 $.
Dans cette gamme de prix, habituellement en dedans d’une semaine, c’est vendu. Ici, il y a des petits points faibles.
François Leduc, courtier immobilier
Quelques améliorations ont été apportées à la propriété en juin, mais lors des visites, il y a encore des éléments qui accrochent. « Le fait qu’elle est jumelée des deux côtés, ça fait un petit terrain, observe le courtier. Avec le gros cabanon, il ne reste pas beaucoup d’espace. C’est un point négatif en commençant, mais comme il n’y a pas de coup de cœur en dedans, ça n’aide pas. »
Pour créer ce coup de cœur, François Leduc a recommandé à son client d’investir dans la valorisation résidentielle. Il n’a pas été difficile à convaincre, ce qui n’est pas toujours le cas.
La première visite
Catherine Routhier, propriétaire de la Boutik Urbaine, une entreprise spécialisée en valorisation résidentielle qui réalise entre 250 et 300 projets par année dans la région de Montréal, est d’accord avec François Leduc : « Une maison comme celle-là, ça sort vite habituellement. »
Début octobre, elle visite la propriété pour poser son diagnostic et établir ses recommandations, qu’elle enverra au propriétaire sous forme de devis. Une liste d’épicerie très détaillée que le client peut appliquer à la lettre ou pas. Son constat est clair : le principal obstacle à la vente est la cuisine avec ses armoires foncées, son comptoir en enduit de béton et son espace assez restreint.
Des conseils généraux
La déco n’est pas le premier élément que Catherine Routhier évalue lorsqu’elle entame un projet. « Quelqu’un qui parle de la déco en premier quand il vient faire une consultation de staging, ce n’est pas un vrai stager. » Elle dit articuler son approche autour de trois points : l’espace mur et plancher, la luminosité et l’ambiance.
Les deux plus gros retours sur investissement, c’est la peinture et les luminaires. Quand on change ça, on vient de donner un autre ton complètement, et ce n’est pas des coûts énormes.
Catherine Routhier, spécialiste en valorisation résidentielle
Dans le cas de cette propriété, les modifications recommandées totalisent près de 4000 $, taxes incluses. Cela inclut l’achat de luminaires et de la majeure partie des matériaux, la location mensuelle de meubles et d’accessoires, la mise en place à proprement dit, mais pas la main-d’œuvre nécessaire à la réalisation des travaux.
Les travaux
Le propriétaire a réalisé lui-même la majorité des petits travaux suggérés par Catherine Routhier. Ceux-ci se sont échelonnés sur un peu plus de deux semaines.
La transformation pièce par pièce
L’extérieur
Peu d’interventions ont été faites à l’extérieur. « Le treillis en avant, il faut le rendre sexy », observe Catherine Routhier. Elle choisit d’installer un faux mur végétal qui crée aussi une certaine intimité.
L’entrée
Dans l’entrée, comme ailleurs dans la maison, les luminaires ont été remplacés. La patère a été enlevée et un banc a été placé sous le miroir. Un coussin cache une prise de courant étrangement posée au milieu du mur.
Le salon
« On a de belles grandes fenêtres ici, mais c’est tellement sombre, constate Catherine Routhier. Les rideaux ne sont pas assez hauts. Quand on met des rideaux plus hauts, plus larges, on vient agrandir visuellement. » Elle ne conservera que le voilage pour augmenter la luminosité. Le divan, trop imposant pour la pièce, a été conservé, mais déplacé.
La cuisine et la salle à manger
« Les armoires sont trop foncées, remarque Mme Routhier. Un petit sablage, une peinture à plancher, et on peinture ça plus pâle. On a quand même un beau dosseret, de belles poignées. Mais on change le comptoir. C’est un must. » Elle suggère un revêtement en stratifié plutôt que du granit, qui ne permettrait pas d’obtenir un retour sur son investissement.
La salle d’eau et la salle de bains
Bien que les attentes des acheteurs soient moins élevées pour une salle d’eau, il faut que la pièce soit cohérente avec le reste, souligne Catherine Routhier. La finition la dérange. « C’est peu patché tout croche. Des travaux faits comme ça, c’est un obstacle à la vente. Les acheteurs se disent : “S’il a fait ça, qu’est-ce qu’il a fait d’autre dans la maison ?” »
Les chambres
La chambre principale est la plus importante. La professionnelle suggère de remplacer le ventilateur au plafond par un luminaire, changer l’habillage du lit pour le rendre plus luxueux, ajouter des lampes de chevet et déplacer la commode. Quant aux chambres d’enfant, Catherine Routhier recommande d’en repeindre une qui est vert et rouge.
La cage d’escalier et le sous-sol
« Le sous-sol est un extra. Le plancher est fait, il y a un foyer. Je n’investirais pas ici », affirme Catherine Routhier. Dans la cage d’escalier, une craque et un léger renflement dans le mur la dérangent. Elle suggère la pose d’une moulure. « Je n’appelle pas ça cacher un défaut, répond-elle. J’appelle ça améliorer un mur. Ce n’est pas un vice caché. S’il y avait une grosse craque sur le plancher de la cuisine, je n’irais pas mettre un tapis par-dessus. »
Le résultat
Pendant les travaux, la propriété a été retirée du marché. Une fois la maison « valorisée », l’inscription a été relancée au début de novembre, avec de nouvelles photos et un prix ajusté : 249 000 $ au lieu de 244 000 $. Neuf jours plus tard, une offre d’achat a été acceptée. Le montant ne peut être divulgué, car la vente n’a pas été conclue.