De libraire à jardinier, il y a un grand pas, que Sylvain Parrot a voulu franchir pour passer d'un espace de travail cloisonné à celui de l'un des plus célèbres jardins d'Europe: celui du château de Versailles. La santé de quelque 17 000 arbres est désormais sous sa responsabilité. Entrevue et conseils de pro pour vos arbres.

Les jardins de Versailles ont-ils évolué depuis leur création?

Oui et non. Les architectes du patrimoine, en France, ont déterminé qu'ils devaient être préservés pour en respecter l'aménagement à ce jour précis de 1789 où l'on a dit à Marie-Antoinette que la foule était aux portes du jardin pour réclamer à manger. «On emploie toujours les mêmes techniques, car on est attachés à conserver le même esprit qu'à une certaine époque. On veut faire faire, par tous les moyens, un voyage dans le temps aux visiteurs», explique Sylvain Parrot. Certaines variétés ont toutefois dû être remplacées.

Quels arbres retrouve-t-on dans les jardins?

Il y a plus de 200 essences d'arbres différentes dans les jardins de Versailles. Les frênes y ont longtemps été les grandes vedettes, avant d'être presque entièrement décimés par le scolyte dans les années 70. Depuis, «on y retrouve essentiellement du tilleul, parce qu'il supporte très bien la taille et n'est pas très cher», explique Sylvain Parrot. Versailles compte aussi deux arbres tricentenaires qui devraient recevoir sous peu la classification «arbres remarquables de France».

Quel est le conseil le plus important à suivre pour avoir des arbres en santé chez soi?

«Les gens font toujours l'erreur de planter les arbres trop près les uns des autres ou d'une maison, sans penser à la taille qu'ils auront à long terme. Il faut laisser au minimum huit mètres entre deux arbres ou un arbre et un édifice.»

Faut-il absolument tailler les arbres?

«Oui, tranche Sylvain Parrot, catégorique. Si on ne taille pas un arbre, on risque que des branches se touchent, provoquant des plaies dans l'écorce qu'on ne voit pas et qui permettent à des maladies ou des insectes de s'infiltrer dans l'arbre. Les gens ont aussi trop souvent des scrupules à abattre des arbres qu'il faut abattre.» 

Quelle est la meilleure période pour tailler un arbre?

La taille doit être faite au début de l'automne, quand la sève est descendante. Si on coupe en hiver, il n'y a pas de sève pour cicatriser la plaie; si on coupe au printemps, il y aura un surplus de sève qui sortira de la plaie et qui attirera les insectes.

photo Thinkstock

«Si on ne taille pas un arbre, on risque que des branches se touchent, provoquant des plaies dans l'écorce qu'on ne voit pas et qui permettent à des maladies ou des insectes de s'infiltrer dans l'arbre», explique Sylvain Parrot.

Quelles sont les principales menaces visant les arbres des jardins de Versailles?

Il faut composer, maintenant, avec les effets du réchauffement climatique, note Sylvain Parrot. Depuis quelques années, on remarque des étés plus chauds et un déficit hydrique annuel; les hêtres souffrent particulièrement de la chaleur. Quelques maladies endémiques inquiètent aussi Sylvain Parrot, comme la chalarose du frêne, venue d'Europe de l'Est, ou la mineuse qui fragilise les marronniers. 

Combien d'arbres sont plantés chaque année?

Une centaine. «On pourrait difficilement faire plus, car un arbre représente beaucoup de gestion les trois ou quatre premières années. Il faut l'arroser toutes les deux semaines environ, à raison de 100 litres chaque fois», dit Sylvain Parrot. Une pépinière de conservation doit être créée prochainement où seront conservés et multipliés une cinquantaine d'arbres remarquables, destinés à être offerts lors de visites officielles à l'Élysée. 

Quel est le meilleur moment pour visiter Versailles?

«Il faut y aller toutes les saisons! lance Sylvain Parrot. Mais avril est idéal, quand il n'y a pas trop de monde.» Le pic de fréquentation est observé en juillet et en août.

photo CHRISTOPHE SIMON, archives agence france-presse

On peut visiter les jardins de Versailles en toutes saisons, même l'hiver. Mais le printemps est idéal, selon Sylvain Parrot, car «il n'y a pas trop de monde».