Naissance, mortalité, mariage, séparation, rencontre amoureuse, déménagement, retraite, premier appartement, autant de moments soulignés par les plantes qui vous accompagnent depuis longtemps. À la suite d’un appel à tous, vous avez été plus de 200 à témoigner de cet attachement végétal, plusieurs avec des photos de leur trésor vert.

Des plantes qui marquent le temps

PHOTO FOURNIE PAR CLAUDETTE POULIOT

Ce cactus de Noël a 72 ans !

Si les records de longévité nous fascinent, les plantes tenaces sont avant tout des références à un passé plus ou moins récent, un souvenir entretenu par leur seule présence. Elles ont manifestement la couenne dure si on se fie à celles qui sont passées à travers les froidures de la crise du verglas de 1998, à travers un manque d’eau prolongé ou tout simplement à travers une longue indifférence. Vos courriels font état de plus de 40 espèces et variétés de plantes d’intérieur, de la schefflera à la violette africaine en passant par les crotons, les ficus, les fougères, les cyclamens, les euphorbes (dont plusieurs sont confondus avec des cactus, d’ailleurs), sans oublier les cactus de Noël à la floraison annuelle fidèle.

De 50 à 100 ans

La palme de la longévité revient à ces fameuses langues de belles-mères, pas tuables, disent plusieurs, ces Sanseveria trifasciata souvent installés dans le coin d’une pièce, presque dans l’ombre, toujours discrets, rarement en fleurs même si celui d’Isabelle Émond, un spécimen de 50 ans, se donne en spectacle deux fois par année. À 80 ans, le sanseveria de Ghislaine Bélanger fleurit aussi régulièrement. « Cette plante était dans la maison lorsque ma mère a commencé à sortir avec mon père en 1944, raconte-t-elle. Je la conserve depuis que ma mère de 97 ans est en CHSLD. »

Quant à Denise Bruneau, elle a hérité d’une langue de belle-mère (Sanseveria hyacinthoides) de… sa belle-mère née en 1906. « Offerte à son mariage, elle possédait la plante depuis fort longtemps déjà, écrit-elle. Quand je l’ai reçue lors de son décès en 2002, ce n’était pas ma tasse de thé ! Ma fille cadette, qui lui vouait un amour fou, m’a fait l’apprécier. Aujourd’hui à 80 ans, j’en prends toujours soin. » Un sanseveria d’une centaine d’années !

Les cactus de Noël se distinguent aussi. « Il était déjà dans la maison quand je suis née il y a 67 ans », raconte Édith Fraser.

Il fleurit chaque année dans le temps des Fêtes. Il rappelle les cadeaux sous l’arbre de Noël. C’est le souvenir vivant de ma mère.

Édith Fraser

La plus vieille plante de Claudette Pouliot est aussi un cactus de Noël de 72 ans qui appartenait à sa mère. « C’est l’histoire de mes parents décédés dans un accident d’auto en 1951. Ma mère Georgine avait 23 ans et moi, 2 ans. La sœur de ma mère m’a donné la plante lors de mon mariage. On l’appelle affectueusement Georgine. »

Des surprises

PHOTO FOURNIE PAR MANON SOULIGNY

Cet oxalis a atteint le demi-siècle d’existence.

De belles surprises aussi parmi vos témoignages, comme un croton de 60 ans appartenant à France Clavet ; une fougère de plus de 70 ans de Lucie Bourdon ; un bégonia rex de 47 ans de Dominique Mondou ; un oxalis d’un demi-siècle de Manon Souligny ; et un dieffenbachia d’Hélène Laperrière, qui grandit toujours à 60 ans en dépit d’une vie parfois tourmentée. Enfin, Suzanne Claveau a un cyclamen offert à la naissance de son fils aujourd’hui âgé de 38 ans qui a traversé des rempotages maladroits, des sécheresses indues, une infestation de thrips et, récemment, une attaque de fusarium. « Une plante presque autonome », insiste-t-elle.

Du Chopin pour schefflera

PHOTO FOURNIE PAR FRANCINE LAVOIE

Ce schefflera doit avoir 65 ans et il aime Chopin !

« Ma plus vieille plante du genre schefflera doit avoir 65 ans. Ma sœur et moi l’avons offert à papa pour Noël. Nous l’avions acheté chez Steinberg et je me souviens avoir eu bien peur qu’elle ne gèle lorsque nous l’avons ramenée à la maison bien emmitouflée dans nos deux foulards. Elle adorait les soins de mon père et, manifestement, la musique de Chopin et de Bach », partage Francine Lavoie.

Elle est heureuse aujourd’hui après avoir connu des épisodes de déprime au fil du temps et nous évitons de la brusquer, comme une vieille amie.

Francine Lavoie

Minuscule mais résistant

PHOTO FOURNIE PAR FRANÇOIS NOËL

Une plante minuscule, mais attachante !

« Mon Hawortha fasciata est le doyen de toute ma collection de plantes. Il était dans un petit pot de plastique jaune et blanc de 2 pouces sur le bord de ma fenêtre il y a un peu plus de 40 ans. Il a dû affronter plusieurs infestations d’insectes et plusieurs déménagements, dont un à Toronto, en plus de résister à des périodes de sécheresse. Je reste très attaché à cette plante minuscule », s’émeut François Noël.

Hoya tourmenté

PHOTO FOURNIE PAR JOHANNE VÉZINA

Cet hoya qui compte quatre décennies a donné ses premières fleurs à l’âge de 30 ans.

« Ma mère se souvenait que cet hoya était chez elle quand elle était petite, dans les années 1930, écrit Colette Baribeau. Je l’ai récupéré en 1984. Il passe l’été sur le perron, les fourmis le colonisent, y éduquent leurs pucerons. Souvent taillé et même quasiment rasé. » Âgé de 40 ans lui aussi, le hoya de Johanne Vézina a donné ses premières fleurs à l’âge de 30 ans, des fleurs odorantes qui semblent faites en porcelaine.

Il y a des jours d’hiver où j’en suis pas mal tannée, mais je pense à maman décédée en 2000, je soupire et… on continue l’aventure.

Johanne Vézina

Des plantes précieuses

PHOTO FOURNIE PAR DANIÈLE BOUTET

Des plantes précieuses, en souvenir d’êtres chers trop tôt disparus

« Ces deux plantes, un dracaena et un spathiphyllum, ont 35 et 33 ans, écrit Danièle Boutet. Ce sont mes biens les plus précieux. J’ai reçu ces plantes à la naissance de mes enfants, tous deux décédés de la dystrophie musculaire, mon fils à l’âge de 18 mois en 1989 et ma fille à l’âge de 6 ans en 1996. »

Tous les témoignages ont été remaniés à des fins de concision et d’espace.