Les dirigeants serbe et kosovar ont poursuivi mercredi à Bruxelles un dialogue de sourds après les violences de fin juillet, le chef de l’OTAN Jens Stoltenberg les appelant à l’issue d’entretiens séparés à « la retenue » et à la « bonne foi », pour « empêcher une nouvelle escalade ».

« J’appelle toutes les parties à faire preuve de retenue et à éviter la violence », a déclaré M. Stoltenberg devant la presse, avertissant que la force de maintien de la paix de l’OTAN au Kosovo (Kfor) était « prête à intervenir si la stabilité était menacée », afin d’assurer « la liberté de mouvement pour tous les habitants » de l’ex-province serbe.

Le secrétaire général de l’Alliance s’est entretenu avec le président serbe Aleksandar Vucic puis avec le premier ministre kosovar Albin Kurti, à deux semaines de l’entrée en vigueur de nouvelles règles administratives et frontalières imposées par Pristina. Ces dernières ont entraîné un nouvel épisode de fortes tensions fin juillet dans le nord du Kosovo où la minorité serbe les juge vexatoires.

Alors qu’une nouvelle tentative de concertation aura lieu jeudi à Bruxelles dans le cadre du dialogue Belgrade-Pristina facilité par l’UE depuis 2011, Jens Stoltenberg les a appelés « à faire preuve de souplesse et à être constructifs ».

M. Vucic a dit à la presse s’attendre à des « discussions difficiles ». « Nous ne sommes d’accord sur pratiquement aucun point », a-t-il prévenu.

« Cela ne dépend pas de moi […] Il y a une nouvelle génération de jeunes [Serbes] au Kosovo qui ne toléreront pas cette situation, qui ne voudront pas endurer la terreur, qui ne voient pas le Kosovo comme un État indépendant, mais comme un territoire de Serbie, en accord avec le droit international », a-t-il argumenté.

Belgrade n’a jamais reconnu l’indépendance proclamée par le Kosovo en 2008, une décennie après une guerre sanglante qui a fait 13 000 morts, en majorité des Kosovars albanais. Depuis, la région est le théâtre de frictions épisodiques. Les quelque 120 000 Serbes du Kosovo, dont un tiers vivent dans le nord du territoire, ne reconnaissent pas l’autorité de Pristina et restent fidèles à Belgrade.

« La police et l’armée serbes n’ont à aucun moment franchi » la frontière avec le Kosovo lors des incidents de juillet, a assuré Aleksandar Vucic, accusant Pristina d’« avoir menti sur ce point comme sur tout le reste depuis 180 jours, en invoquant une attaque […] qui n’a et n’aura jamais lieu ».

Pristina s’était dit convaincu que la Serbie profiterait du contexte de l’invasion russe de l’Ukraine pour lancer une offensive contre le Kosovo – ce que Belgrade, qui entretient de bonnes relations avec Moscou, a démenti farouchement, se déclarant « un pays militairement neutre ne s’alignant sur aucun bloc ».

« Les Kosovars ont toutes les raisons de se montrer vigilants face à l’attitude destructrice de notre voisin », a répliqué Albin Kurti lors d’une conférence de presse distincte.

« D’un côté, vous avez l’État démocratique du Kosovo, avec sa police professionnelle. De l’autre, des structures serbes illégales transformées en gangs criminels, qui érigent des barricades » dans le nord du pays, a lancé le premier ministre kosovar.

Invoquant un principe de « réciprocité », Pristina prévoit d’imposer des permis de séjour temporaires aux personnes entrant au Kosovo avec une carte d’identité serbe, et d’exiger que les Serbes présents dans le pays remplacent les plaques d’immatriculation serbes de leurs véhicules par des plaques de la République du Kosovo.

Sous pression américaine, le Kosovo avait accepté de reporter la mise en œuvre de ces mesures au 1er septembre.

Serbie et Kosovo aspirent à adhérer à l’UE : Belgrade, qui a depuis 2012 le statut de candidat officiel, a entamé des négociations, tandis que le Kosovo est un « candidat potentiel ».