(Paris) Nicolas Sarkozy est enfin sorti de son silence mardi, pour apporter sans surprise son soutien à Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle, en appelant à un rassemblement autour du président candidat qui pourrait accélérer la recomposition de la droite.

« Je voterai pour Emmanuel Macron », affirme sur Facebook l’ancien chef de l’État (2007-2012), qui n’avait pas soutenu au premier tour la candidate LR Valérie Pécresse, au grand dam du parti qu’il avait créé.

Emmanuel Macron l’a peu après remercié « de sa confiance et de son soutien » en soulignant qu’« il faut rassembler très largement ».

Pour justifier sa décision, Nicolas Sarkozy est allé plus loin que l’appel au barrage à l’extrême droite en invoquant des raisons de fond, telles que « la fidélité aux valeurs de la droite républicaine » et « la valorisation du travail » par le président sortant, ainsi que son engagement européen « clair et sans ambiguïté ».

Cette fidélité aux valeurs de droite et « à notre culture de gouvernement » doit selon lui « nous conduire à répondre à l’appel au rassemblement d’Emmanuel Macron en vue de l’élection présidentielle ».

Une allusion claire au « dépassement politique » évoqué début avril par Emmanuel Macron.

« J’étais étonnée qu’il ne le fasse qu’au second tour.  Je croyais qu’il le ferait dès le premier », a commenté lors d’une conférence de presse Marine Le Pen, en affectant l’ironie : « Je me demande si je ne vais finir par faire des affiches, parce que rien que Nicolas Sarkozy et le Luxembourg (qui) appellent à battre Marine Le Pen, ça peut débloquer des voix pour moi ».

Plusieurs médias avaient évoqué ces dernières semaines la volonté de Nicolas Sarkozy de négocier une coalition avec Emmanuel Macron, passant par un certain nombre de députés, voire un poste de premier ministre, même si le score calamiteux (4,78 %) de LR au premier tour de la présidentielle affaiblit considérablement le pouvoir de négociation de la droite.

Quoiqu’attendue, cette prise de position en forme de désaveu est un pavé dans la mare des Républicains, qui ont martelé lundi n’être « fongibles ni dans le macronisme, ni dans le lepénisme ».

« Nous ne reconstruirons pas la droite en nous diluant dans le macronisme », a affirmé sur Twitter le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau.

« Ça va tanguer »

« L’opposition ne peut être réduite à une confrontation entre la majorité présidentielle et les partis extrêmes », a réagi le président du Sénat Gérard Larcher.

Le fossé entre Nicolas Sarkozy et LR n’a cessé de se creuser pendant la campagne présidentielle où il n’a jamais apporté son soutien à Valérie Pécresse.

Selon des propos rapportés dans la presse, l’ancien chef de l’État, qui cultive une proximité avec Emmanuel Macron, s’est montré très dur envers la candidate : « inexistante », « Valérie n’a rien compris », « elle serait bien inspirée de me citer » …

Les LR avaient fini par abandonner tout espoir de soutien. « Je trace ma route », répétait avec fatalisme Valérie Pécresse. Et la rupture a été publiquement consommée à sa dernière réunion parisienne, lorsque le nom de Nicolas Sarkozy a été sifflé par une partie du public.

Mardi la proposition de coalition crispait surtout l’aile droite de LR. « Fondre la droite dans le néant idéologique macronien est une vision de court terme », a averti le maire de Chalon-sur-Saone Gilles Platret.

Nicolas Sarkozy « sort du silence pour nous expliquer qu’il veut une grande recomposition avec En Marche, la réponse est non », pour le député souverainiste Julien Aubert.

Mais la tentation pourrait être grande chez les députés LR inquiets de leur réélection aux législatives de juin, ou dans l’aile modérée du parti, dont une partie a déjà rejoint Macron ou le parti Horizons d’Édouard Philippe.

« L’hypothèse devra être sur la table, ça va tanguer », prédit un député.

Dès mardi, le député de l’Yonne Guillaume Larrivé a estimé que Nicolas Sarkozy avait « raison de s’engager avec force et clarté » pour Emmanuel Macron, car « c’est le seul choix conforme à l’intérêt national ».  

D’autres préfèrent voir dans ce dynamitage une sorte d’« année zéro » de la droite.

« Il faut tourner la page de la génération Sarkozy », affirme le député Pierre-Henri Dumont.

Pour le numéro 3 du parti Aurélien Pradié, « le parti unique voulu par Macron est un danger majeur ». « Au fond, c’est peut-être une chance », a-t-il estimé sur Twitter.