Un politicien, un entrepreneur, un inspecteur automobile. Depuis jeudi, des civils ukrainiens s’improvisent soldats pour tenter de repousser l’envahisseur russe. Témoignages.

« Vivant. Je suis vivant », souffle Sviatoslav Yurash au bout du fil. Comme s’il n’y croyait pas lui-même.

Depuis jeudi, le jeune député parlementaire s’improvise soldat. Entre les attaques, il sillonne les rues de Kiev à bord d’un véhicule chargé d’armes et de matériel médical destinés aux forces ukrainiennes. À chaque sortie, il court le risque de se retrouver au milieu d’un affrontement.

Je ne suis pas un soldat, mais soit on se bat, soit on perd. Et si nous perdons, nous perdons tout. Dans notre situation, tout le monde est un soldat.

Sviatoslav Yurash, député ukrainien

Les rues de la capitale sont désertes, mais les postes de police sont bondés de civils répondant à l’appel du président Volodymyr Zelensky de prendre les armes, rapporte M. Yurash. Et plus d’Ukrainiens se joindront à la résistance, plus le pays pourra espérer tenir face à l’envahisseur russe, croit-il.

« Nous devons nous battre avec tout ce que nous avons, aussi longtemps que nous le pouvons, si l’on veut continuer d’exister. »

Attendre son tour

Maksym Lutoshkin y avait déjà longuement réfléchi. En 2014, après l’annexion de la Crimée, il s’était décidé à prendre les armes si la menace russe se présentait de nouveau.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE MAKSYM LUTOSHKIN

Maksym Lutoshkin

Le 24 février, elle était là, aux portes de Kiev. « Les explosions m’ont réveillé. Une heure plus tard, la guerre était confirmée », raconte l’entrepreneur de 47 ans. Le matin même, il s’était porté volontaire pour participer à l’effort de guerre comme il se l’était promis, huit ans plus tôt.

Depuis, il se tient prêt dans une petite ville à 50 kilomètres de la capitale ukrainienne, à feu et à sang. Il attend qu’on l’appelle au front. Une question d’heures ? De jours ? Lutoshkin ne peut pas dire. Mais il garde le moral.

« Je suis certain que nous allons gagner. Nous n’avons pas d’autre choix », tonne-t-il.

« J’aime mon pays, alors je le défends »

À 6 h, jeudi matin, Vitaliy était mis au courant d’explosions dans la région de Kherson, où il habite. À 9 h, il rejoignait l’armée.

Il a donné son nom en connaissance de cause, ayant lui-même participé comme volontaire dans la révolution ukrainienne de 2014, puis dans le cadre du conflit russo-ukrainien jusqu’en 2017. Mais cette fois est différente.

« J’étais scandalisé par l’ignoble attaque russe », décrie l’inspecteur automobile. « J’ai décidé d’aider parce que je suis familier avec l’armée. J’aime mon pays, alors je le défends. »

Au cinquième jour de la guerre, son humeur est combative. « Un peu anxieux, mais je crois en la victoire de l’Ukraine et du peuple ukrainien. » Ce qui le garde motivé ? Sa femme et sa fille, qui l’attendent à la maison. « Elles me manquent. »