(Paris) Le nouveau chancelier allemand Olaf Scholz et le président français Emmanuel Macron ont affiché vendredi leurs « convergences » de vues sur l’Europe et leur volonté de « travailler ensemble » face aux grands défis internationaux.

Suivant une longue tradition de l’après-guerre, le social-démocrate allemand, qui a succédé mercredi à Angela Merkel, s’est rendu à Paris aussitôt les premiers dossiers de politique intérieure pris en main à Berlin.

Le chancelier allemand et le président français, qui se connaissaient déjà, ont examiné un ordre du jour chargé avec la volonté réaffirmée de mettre le couple franco-allemand au « service » de l’Europe.

« Ces premiers échanges traduisent très clairement une convergence de vues solide », s’est félicité Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse commune.

« Je suis sûr que les relations franco-allemandes continueront de s’épanouir », a renchéri Olaf Scholz sans effusion, en soulignant les perspectives de coopération avec les prochaines présidences française de l’UE et allemande du G7 en 2022.

L’Europe était clairement le sujet numéro un au menu, à 21 jours de la présidence française de l’UE, dont Emmanuel Macron avait présenté la veille les grandes priorités.  

« Sur les questions sociales, la transition climatique et numérique, la réponse commune aux défis migratoires, les sujets d’investissement ou d’ouverture institutionnelle, nous avons véritablement manifesté une volonté de travailler ensemble », a souligné le président français, promettant d’œuvrer pour une « Europe plus puissante ».

Des finances « solides »

Signe de la place centrale de l’Europe pour la nouvelle équipe au pouvoir à Berlin, le chancelier s’est rendu dans la foulée à Bruxelles pour y rencontrer les dirigeants des institutions de l’UE et de l’OTAN avant le sommet européen des 16 et 17 décembre. Il se rendra aussi dimanche en Pologne, en conflit ouvert avec l’UE sur l’État de droit et la primauté du droit européen.

« Nous avons besoin d’une Europe forte, qui réalise le maximum de son potentiel. Il faut trouver un moyen de renforcer la souveraineté européenne […] L’Allemagne, grand pays au cœur de l’Europe, porte une responsabilité et ne saurait rester en marge », a martelé M. Scholz, après une rencontre avec le président du Conseil européen Charles Michel.

La feuille de route des quatre années à venir, signée par Olaf Scholz et ses alliés de coalition écologistes et libéraux, témoigne d’ambitions nouvelles, côté allemand, en matière de politique européenne, après la tiédeur des années Merkel sur le sujet.

Elle va même plus loin que celle d’Emmanuel Macron en évoquant une évolution vers un « État fédéral européen », un sujet tabou dans bien des pays de l’UE, y compris la France. Mais Paris veut aussi y voir l’occasion d’un nouvel élan pour l’Europe.

Les discussions s’annoncent compliquées toutefois sur le nucléaire, que Paris souhaite intégrer dans une liste européenne des énergies « vertes » donnant accès à des financements spécifiques, au grand dam des Verts allemands et de leur candidate malheureuse à la chancellerie, désormais cheffe de la diplomatie.

Sur ce point, le chancelier Scholz a botté en touche, relevant seulement que son pays avait misé sur le « développement des énergies renouvelables ».  

Concernant le financement de la relance européenne, autre sujet possible de contentieux avec Paris, il a souligné que croissance et « solidité des finances » n’étaient pas « contradictoires ».  

M. Macron souhaite « repenser » les règles encadrant les déficits publics et l’endettement de chaque État membre de la zone euro afin de financer la création de nouveaux champions industriels en Europe. Ce sujet risque de hérisser le ministre allemand des Finances, le libéral Christian Lindner, attaché à l’orthodoxie financière tout comme les précédents gouvernements à Berlin.

Médiation sur l’Ukraine

Les deux dirigeants ont aussi affiché leur volonté de poursuivre la médiation franco-allemande dans la crise ukrainienne, à laquelle le président russe Vladimir Poutine semble désormais préférer un dialogue direct avec son homologue américain Joe Biden.

Cette médiation constitue une « base positive », a insisté Olaf Scholz, alors que Moscou a massé des dizaines de milliers d’hommes à sa frontière avec l’Ukraine. « Notre volonté commune est de poursuivre ce dialogue » avec Moscou et Kiev, a ajouté Emmanuel Macron.

Les dirigeants français et allemand vont examiner les « initiatives à prendre pour apaiser les tensions et ouvrir la perspective d’une solution durable au conflit dans le Donbass », a précisé peu après la présidence française dans un communiqué.

Olaf Scholz avait menacé mercredi de possibles « conséquences » pour le gazoduc controversé Nord Stream II reliant la Russie à l’Allemagne — un projet soutenu envers et contre tout par Angela Merkel — en cas d’invasion de l’Ukraine par les troupes russes.