(Londres) Malgré une campagne de vaccination menée tambour battant, le Royaume-Uni se trouve confronté à un nombre de contaminations à la COVID-19 parmi les plus élevés en Europe et croissant, mettant en question la politique sanitaire très libérale du gouvernement de Boris Johnson.  

Depuis deux semaines, les nouvelles contaminations oscillent entre 35 000 et 45 000 cas journaliers, avec un taux d’incidence de 410 cas pour 100 000 habitants au 12 octobre, bien plus élevé que dans le reste de l’Europe et près de 10 fois plus qu’en France (44). Seuls la Roumanie, la Serbie et les pays baltes connaissent une situation pire.

Ces taux d’infection approchent ceux de la violente vague de l’hiver dernier, même si les décès et hospitalisations restent bien moindres. Ils ne semblent pas inquiéter outre mesure Boris Johnson, dont le gouvernement a levé en juillet l’essentiel des restrictions restantes, quand de nombreux pays européens introduisaient des passes sanitaires, et se projette désormais dans l’après-pandémie.

Ce nombre élevé est expliqué notamment par les scientifiques par le grand nombre de tests réalisés au Royaume-Uni (près de 900 000 par jour) et le fait que les jeunes Britanniques, dont les plus de 12 ans ne sont autorisés à se faire vacciner que depuis septembre, sont testés plusieurs fois par semaine à l’école.  

« Le taux d’infection chez les écoliers du secondaire est clairement le moteur de cette marée soutenue de nouvelles infections », affirme le professeur Simon Clarke, de l’Université de Reading. « Un tiers des personnes positives en Angleterre appartiennent à ce groupe d’âge », ajoute Kevin McConway, de l’Open University, une proportion qui monte à « la moitié » si « on inclut les enfants de plus de 2 ans ».  

Peu de masques

Le Royaume-Uni, un des pays les plus endeuillés d’Europe par la pandémie avec plus de 138 000 morts, a en outre adopté une stratégie sanitaire très libérale, multipliant les larges évènements en intérieur sans passeport vaccinal et mettant fin en juillet au port obligatoire du masque en Angleterre.  

Mi-octobre, 15 % des Britanniques ne portaient jamais de masque, contre environ 5 % chez leurs voisins européens, selon l’institut YouGov. Même dans les transports publics de Londres, où il reste obligatoire, le port du masque est peu respecté.

Face à ce lâcher-prise, de nombreux scientifiques appellent désormais le gouvernement a revoir sa copie, notamment à l’approche de l’hiver, période tendue pour les hôpitaux. « Certaines mesures de protection immédiates (port du masque, ventilation) seraient souhaitables », affirme Jim Naismith, professeur en biologie à l’Université d’Oxford.  

Certains scientifiques réclament au gouvernement d’activer son « plan B », qui prévoit en cas d’aggravation hivernale le retour de certaines mesures comme le port du masque en intérieur ou l’encouragement au télétravail.

« Nous suivons évidemment de très près les dernières statistiques et nous avons toujours su que les mois à venir pourraient être difficiles », a indiqué lundi un porte-parole du gouvernement.

Il s’est dit convaincu cependant que l’approche actuelle « reste la bonne » : « Le programme de vaccination continuera d’être notre première ligne de défense ».

Nécessité d’un rappel

Le programme de vaccination britannique a démarré bien plus vite que dans le reste de l’Europe, avec désormais près de 45 millions de personnes totalement vaccinées (79 % des plus de 12 ans).  

Cette vaste campagne a permis de diminuer fortement le lien entre infection et formes graves de la maladie, avec actuellement 7086 personnes hospitalisées (près de 40 000 en janvier) et 972 morts dues à la COVID-19 sur les sept derniers jours.  

Mais cette avance, pour certains experts, pénalise désormais le pays. Les premières personnes vaccinées, les plus fragiles, subissent désormais une baisse d’immunité face au virus, un fait encore aggravé par l’utilisation massive du vaccin d’Oxford-AstraZeneca, à l’efficacité moins élevée que celle de ses concurrents.  

Le gouvernement britannique a lancé mi-septembre sa campagne de rappel, ouverte aux plus de 50 ans et aux soignants, mais seul 41 % de ceux vaccinés il y a plus de six mois ont pour le moment reçu leur nouvelle injection, contre 45 % en France.

Le service public de santé « fait tout son possible pour contacter les personnes éligibles », a affirmé un porte-parole de Downing street, « et va continuer à intensifier ses campagnes »