(Vienne) Vienne est reconnue comme l’une des villes les plus vertes du monde. Notamment en raison de la profusion d’espaces verts, de son réseau de transports en commun très utilisé, efficace et étendu, ainsi que de son système de chauffage résidentiel alimenté par… les déchets.

50 % d’espaces verts

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Vue du parc Prater, à partir de la grande roue de Vienne

Le Prater, c’est le plus grand parc de Vienne, là où les Viennois viennent se ressourcer le week-end, faire du vélo, courir, faire un tour dans la nature en empruntant l’un des petits trains. Il fait 6 km– comparativement à 2,6 km2 pour le parc Jean-Drapeau, à Montréal.

Au XVIIIsiècle, c’était le terrain de chasse de la noblesse, près du Danube. Mais l’empereur Joseph II, de la dynastie des Habsbourg, a décidé de remettre le lieu à la population en 1766, et le Prater est demeuré un espace vert depuis, sans jamais être grugé par des lotissements commerciaux ou immobiliers.

C’est notamment le Prater qui permet à la Ville de Vienne de se targuer de compter 50 % d’espaces verts sur son territoire. La capitale de l’Autriche est aussi entourée de collines boisées, de vignobles et de terres agricoles. On y trouve également une portion d’un parc national.

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Julie-Anne Roberge

« Une des raisons pour lesquelles je me sens bien ici, c’est que nous sommes entourés par la forêt viennoise. Pas besoin d’aller loin pour jouir de la nature, chaque fin de semaine, on peut faire des randonnées en famille », souligne Julie-Anne Roberge, une Québécoise mariée à un Autrichien, qui vit à Vienne depuis huit ans avec son mari et ses trois enfants.

Même au centre, on y trouve beaucoup d’arbres et de parcs.

« Chaque arbre est numéroté. Si vous voulez couper un arbre, la demande est soumise à un comité chargé de déterminer combien d’arbres doivent être replantés pour le remplacer. Il exige parfois quatre ou cinq nouveaux arbres », explique Alfred Strigl, un consultant en développement durable qui enseigne à l’Université des ressources naturelles et des sciences de la vie de Vienne.

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Alfred Strigl, consultant en développement durable et professeur à l’Université des ressources naturelles et des sciences de la vie de Vienne

Dans le sud de la ville, un nouveau quartier appelé « cité du biotope » a été construit sur le site d’une ancienne usine de Coca-Cola. Tamara Schwarzmayr, de l’organisme Caritas, qui s’occupe de la gestion du quartier, nous montre les jardins communautaires, les murs végétaux et les toits verts. « Ils permettent de minimiser l’effet des îlots de chaleur dans la ville, et aident à rafraîchir tout le quartier en été », note-t-elle.

Mais certains notent que les toits verts, même s’ils sont souhaitables, ne sont pas des espaces accessibles à la population.

« La distribution n’est pas équitable dans la ville », déplore Lilli Licka, architecte paysagiste, professeure à l’Université des ressources naturelles et des sciences de la vie de Vienne. « La Ville s’est donné l’objectif ambitieux d’avoir 8 m2 d’espaces verts par habitant, mais dans certains secteurs, on n’atteint même pas 4 m2. Il y a encore beaucoup à faire pour obtenir une juste répartition des espaces verts. »

Transports en commun : 1 euro par jour

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Les Viennois profitent d’un réseau de transports en commun fiable, efficace et étendu.

Pour circuler en métro, en tramway ou en autobus, en empruntant un réseau fiable et étendu, les Viennois ne paient que 1 euro par jour, soit 360 euros (527 $ CAN) par année. En comparaison, les Montréalais qui s’abonnent à la carte OPUS à l’année paient 995 $ (en tenant compte du mois gratuit offert aux abonnés annuels).

Quand la Ville de Vienne a implanté cette mesure, en 2012, le nombre d’abonnements a explosé : près de la moitié des 1,9 million d’habitants possède maintenant un abonnement annuel.

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Huem Otero Garcia, conseillère municipale membre du Parti vert

C’est notre plus grande réussite. Non seulement l’utilisation des transports en commun a augmenté, mais le nombre de voitures a aussi baissé.

Huem Otero Garcia, conseillère municipale membre du Parti vert

Pendant 10 ans, les verts ont formé une coalition avec le Parti social-démocrate pour gouverner la ville de Vienne, ce qui leur a permis d’implanter certaines mesures, comme la baisse du tarif des transports en commun.

L’abonnement à 1 euro par jour a été financé par les revenus de stationnement et par une taxe imposée aux employeurs.

Deux métropoles, deux métros

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Station de métro du centre de Vienne

  • Métro de Vienne : 190 stations, 5 lignes, 84,4 km
  • Métro de Montréal : 73 stations, 4 lignes, 68 km

Les déchets qui chauffent les maisons

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L’incinérateur Spittelau brûle chaque année 250 000 tonnes de déchets domestiques pour produire de l'énergie.

On dirait une œuvre d’art moderne, avec ses couleurs vives et son énorme boule dorée, mais c’est un immense appareil de chauffage et de climatisation, alimenté par des tonnes de détritus : l’incinérateur Spittelau, décoré par le peintre et designer viennois Friedensreich Hundertwasser, installé dans un quartier du nord de Vienne, brûle chaque année 250 000 tonnes de déchets domestiques.

L’énergie ainsi générée sert à chauffer 60 000 foyers, ainsi que le plus gros hôpital de la ville, grâce à un système de « chauffage par district » : d’immenses conduites permettent de distribuer l’air chaud dans le secteur. L’été, c’est un système de « climatisation par district » qui est alimenté par l’incinération des rebuts.

Ça signifie qu’une énorme quantité de déchets ne se retrouve pas dans les terrains d’enfouissement. Mais qu’en est-il des rejets dans l’atmosphère, présents dans la fumée expulsée par la cheminée de l’incinérateur ? La Ville de Vienne affirme que son processus de filtrage capte les principales émissions polluantes. Un tableau indicateur placé près de l’incinérateur note les quantités de six gaz polluants rejetés, qui sont bien en dessous des limites maximales jugées acceptables.

« Mais brûler les déchets produit quand même du CO2, ce qui n’est pas idéal. L’avenir, c’est plutôt la réduction des déchets à la source », fait remarquer la conseillère municipale du Parti vert Huem Otero Garcia.