(Paris) Plus de 50 millions de Français ont reçu au moins une dose de vaccin contre la COVID-19, a annoncé Emmanuel Macron vendredi, 17 jours après l’échéance qu’il avait lui-même fixée. C’est le signe de l’essoufflement d’une campagne qui touche à sa fin sans avoir atteint tous ses objectifs.

Qui l’eût cru ? La France, que les sondages disaient l’an dernier partagée entre pro et anti-vaccin, s’est finalement convertie en masse.

Le président de la République s’est réservé la primeur de l’annonce dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. Sur fond d’images filmées depuis le début de la campagne de vaccination fin 2020, un compteur défile jusqu’au nombre 50. « Le vaccin sauve des vies, le virus tue, c’est simple », déclare le chef de l’État à la fin de ce court clip, conclu par la slogan « La France unie contre la COVID-19 ».

Sur près de 58 millions de personnes de plus de 12 ans admissibles, plus de 86 % ont désormais reçu au moins une injection.

PHOTO STEFANO RELLANDINI, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Malgré une minorité très bruyante, 50 millions de Français se sont fait vacciner, ce qui en laisse 8 millions encore admissibles, compte tenu des groupes d’âge pour lesquels les divers vaccins anti-COVID-19 ont été approuvés. Ci-haut, une opposante au passeport sanitaire lors d’une manifestation à Paris, le 4 septembre 2021.

Un résultat inconcevable en début d’année, quand la campagne vaccinale pataugeait entre retard à l’allumage, livraisons au compte-gouttes et coup d’arrêt sur l’AstraZeneca. Autant de frustrations qui, en créant un sentiment de pénurie, ont décuplé les attentes.

Après un hiver poussif, le printemps fut prolifique et les seuils des 10, 20 puis 30 millions de primovaccinés atteints sans encombre, aux dates prévues. L’affaire semblait réglée au début de l’été, une fois passée la troisième vague épidémique, et le gouvernement visait tranquillement les 40 millions fin août.

Mais le variant Delta a pris de court les autorités, conduisant le chef de l’État à relever la cible à 50 millions, en jouant dès lors de la contrainte. L’obligation imposée aux soignants, et surtout le passeport sanitaire pour tous les adultes, ont donné un coup de fouet à la vaccination.

L’emballement est toutefois vite retombé : après un record à 2,6 millions de premières doses fin juillet, le rythme hebdomadaire n’a cessé de chuter, à moins de 500 000 début septembre.

Dernier coup de collier

Le « rebond » espéré au ministère de la Santé ne s’est toujours pas produit, malgré les efforts déployés pour piquer jusque dans les collèges et lycées les 30 % d’ados encore non vaccinés. Sauf que « les élèves ne sont pas au rendez-vous », selon le principal syndicat des chefs d’établissements.

Les adultes ne font guère mieux. Le taux de couverture plafonne dans toutes les classes d’âge, en particulier chez les plus âgés : au-delà de 75 ans, 10 % n’ont reçu aucune dose, soit près de 700 000 personnes, quand bien même ils ont été les premiers à pouvoir se faire vacciner dès janvier.

La France a beau caracoler, avec 74 % de sa population vaccinée, au 7e rang des pays européens — devant la Belgique et juste derrière la Finlande — elle reste à la traîne dans cette catégorie où plusieurs de ses voisins affichent une couverture supérieure à 95 %.

La situation est aussi préoccupante vue par le prisme des malades chroniques : quel que soit leur âge, près de 14 % n’étaient pas vaccinés au 5 septembre selon l’Assurance maladie, soit environ 2,6 millions de personnes présentant un risque plus élevé de développer une forme grave de la COVID-19.

Les dispositiifs mobiles mis en place depuis plusieurs mois pour atteindre ces publics (vaccination à domicile ou sous des chapiteaux dans des endroits publics, appels par la Santé publique et par des médecins traitants, lettres de convocation) ont démontré leurs limites.

À l’approche de l’automne, ces trous dans la raquette laissent ouverte l’hypothèse d’une cinquième vague. Les autorités sanitaires espèrent néanmoins limiter les dégâts avec la dose de rappel  proposée à 18 millions d’adultes ayant plus de 65 ans et malades à risque.

Un dernier coup de collier avant de remballer ? Le ministère prépare déjà la fermeture des centres de vaccination, qui ont poussé comme des champignons en début d’année. En fonction de la capacité des pharmaciens et médecins libéraux à prendre le relais, cette étape interviendra entre octobre et février.

L’exécutif, qui évoque déjà un assouplissement du passeport sanitaire, pourrait ainsi acter la sortie de la vaccination de masse, quelques mois avant l’élection présidentielle.