(Paris) L’organisation en urgence des exfiltrations de milliers d’Afghans par pont aérien depuis Kaboul fait planer le risque que dans le flux s’insèrent de possibles djihadistes ou des individus potentiellement dangereux.

Les polices d’Europe se souviennent du flot de réfugiés venus de Syrie.

Des auteurs des attentats de 2015 à Paris

Parmi eux s’étaient notamment dissimulés certains des auteurs des attentats de Paris en 2015. D’où l’impérieuse nécessité de surveiller les entrants.  

« Nous aimerions pouvoir simplement ouvrir nos portes », relevait lundi sur la BBC le secrétaire d’État aux Forces armées, James Heappey. Mais « des gens essayent de profiter de la situation pour entrer au Royaume-Uni et nous faire du mal », a-t-il ajouté.   

Deux suspects déjà identifiés

Un homme figurant sur une liste noire des autorités britanniques a ainsi été évacué de Kaboul. Un porte-parole du ministère a cependant indiqué mardi qu’il avait été identifié « dans le cadre d’un rigoureux processus de vérification » avant d’être considéré comme « une personne ne suscitant pas l’intérêt » des services de sécurité.

Londres a évacué de Kaboul 8458 personnes depuis le 13 août selon le ministère de l’Intérieur, dont 5171 Afghans.

En France, l’un des cinq Afghans sous surveillance après avoir été rapatrié en France a été placé en garde à vue, selon le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.  

Il fait partie de l’entourage « d’un Afghan qui a aidé à l’évacuation de Français, de personnes qui ont travaillé pour la France lors de l’évacuation de l’ambassade, à un moment qui était incroyablement tendu, (et) qui a probablement sauvé des vies », a précisé M. Attal sur BFMTV.

Ce dernier, principal profil surveillé, « aurait eu un lien avec des talibans, à un moment donné, qui reste à définir », a ajouté Gabriel Attal.

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’est de son côté défendu de toute « faille » dans la surveillance des Afghans ramenés en France. « Nous connaissons toutes les personnes qui sont arrivées sur notre sol, ramenées par l’armée française », a-t-il ajouté sur France Info.  

« Vigilance »

Le souvenir syrien, manifestement, reste vif dans l’esprit des autorités. « Bien sûr, il y a un risque d’infiltration (par des terroristes). C’est pour cela qu’il faut une vigilance très forte, a commenté sur France Info Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration.  

« À l’aéroport de Roissy, il y a des services spécialisés qui à chaque fois examinent chaque situation, mais ce n’est pas nouveau. En 2015-2016, nous avions été confrontés, l’ensemble des pays d’Europe et en particulier l’Allemagne, à l’arrivée de personnes qui avaient de faux passeports syriens et donc il y a une vigilance qui s’exerce ».  

La prudence est ainsi de mise sur tout le continent. L’Allemagne a identifié quelques dossiers de droit commun parmi les rapatriés. Et la Belgique revendique une vigilance de tous les instants.  

« Contrôle strict » à l’aéroport de Kaboul

« Le chaos a régné à l’aéroport pendant très longtemps et il faut être sûr qu’il n’y ait pas d’attaque. D’où le contrôle très strict que font les Américains », expliquait dimanche Sammy Mahdi, ministre belge de l’Immigration à la télévision flamande VTM News.  

« Mais il faut qu’il y ait un flux d’informations suffisant de nos services vers les Américains (qui contrôlent l’aéroport de Kaboul) pour que les bonnes personnes puissent arriver ici ».

Quant au Danemark, il a indiqué que deux personnes interdites de territoire avaient été trouvées parmi les réfugiés exfiltrés de Kaboul, dont le membre d’un gang de Copenhague expulsé début juillet et qui a usurpé l’identité de son frère pour revenir.

« Nous avons arrêté une personne arrivée par un avion d’évacuation d’Afghanistan via le Pakistan. Il est accusé d’avoir violé une interdiction d’entrée sur le territoire danois », a tweeté la police de Copenhague.

Hors Union européenne, le président russe Vladimir Poutine a pour sa part souligné la responsabilité des pays limitrophes de l’Afghanistan. Il est « important d’empêcher l’infiltration de terroristes sur les territoires des pays voisins […] y compris en se faisant passer pour des réfugiés », a-t-il déclaré.

« Qui peut être (caché) parmi ces réfugiés, comment peut-on le savoir ? », a-t-il insisté, en estimant que « des centaines, voire des centaines de milliers ou peut-être des millions » de personnes pourraient vouloir fuir le territoire afghan.

Plusieurs ex-républiques soviétiques d’Asie centrale partagent une frontière avec l’Afghanistan et la Russie. Dès lors, des « combattants déguisés en réfugiés » pourraient atteindre le territoire russe, a-t-il estimé.