(Moscou) Le président russe Vladimir Poutine s’est opposé mercredi à une obligation vaccinale nationale contre la COVID-19 en pleine vague meurtrière du variant Delta, mais a encouragé les Russes, très hésitants, à se faire immuniser.

La campagne vaccinale, lancée en décembre à grand renfort de propagande autour du Spoutnik V, l’injection phare de Moscou, n’a pour l’instant convaincu que 23 des 146 millions de Russes, sur fond de méfiance généralisée.

Cette faible couverture nationale, malgré le lancement de trois autres vaccins, a, selon les experts, favorisé la vague épidémique déferlant sur la Russie actuellement, entraînant une litanie de records de décès et de contaminations depuis la mi-juin.

« Il faut se faire vacciner », a dit M. Poutine lors de sa grand-messe télévisée annuelle répondant aux questions de ses concitoyens, un rendez-vous qui intervient aussi à moins de trois mois des législatives de septembre.

Mais au niveau national, « je ne soutiens pas l’obligation vaccinale » a-t-il dit, lors de cette émission qui devrait durer plus de trois heures.  

Le dirigeant russe a toutefois jugé justifiée la décision de certaines régions, Moscou en tête, confrontées à une rapide détérioration de la situation sanitaire, d’introduire « l’obligation vaccinale pour certaines catégories de citoyens », comme ceux travaillant dans les services à la personne ou les populations à risque.

Ces mesures sont impopulaires, alors que le rejet de la vaccination a dépassé les 50 % des personnes interrogées ces derniers mois dans divers sondages.

Le Kremlin a d’ailleurs admis lundi que son objectif de vacciner 60 % de la population d’ici l’automne est inatteignable. Et surtout, il s’est gardé de fixer tout nouvel objectif.

Pour convaincre les Russes d’accepter les injections, M. Poutine leur a intimé de ne pas écouter les rumeurs, alors que beaucoup doutent de la sûreté des divers vaccins nationaux.  

Sur les réseaux sociaux, les anecdotes horrifiantes et non-vérifiées à ce sujet se répandent depuis des mois.

« Il ne faut pas écouter les gens qui n’y comprennent rien à ces choses, s’appuient sur des rumeurs, mais (écouter) les experts », a souligné M. Poutine.  

« La propagation de la pandémie ne peut être évitée que par la vaccination », a martelé le dirigeant russe lors de cette émission où il s’efforce de se présenter comme proche et à l’écoute des problèmes des Russes, qu’il s’agisse de la vaccination ou du prix du bois de chauffage.

Pour motiver les Russes, il a raconté sa propre expérience et celle de sa fille, révélant pour la première fois qu’il avait choisi le Spoutnik V.

Bien qu’omniprésent quotidiennement à la télévision, le maître du Kremlin s’est fait vacciner en mars loin des caméras, nourrissant les interrogations dans la population.

Vaccins occidentaux dénigrés

Le président russe a fait la publicité des vaccins russes en s’en prenant aux injections développées en Occident, à rebours des évaluations scientifiques et sanitaires à travers le monde, les jugeant efficaces et sûrs.  

« Chez nous tout se passe bien et il n’y a pas ces situations tragiques comme après AstraZenaca ou Pfizer »,  a assuré M. Poutine, en référence à des cas rares d’effets secondaires mortels.  

Ces vaccins ont été approuvés par l’Organisation mondiale de la Santé, alors que le Spoutnik V est encore à l’étude.

La Russie a enregistré mercredi un record de décès quotidiens dûs à la COVID-19 pour le deuxième jour consécutif, avec 669 morts. La capitale, Moscou, et la deuxième ville du pays, Saint-Pétersbourg, sont particulièrement durement frappés.

Le pays dans son ensemble affiche 21 042 nouvelles infections ces dernières 24 heures et plus de 5,5 millions depuis le début de la pandémie.  

Le nombre de morts recensé par le gouvernement est de 135 214, faisant de la Russie le pays européen le plus endeuillé par la COVID-19. Mais l’agence des statistiques Rosstat, qui a une définition plus large des décès liés au coronavirus, avait comptabilisé 270 000 morts à la fin avril.

Moscou a introduit ces dernières semaines des mesures telles que le retour du télétravail pour une partie des employés, la vaccination obligatoire dans les services ou encore la création d’un pass sanitaire pour aller au restaurant.

Un confinement général, comme au printemps 2020, n’est toutefois pas envisagé, l’économie restant la priorité.