(Paris) Nouvelles restrictions déjà décidées ou à venir,  hôpitaux menacés de déborder, appels à fermer les écoles, lassitude qui s’installe : la France est dans une situation très difficile à cause d’une épidémie de COVID-19 qui n’en finit pas.

La situation épidémique est « critique avec l’entrée en action de la troisième vague et la prédominance du variant britannique », a reconnu le bureau du premier ministre vendredi, en annonçant des contrôles intensifiés dans les « gares, aéroports et péages routiers ».

« Une course contre la montre est engagée », ajoute le communiqué, diffusé après une rencontre entre le premier ministre Jean Castex et les préfets et responsables sanitaires des 19 départements concernés par les nouvelles restrictions.

Les trois derniers à rejoindre la liste de ces départements sont le Rhône, l’Aube et la Nièvre.

Les mesures s’y appliqueront à partir de samedi, comme c’est déjà le cas dans 16 autres, dont l’Île-de-France (la grande région parisienne) : pas de déplacements à plus de 10 km sans dérogation, pas de sortie du territoire sans motif impérieux, nouveaux commerces fermés et demi-classes en lycée.

Vingt-quatre autres départements sont sous vigilance renforcée, comme le Jura où la préfecture a durci les mesures sanitaires face à « une forte accélération de la circulation du virus ».

« Ces semaines qui viennent seront difficiles, nous prendrons toutes les mesures utiles en temps et en heure et il n’y a, à mes yeux, aucun tabou », a averti le président de la République, Emmanuel Macron jeudi soir.

Critiqué pour ne pas avoir reconfiné

« Je n’ai aucun mea culpa à faire », a-t-il ajouté, en défendant sa décision fin janvier de ne pas reconfiner.

Cela lui a valu un tir nourri de l’opposition, qui y a vu une preuve d’« arrogance » car les épidémiologistes avaient prévu dès janvier une telle aggravation. Elle a d’ailleurs valu à la France d’être classée vendredi zone à « haut risque » par l’Allemagne.

Selon le ministre de la Santé Olivier Véran, il est « trop tôt » pour évaluer l’efficacité des nouvelles restrictions, et donc pour un éventuel durcissement. Autre critère, « l’acceptabilité » des mesures pour les Français « épuisés de lutter sans relâche depuis un an ».

« On observe une probable lassitude des Français face aux mesures de distanciation sociale », confirme l’agence sanitaire Santé publique France dans son bulletin hebdomadaire.

Le variant anglais se propage

Poussée par le variant anglais, plus contagieux et plus virulent, l’épidémie a progressé quasiment partout.

Le nombre de malades aux soins intensifs a dépassé jeudi 4700 personnes. À 4766 vendredi, il se rapproche toujours plus du pic de la deuxième vague à l’automne (4900).

La barre des 200 000 nouveaux cas hebdomadaires a été franchie et depuis le début de la semaine, plus d’un millier de personnes touchées par la COVID-19 sont mortes à l’hôpital (94 302 décès en tout depuis le début de l’épidémie).

L’épidémie n’épargne personne, pas même le gouvernement. La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, est à l’hôpital sous oxygène, et celle du Travail, Élisabeth Borne, en est sortie.

Ce tableau sombre pousse de nombreux médecins à demander qu’on serre davantage la vis.

« Je ne vois pas comment on ne peut pas aller vers un confinement total », a jugé sur franceinfo l’épidémiologiste Dominique Costagliola.

Les écoles, vecteurs de contamination

C’est en particulier la question des écoles qui fait débat. Des élus réclament leur fermeture et la présidente de la région Île-de-France Valérie Pécresse a répété vendredi qu’elle demandait d’avancer la relâche du printemps au 2 avril.

La semaine dernière, les nouvelles contaminations ont particulièrement progressé chez les moins de 15 ans, une hausse que l’intensification du dépistage n’explique qu’en partie, selon Santé publique France.

Contrairement au coronavirus classique, le variant anglais « touche autant les enfants que les adultes », a expliqué Daniel Levy-Bruhl, l’un des responsables de Santé publique France. Cela entraîne « une augmentation […] de la transmission entre enfants […] et de la transmission enfants/adultes ».

De plus, le « choix » de laisser les écoles ouvertes « fait qu’il y a […] des circonstances de transmission potentielles » telles que la cantine ou la cour de récréation « qui sont acceptées chez les enfants alors qu’on essaie de limiter au maximum celles chez les adultes ».

Face à ces hausses, le ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, a annoncé que dans les 19 départements sous restrictions, un seul cas de COVID-19 dans une classe entraînerait sa fermeture.

Ces derniers mois, le gouvernement a martelé que la fermeture des écoles n’interviendrait qu’en dernier recours.

Seul espoir, la vaccination

Plus que jamais, l’espoir vient de la vaccination, qui « passera un premier cap mi-avril », selon le président.

En plus des médecins ou des infirmiers, vétérinaires et dentistes pourront vacciner, après le feu vert de la Haute autorité de santé.

Pour l’heure, 7,5 millions de personnes ont reçu au moins une injection, dont 2,6 millions ont eu leurs deux doses. La France a donc dépassé les 10 millions d’injections, avec plus de 400 000 piqûres en 24 heures.

Parallèlement, l’Agence du médicament a confirmé l’existence d’un risque « rare » de thrombose atypique associé au vaccin contre la COVID-19 d’AstraZeneca, après la survenue de nouveaux cas en France, dont deux décès, tout en soulignant que la balance bénéfice-risque restait « favorable ».

Et dans cette période avare en bonnes nouvelles, les autorités ont tempéré les inquiétudes nées de la découverte d’un variant breton : « À ce stade, rien n’indique (qu’il) est davantage contagieux ou davantage sévère », selon l’Agence régionale de santé de Bretagne.