(Oslo) La Norvège a exigé et obtenu mardi une suspension de la cession prévue par Rolls-Royce d’un producteur norvégien de moteurs pour bateaux à un groupe russe, évoquant la possibilité d’un veto en cas de risque pour la sécurité nationale.

Une pause dans le projet de vente de Bergen Engines à TMH Group s’impose, le temps de déterminer si cette opération risquerait de nuire aux intérêts norvégiens, a déclaré le ministère de la Justice et de la Sécurité publique dans un communiqué.

L’Autorité norvégienne de sécurité nationale (NSM) a notifié à Rolls-Royce d’un possible blocage de la transaction, a précisé le ministère.

Dans le giron du motoriste britannique depuis 1999, Bergen Engines fournit et entretient des moteurs pour des bâtiments de la Marine militaire norvégienne et, selon des médias locaux, pour le très secret navire-espion Marjata.

« Il ne peut être exclu qu’une vente de Bergen Engines AS à TMH Group puisse entraîner un risque pour les intérêts de la sécurité nationale », a expliqué la ministre Monica Maeland, citée dans le communiqué.

« Il y a donc besoin de faire une pause dans ce processus pour se procurer une documentation suffisante pour évaluer la cession », a-t-elle ajouté.

Le chef d’état-major des armées norvégiennes, Eirik Kristoffersen, a souligné auprès de la chaîne TV2 qu’il dénoncerait les accords liant la Marine à Bergen Engines si la société devait passer sous contrôle russe.

Si elle souligne ne pas être partie prenante dans l’opération, la Russie a, via son ambassade à Oslo, estimé que « la discussion en cours en Norvège avec ses implications antirusses soulevait de graves inquiétudes ».

De son côté, Rolls-Royce dit s’être plié aux demandes d’Oslo.

« Nous avions dûment informé le gouvernement avant d’annoncer la vente de Bergen Engines. Nous comprenons cependant que le gouvernement norvégien souhaite maintenant étudier plus avant l’accord », a indiqué un porte-parole du motoriste britannique, Richard Wray.

« Comme demandé, nous avons suspendu le processus de vente », a-t-il ajouté dans un courriel à l’AFP.

TMH a dit prendre note de la ligne adoptée par Oslo, sans pour autant baisser les bras.

« Nous respectons les processus internes qui doivent être menés par le gouvernement et nous attendrons les conclusions », a écrit l’entreprise à l’AFP.  

« Nous espérons qu’à l’issue des processus gouvernementaux, l’acquisition sera bouclée », a-t-elle ajouté.

Début février, Rolls-Royce avait annoncé la cession pour environ 150 millions d’euros de sa filiale norvégienne qui emploie 950 personnes et a généré en 2019 un chiffre d’affaires de 239 millions de livres (279 millions d’euros).

Cette opération, a noté M. Wray, n’est « qu’une part infime » du programme de cessions d’actifs de 2 milliards de livres annoncé en août dernier par le groupe pour renforcer ses finances.  

Entreprise privée ayant son siège en Russie, TMH est présentée comme un spécialiste de l’ingénierie des transports et un important fournisseur de matériel roulant ferroviaire, qui compte quelque 100 000 salariés sur 25 sites à travers le monde.