Pour sa première rencontre lundi avec ses homologues européens à Bruxelles, le nouveau chef de la diplomatie britannique et chantre du Brexit Boris Johnson a appelé l'UE à ne pas fermer les portes, en souhaitant que son pays continuer à jouer un rôle moteur en Europe.

Ce conseil des Affaires étrangères, avec la présence inédite du secrétaire d'État américain John Kerry, s'est déroulé dans un climat de crise aiguë en Europe, aggravé par les menaces terroristes et l'instabilité en Turquie.

«Nous devons mettre en oeuvre la volonté du peuple et quitter l'Union européenne, mais (...) en aucun cas, nous allons abandonner notre rôle dirigeant en Europe», a déclaré d'emblée M. Johnson aux journalistes.

À l'issue d'une longue journée qu'il a qualifiée de «productive», il a demandé à l'UE de laisser des «portes ouvertes» à la coopération avec le Royaume-Uni en matière de questions stratégiques.

L'ex-maire conservateur de Londres, dont la nomination surprise a suscité critiques et sarcasmes, était attendu avec une intense curiosité et une certaine appréhension à Bruxelles, la capitale de l'UE qu'il connaît bien pour y avoir été un journaliste en vue au début des années 1990.

Troquant son costume de provocateur contre celui de diplomate, Boris Johnson est apparu détendu et affable avec ses collègues.

Tout en faisant état d'un «bon échange» avec M. Johnson, Federica Mogherini, qui dirige la diplomatie européenne, a réitéré qu'aucune négociation ne serait engagée avec le Royaume-Uni tant que Londres n'aurait pas officiellement notifié à l'UE sa volonté de s'en séparer.

Depuis le séisme provoqué par le référendum du 23 juin, les Européens exhortent les dirigeants britanniques à «clarifier» leurs intentions et hâter les discussions officielles avec l'UE. Le Royaume-Uni table sur le 1er janvier 2019 pour sa sortie effective du bloc.

«Il faut éviter que l'Europe s'installe dans une situation d'incertitude. Plus tôt les négociations auront commencé, mieux ce sera», a plaidé à son arrivée le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault.

Solidarité contre le terrorisme

Si Boris Johnson a quelque peu volé la vedette lundi à Bruxelles, y compris à l'Américain John Kerry en tournée en Europe, les chefs de la diplomatie se sont ensuite concentrés sur la «polycrise» qui fait vaciller l'UE.

Avait été ajoutée à l'ordre du jour la situation en Turquie, «partenaire clé» de l'UE, après la tentative de putsch contre son homme fort Recep Tayyip Erdogan.

Federica Mogherini et John Kerry ont exhorté le régime de M. Erdogan à «respecter les institutions démocratiques et l'État de droit» et l'ont mis en garde contre toute tentation de répression généralisée.

«Aucun pays ne peut adhérer à l'UE s'il introduit la peine de mort», a rappelé Mme Mogherini, alors qu'Ankara frappe depuis des années à la porte de l'Union.

«L'introduction de la peine de mort en Turquie signifierait en conséquence (pour Ankara) la fin des négociations d'adhésion à l'Union européenne», a averti un porte-parole du gouvernement allemand.

Autre sujet brûlant: la lutte antiterroriste inscrite également au menu de la réunion, à la demande de Paris après la tuerie de Nice (sud-est de la France).

Une minute de silence a été observée par les ministres alors que la France se recueillait en mémoire des 84 victimes.

Évoquant la lutte contre l'organisation de l'État islamique, qui a revendiqué l'attentat de Nice, Paris en a appelé aux Européens pour «faire preuve de plus grande solidarité ensemble».

«Tous les États membres ont confirmé leur disponibilité pour travailler encore plus pour soutenir le travail de la France pour la sécurité de son pays, mais aussi de l'Europe», a assuré Mme Mogherini à la fin du conseil.

Les 28 ont aussi discuté de l'Amérique latine, en particulier des relations avec le Venezuela et Cuba, ainsi que du processus de paix en Colombie.

Etaient également à l'ordre du jour: la Chine -l'UE s'est inquiétée de la surproduction d'acier chinoise-, la mise en oeuvre de la nouvelle «stratégie globale» pour la politique étrangère et la sécurité proposée par Mme Mogherini et la crise migratoire avant le sommet de l'ONU sur cette question prévu pour le 19 septembre à New York.