Les élèves d'un canton suisse ne pourront opposer leurs convictions religieuses au rituel de leur école

Dans l'espoir de couper court à une polémique qui a eu des échos à l'échelle nationale, un canton suisse vient de statuer qu'il ne serait pas possible à l'avenir pour des élèves de refuser de serrer la main d'une enseignante en évoquant leurs convictions religieuses.

Les parents ou les responsables légaux des élèves qui refuseront de se conformer à la nouvelle directive s'exposent notamment à une amende pouvant atteindre 6500 $.

Le département de l'Instruction publique du canton de Bâle-Campagne, en Suisse allemande, a statué dans un avis juridique divulgué mercredi que les enjeux soulevés par cette problématique justifiaient une approche coercitive.

« L'intérêt public concernant l'égalité entre femmes et hommes aussi bien que l'intégration de personnes étrangères l'emportent largement sur la liberté de croyance des élèves », a indiqué l'organisation, ajoutant que « la liberté de conscience et de croyance de chacun est limitée par les droits et libertés d'autrui ».

La polémique a éclaté il y a quelques mois après que des médias eurent révélé que l'école secondaire de Therwil permettait à deux élèves musulmans âgés de 14 et 15 ans de ne pas serrer la main de leur enseignante même s'il s'agissait d'un rituel dans cet établissement.

Les deux adolescents, qui vivent en Suisse depuis plusieurs années, avaient déclaré à la fin de l'année dernière que leurs croyances religieuses ne leur permettaient pas de toucher la main d'une femme.

La décision de l'établissement avait suscité de vives critiques, notamment de la part de la présidente de la Confédération suisse, Simonetta Sommaruga.

« Serrer la main fait partie de notre culture et de notre quotidien. Ce n'est pas l'idée que je me fais de l'intégration », a-t-elle souligné dans une entrevue à la radio.

Les remous n'ont pas infléchi la position des dirigeants de l'école, qui attendaient le verdict du département de l'Instruction publique pour fixer leur ligne de conduite à plus long terme.

RÉACTIONS POSITIVES

Dans une entrevue au quotidien Le Temps, la présidente du Forum pour un islam progressiste, Saïda Keller-Messahli, a salué l'intervention du canton, relevant qu'il s'agissait d'une décision « juste et courageuse ».

« Le refus de serrer la main d'une femme est un des symptômes de l'islam politique qui veut la séparation des sexes dans tous les domaines de la vie publique, qui veut le foulard pour les filles, qui veut voiler les femmes et leur assigner une place secondaire dans les mosquées et dans l'espace public », a-t-elle déclaré.

Le président du Syndicat des enseignants romands, Georges Pasquier, a expliqué hier en entrevue que la pratique de la poignée de main n'est pas du tout généralisée dans les écoles en Suisse.

La décision prise par les autorités du canton de Bâle-Campagne est importante, dit-il, puisqu'elle vient rappeler l'importance d'une valeur « centrale » pour la Suisse, soit l'égalité entre hommes et femmes et l'interdiction de la discrimination sur la base du sexe.

Il aurait cependant été préférable, selon le syndicaliste, de chercher une solution par le dialogue plutôt que d'imposer une décision « venue d'en haut ».

« Dans ce genre de cas, qui est plutôt rare, il faut travailler et travailler pour trouver un terrain d'entente et recourir à l'exclusion s'il n'y a rien à faire. La plupart du temps, ça marche », relève M. Pasquier, en soulignant que la médiatisation du cas de l'école de Therwil a compliqué sa résolution.