Près d'un an après la catastrophe de Germanwings, l'aviation civile française a prôné dimanche un contrôle médical accru des pilotes et une levée du secret en cas de troubles psychologiques, en confirmant le scénario d'un écrasement volontaire du copilote.

La catastrophe avait fait 150 morts (144 passagers et six membres d'équipage) en mars 2015 dans les Alpes françaises et soulevé des questions inédites en matière de sécurité aérienne.

Le rapport final du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA), rendu public au Bourget, près de Paris, valide définitivement le scénario de la tragédie provoquée par le copilote allemand, Andreas Lubitz, en proie à des problèmes psychiques.

« Des règles plus claires doivent être exigées pour savoir quand il est nécessaire de rompre le secret médical », a déclaré Arnaud Desjardin, un des responsables de l'enquête, en présentant les recommandations du BEA pour éviter qu'une telle catastrophe se reproduise.

Il a souligné que « plusieurs médecins privés avaient l'information » établissant qu'Andreas Lubitz « était malade », mais que celle-ci n'était « pas parvenue aux autorités aéronautiques ni à l'employeur Germanwings », filiale low cost de la Lufthansa.

Par sécurité, le rapport du BEA recommande « une analyse régulière des incapacités de vol, en particulier pour des problèmes psychologiques ou psychiatriques » des pilotes.

Il réclame « des règles faisant obligation » aux médecins « d'informer les autorités compétentes lorsque la santé d'un patient a de forts risques d'affecter la sécurité publique ».

Il prône de définir « les conditions de suivi des pilotes avec des antécédents de troubles psychologiques » et appelle à prévenir une « réticence des pilotes à déclarer leurs problèmes et à solliciter une assistance médicale par crainte de perdre leur licence ».

Ces recommandations n'ont rien d'obligatoire, mais les rapports du BEA font autorité dans la communauté aéronautique internationale.

Les experts français ne suggèrent « aucun changement » sur le verrouillage du cockpit, qui ne peut être ouvert de l'extérieur depuis les attentats du 11 septembre 2001. « Le risque terroriste est toujours là », a souligné le directeur du BEA, Rémy Jouty.

Ils n'évoquent pas non plus la présence obligatoire de deux personnes en cabine tout au long du vol, recommandée par l'Agence européenne de sécurité aérienne (Easa) mais qui ne fait pas l'unanimité.

Vers une plainte aux États-Unis

« Il est crucial que toute recommandation raisonnable du rapport pour améliorer la sécurité aérienne soit mise en oeuvre dès que possible », a jugé Jim Morris, un avocat de familles de victimes britanniques, dans le Sunday Mirror.

« Les familles veulent voir d'importantes leçons tirées afin de limiter le risque de réédition de drames similaires », a-t-il insisté.

Le principal syndicat français de pilotes, le SNPL, a estimé qu'une levée du secret médical « ne servira pas à grand-chose » et a plaidé pour « un meilleur suivi en amont » à condition qu'il « ne soit pas fait dans un esprit punitif ».

Le 24 mars 2015, Andreas Lubitz, le copilote du vol GWI18G Barcelone-Düsseldorf de Germanwings, avait profité d'une sortie du pilote de la cabine pour engager la descente funeste de l'Airbus.

Le dossier médical de ce jeune Allemand de 27 ans avait fait apparaître qu'il souffrait de dépression, sans être interdit de piloter.

Les 150 victimes de la catastrophe de Germanwings étaient originaires d'une vingtaine de pays. L'Allemagne et l'Espagne ont été les plus touchés, avec respectivement 72 et 50 morts.

À l'occasion du premier anniversaire du écrasement, une majorité de leurs familles doivent être réunies le 23 mars pour une cérémonie à Marseille (sud de la France) avant de se rendre le lendemain sur les lieux du écrasement.

Christof Wellens, un avocat allemand de proches des victimes, a annoncé début mars vouloir porter plainte aux États-Unis contre l'école de pilotage de Lufthansa près de Phoenix (Arizona), où a été formé Andreas Lubitz.

Les avocats des proches des victimes jugent l'indemnisation proposée par Lufthansa trop basse (25 000 euros pour chaque victime, en plus d'une première aide de 50 000 euros) et ont menacé à plusieurs reprises de porter plainte aux États-Unis, où les réparations financières peuvent être beaucoup plus élevées qu'en Europe.