En Espagne, pays secoué en 2004 par une série d'attentats terroristes où des bombes avaient explosé à bord de trains, il faut passer par un système d'inspection des bagages, comme pour monter dans l'avion, avant de prendre une liaison ferroviaire à grande vitesse.

Des mesures semblables sont prises avant de s'engager dans l'Eurostar, le train rapide qui relie la France et le Royaume-Uni.

La France devrait-elle maintenant faire la même chose dans ses gares, se demande-t-on, quelques jours après la tentative d'attentat dans le train ultrarapide liant Paris et Amsterdam qui a été contrée notamment par des passagers américains?

«Pour le moment, les pouvoirs publics sont en réflexion. Mais on n'a pas les moyens matériels, financiers, humains, de tout faire», répond en entrevue Olivier Renaudie, professeur de droit à l'Université de Lorraine et spécialiste des questions de sécurité.

L'idée de reproduire les contrôles des aérogares dans les gares terrestres est bonne sur le papier, mais irréaliste concrètement, continue-t-il. «Il y a un coût qui ne peut pas être supporté.»

On n'est donc pas à la veille de devoir enlever nos chaussures, vider en vitesse nos bouteilles d'eau, isoler nos ordinateurs et laisser les opinels à la maison avant de sauter dans un wagon.

Mais pourra-t-on encore prendre le train l'esprit en paix?

Il y a des choses réalistes à faire pour que ce soit possible, note M. Renaudie.

Fouilles «aléatoires»



Il se pourrait très bien, par exemple, que les autorités choisissent d'installer des postes de détection de métal pour renforcer la sécurité dans certaines gares très fréquentées et pour certaines lignes stratégiques.

Alain Vidalies, secrétaire d'État aux Transports, a lancé une controverse au début de la semaine, en affirmant qu'il fallait multiplier les contrôles humains, policiers et militaires et faire des fouilles «aléatoires» directes dans les gares, même si cela comporte un risque de discrimination.

Les propos ont fait vivement réagir les politiques sur les réseaux sociaux: «Quand un ministre justifie la discrimination pour lutter contre le terrorisme, il ne parle plus au nom de la République», a réagi Olivier Dartigolles, porte-parole du Parti communiste français, alors que Laura Slimani, présidente des Jeunes Socialistes, demandait des «excuses».

Mais M. Vidalies n'est pas le seul à penser ainsi. Sur un autre média, le 20 minutes, l'expert de la sécurité dans les transports Christophe Naudin a proposé quant à lui «des contrôles biométriques identitaires dans les gares les plus fréquentées et un contrôle aléatoire et discriminatoire des personnes et bagages».

Vigilance citoyenne



Pour M. Renaudie, une des réponses simples aux questions soulevées par l'attaque survenue il y a une semaine est tout simplement de mieux faire attention à notre entourage, faire preuve d'une vigilance citoyenne accrue. En France, explique M. Renaudie, le concept est souvent mal vu, perçu comme de la délation. «Mais le déroulement des événements récents montre bien le rôle que tous les citoyens peuvent jouer», note-t-il.

D'ailleurs, c'est la voie qu'a choisie la SNCF, l'organisme qui gère le système ferroviaire français. Les seules mesures annoncées dans la foulée de l'attentat ont été la mise en place de ce que les Français appellent un «numéro vert», où on peut signaler des anomalies inquiétantes, ainsi que la multiplication des messages d'appel à la vigilance dans les gares.

En revanche, il ne faut pas oublier que depuis l'attentat de janvier dernier à Charlie Hebdo, la France est déjà sur le mode «Vigipirate écarlate», mot de code pour désigner un état de vigilance maximale.

Par exemple, les sacs sont inspectés systématiquement à l'entrée des musées et autres grands lieux publics, mais surtout, actuellement, on voit des militaires, souvent le doigt sur la gâchette de leur fusil d'assaut FAMAS, partout à Paris. Certains surveillent des synagogues, d'autres des monuments. Et plusieurs sont dans les gares. Mais ils surveillent les lieux, ils ne font pas de fouilles ou de dépistage systématique.