Les libéraux ont quitté mardi la coalition de centre gauche au pouvoir en Roumanie depuis 2012 mais le gouvernement du Premier ministre social-démocrate Victor Ponta devrait se maintenir grâce au soutien d'autres partis.

«Nous avons décidé de retirer nos ministres du gouvernement», a déclaré le chef des libéraux et président du Sénat Crin Antonescu à l'issue d'une réunion des responsables de cette formation.

«Ce n'était pas une décision facile à prendre, nous avons tenté de l'éviter (...) mais nous ne voulions pas prolonger une crise entretenue par Victor Ponta», a-t-il ajouté.

Les libéraux comptent 10 ministres dans le cabinet Ponta sur un total de 27.

Cette décision intervient après le refus de M. Ponta d'entériner la désignation du très respecté maire libéral de Sibiu (centre) Klaus Iohannis, issu de la minorité allemande, au poste de vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur.

L'Union sociale libérale (USL), qui regroupe les sociaux-démocrates, les libéraux et deux autres petits partis, le PC et l'UNPR, avait enregistré un raz-de-marée lors des élections de décembre 2012, avec plus de 60% des suffrages.

Depuis, cette coalition éclectique qui s'est donné comme principal objectif d'obtenir le départ du président de centre droit Traian Basescu, n'a cessé de recruter des élus d'autres formations.

Le PSD allié au PC et à l'UNPR dispose ainsi d'une majorité serrée mais suffisante pour continuer à gouverner, soulignent les analystes.

Il pourra en outre compter sur le soutien des élus des minorités nationales et de l'Union démocratique des Magyars (UDMR), le parti de la minorité hongroise, qui pourrait même obtenir des portefeuilles au sein du nouveau gouvernement.

Quelques heures avant l'annonce des libéraux, M. Ponta avait appelé à «sauvegarder l'USL».

Lundi, M. Ponta avait déclaré qu'en cas de retrait des libéraux il demanderait le vote de confiance du parlement sur sa nouvelle équipe avant le 8 mars.

Cette rupture intervient dans un pays habitué à des changements d'alliance qui ont provoqué la chute de plusieurs gouvernements ces dernières années.

Selon les analystes, l'éclatement de l'USL était prévisible, à l'approche de l'élection présidentielle de novembre.

Si M. Antonescu a été désigné il y a plus d'un an candidat unique de l'USL à ce scrutin, de plus en plus de sociaux-démocrates estiment que leur formation devrait avoir son propre candidat, en raison de son poids au sein de l'USL.

«Pour les libéraux il est devenu clair que les sociaux-démocrates ne respecteront pas leur accord sur le candidat à la présidentielle», a déclaré à l'AFP le politologue Ovidiu Voicu de la Fondation Soros à Bucarest.

«Antonescu préfère se présenter en tant que candidat de l'opposition et de la droite, estimant qu'il aura ainsi plus de chances au second tour», a-t-il ajouté.

Selon lui, le départ des libéraux mettra fin à la «super-majorité» dont disposait jusqu'ici le gouvernement et rendra plus difficiles des «attaques contre l'État de droit» et contre l'indépendance de la justice.

Il a notamment cité l'adoption, en décembre, d'amendements controversés au code pénal et la tentative d'adopter un projet de loi sur l'amnistie devant permettre à plusieurs hommes politiques condamnés de sortir de prison.

Les analystes estiment par ailleurs que l'économie roumaine, qui a progressé d'un solide 3,5% en 2013, ne devrait pas souffrir à court-terme de l'éclatement de l'USL.

«Mais si l'instabilité politique se prolonge, cela mettra sous pression le cours du leu (la monnaie nationale, ndlr) tandis que les investisseurs se montreront plus prudents», a indiqué à l'AFP l'analyste économique Cristian Grosu.

Déja, souligne-t-il, il y a un «certain attentisme et un manque de confiance» des entrepreneurs qui se demandent si des mesures économiques évoquées ces derniers mois par le gouvernement seront ou non mises en oeuvre.