Déjà fragile politiquement, le gouvernement tchèque de Petr Necas, chef du parti de droite ODS, s'est retrouvé sous pression jeudi, à la suite d'une vague d'interpellations sans précédent de personnalités politiques proches du pouvoir, dans une ambiance de soupçons de corruption.

La police a annoncé jeudi une opération d'envergure, menée depuis la nuit par 400 policiers de la brigade de lutte contre le crime organisé au siège du gouvernement et au ministère de la Défense. Plusieurs personnalités connues ont été interpellées, mais la nature des délits présumés n'a pas été précisée.

La chambre des députés a suspendu jusqu'à vendredi matin les débats à la demande de l'opposition qui réclame des explications au chef du gouvernement.

Le chef du parti social-démocrate CSSD, en tête des sondages à moins d'un an des législatives, Bohuslav Sobotka, a aussitôt appelé à une «démission immédiate du premier ministre et du gouvernement» et à «l'organisation des législatives anticipées dans les plus brefs délais».

«La République tchèque ne peut pas avoir à sa tête un premier ministre dont l'entourage est soupçonné de liens avec des structures mafieuses», a affirmé M. Sobotka, sans autre précision.

Les activités de plusieurs hommes d'affaires et lobbyistes controversés liés à la mairie de Prague et soupçonnés de malversations sont également examinées dans le cadre de cette affaire, selon les médias.

«Je n'ai aucune raison de penser à ma démission ni à celle de mon gouvernement, je n'ai fait rien de malhonnête», a martelé de son côté M. Necas.

Parmi les personnalités visées figure pourtant Jana Nagyova, la directrice du cabinet de M. Necas, considérée comme son bras droit.

«Ma confiance en Mme Nagyova n'a nullement baissé», a affirmé le premier ministre.

La presse populaire se perd en conjectures depuis longtemps sur la nature des relations entre M. Necas et Mme Nagyova. Le chef du gouvernement a officiellement annoncé mardi le divorce d'avec son épouse, Radka.

Le cabinet de centre droit de M. Necas, largement fragilisé par sa politique de rigueur budgétaire et aussi par de nombreux scandales de corruption, a déjà survécu à cinq motions de censure depuis son installation en juillet 2010, mais il n'a plus de majorité parlementaire depuis 2012.

«Il est possible que l'affaire prenne de l'ampleur et qu'elle puisse avoir des conséquences, et même entraîner la chute du gouvernement», a déclaré à l'AFP le politologue Josef Mlejnek.

La liste des personnes interpellées comprend notamment, selon la presse, le chef de l'office du gouvernement Lubomir Poul, le directeur du renseignement militaire Milan Kovanda, et son prédécesseur à ce poste Ondrej Palenik, ainsi que l'ex-chef du groupe parlementaire de l'ODS Petr Tluchor et l'ex-ministre de l'Agriculture Ivan Fuksa.

Sans vouloir se prononcer sur ces noms, le porte-parole de la brigade contre le crime organisé, Pavel Hantak, s'est borné à confirmer l'interpellation de «plusieurs personnes», ajoutant que des «interrogatoires et perquisitions» étaient en cours.

Huit personnes auraient déjà été mises en examen, mais aucune confirmation n'a pu être obtenue de la part des autorités.

Considérés comme contestataires de M. Necas au sein de l'ODS, MM. Tluchor et Fuksa, ainsi que l'ancien vice-ministre de la Santé Marek Snajdr, lui aussi membre de l'ODS, avaient démissionné de leurs postes de députés en novembre 2012, avant un vote crucial sur un ensemble de mesures fiscales pour 2013, assimilé à un vote de confiance pour l'exécutif.

Fermement opposés à cette série de mesures, ils ont à l'époque obtenu en échange de leur démission des postes importants au sein de l'administration publique.

M. Tluchor est «soupçonné de corruption», en rapport avec sa démission du poste de député, selon son avocat, Marek Nespala.