« Rajoy n'a qu'à nous trouver du travail chez Bankia », lance l'un des mineurs encagoulés qui bloquent une route près de Mieres, dans le nord de l'Espagne, pour la journée de grève générale dans les bassins miniers, en lutte depuis un mois pour leur survie.

Face à la mine de Santiago de Aller, où trois de ses collègues sont enfermés depuis 21 jours, Pelayo, 25 ans, dénonce l'aide publique de 23,5 milliards d'euros pour cette banque, au moment où le gouvernement vient d'annoncer une réduction de 63 % des aides au secteur, soit quelque 200 millions d'euros (environ 258 millions de dollars).

« 200 millions par rapport à 23 milliards c'est rien, alors que nous ça nous fait vivre ! », s'enflamme l'un de ses collègues, le bas du visage masqué par un bandana rouge.

Avec une cinquantaine d'autres mineurs, la plupart âgés de 20 à 30 ans, tous encagoulés, il vient d'arracher des rails de sécurité pour couper la route. Une barricade de bois est prête à être enflammée si la police vient les déloger. En grève depuis plus d'un mois, les mineurs espagnols ont déclaré le 30 mai que leur mouvement, émaillé de manifestations de plus en plus violentes, serait prolongé pour une « durée indéterminée ».

Plusieurs routes étaient coupées lundi dans les Asturies et les syndicats UGT et CCOO ont appelé à des rassemblements dans plusieurs autres régions minières du nord de l'Espagne.

Signe d'une tension croissante, La Garde civile a renforcé ses effectifs de 250 agents en Castille-et-Leon et dans les Asturies.

Car non loin de Mieres, des incidents vendredi ont fait sept blessés lorsque les forces de l'ordre sont intervenues pour rétablir la circulation, bloquée par des mineurs. De violents affrontements ont opposé les deux camps tout près de la mine de Pozo Soton près d'Oviedo dans les Asturies. Munis de lance-roquettes artisanaux et de lance-pierres, les grévistes ont tiré en direction des policiers espagnols.

« C'est la seule façon de faire pour que les politiques nous écoutent un peu. Si les mines ferment, tout ferme. Nous, on ira jusqu'au bout », martèle un jeune mineur de 24 ans, qui, comme les autres, préfère conserver l'anonymat sous sa cagoule.

« Nous sommes tous de familles minières. Ce que nos grands-parents et parents ont obtenu, ça a toujours été par la lutte », renchérit Cristina Fanjul, devant le puits où une pancarte proclame « pour notre passé, pour notre avenir, avec les mineurs pour toujours ».

Cette auxiliaire de gériatrie de 25 ans est venue, comme chaque jour, soutenir son petit ami qui fait partie des trois mineurs enfermés dans le puits.

« Je lui parle par le téléphone du puits, pour lui dire que dehors, tout le monde les soutient », dit-elle. « Je suis inquiète pour lui. C'est humide en bas, mais il se bat pour les autres. Il n'y a pas d'autre solution », assure-t-elle, ajoutant que deux autres mineurs ont dû remonter à cause de problèmes de santé.

Et la solidarité de la région, « elle est bien là », assure Moises Castanon, un électricien de 33 ans, descendu de sa voiture pour « patienter ». « Il faut que le gouvernement respecte les accords signés. Les mineurs, eux, ne s'arrêteront pas », assure ce fils de mineur.

En pleine restructuration depuis 20 ans, les mines de charbon espagnoles ont progressivement fermé. Une quarantaine sont encore en activité, principalement dans le nord, faisant vivre 8000 mineurs, et maintenant de 20 000 à 30 000 emplois indirects, selon les syndicats.

Au terme d'un conflit en septembre 2010, la Commission européenne avait accepté que le gouvernement espagnol oblige dix centrales électriques à produire 9 % de l'électricité consommée dans le pays à partir de charbon d'origine nationale.

En échange, l'Espagne s'était engagée, comme le reste des pays européens, à fermer progressivement les mines non rentables d'ici à fin 2014. Une date finalement repoussée par le Parlement européen à 2018.