Face à l'avalanche des scandales de pédophilie au sein du clergé, le Vatican a durci jeudi ses règles en la matière, introduisant des procédures accélérées pour les cas les plus urgents et augmentant de 10 ans la durée de la prescription.

Les nouvelles normes, qui assimilent également les abus sexuels sur des handicapés mentaux à la pédophilie et introduisent le délit de pédopornographie, ont été élaborées par Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF), présidée par le cardinal américain William Levada, et contresignées par le pape Benoît XVI.

Elles prévoient «des procédures accélérées pour régler les cas les plus urgents et graves», a expliqué le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi, lors d'un point de presse.

La procédure accélérée remplace la procédure judiciaire normale par un «décret extra judiciaire» ou permet de présenter au pape les cas les plus graves en vue de la réduction du prêtre à l'état laïc, a-t-il précisé.

Dans un souci d'efficacité, le texte prévoit aussi la possibilité de faire appel à des laïcs comme membres des tribunaux ecclésiastiques.

En revanche, les nouvelles procédures ne comprennent pas d'«ordre explicite» aux Eglises locales concernées de s'adresser à la justice civile. Mais le père Lombardi a rappelé que «toujours suivre les dispositions de la loi civile» était déjà inscrit dans les procédures publiées en avril sur le site du Vatican, dans un souci de transparence face à la multiplication des révélations et aux accusations d'«omerta».

Les règles portent par ailleurs la prescription des faits de dix à vingt ans après les 18 ans de la victime. La décision d'une levée complète de la prescription reste donc prise au cas par cas, alors que les scandales révélés ces derniers mois remontent souvent à plusieurs décennies.

Elles «assimilent l'abus sexuel sur des handicapés mentaux à celui sur des mineurs», et «introduisent le délit de pédopornographie», pour possession de matériel concernant des jeunes jusqu'à 14 ans.

Le SNAP, association américaine de victimes, a aussitôt jugé ces mesures insuffisantes, les résumant en quelques mots : «à côté de la plaque».

Ces normes actualisent un motu proprio (décret) de Jean Paul II publié en avril 2OO1 et alors complété par un texte de Joseph Ratzinger, qui a dirigé la Congrégation pour la doctrine de la Foi pendant près d'un quart de siècle avant son élection à la tête de l'Eglise catholique.

Le texte de Jean Paul II traitait des délits les plus graves contre la foi et concernait la pédophilie mais aussi les atteintes contre les sacrements de l'eucharistie et de la pénitence.

Dans ce volet, le Vatican a inscrit dans le document de jeudi, baptisé «normes sur les délits les plus graves», la tentative d'ordination de femmes, qui entraîne déjà l'excommunication automatique. Il aborde aussi «l'hérésie, l'apostasie et le schisme».

L'Eglise catholique est secouée depuis plusieurs mois par une avalanche de scandales pédophiles commis en son sein, tant en Amérique du Nord et du Sud qu'en Europe.

Benoît XVI, lui-même accusé d'avoir couvert des prêtres coupables lorsqu'il était évêque de Munich puis responsable de la CDF, a mis en oeuvre une opération propreté.

Il a accepté la démission de plusieurs évêques, dont quatre Irlandais. Il a également demandé «pardon» aux victimes et en a rencontré quelques unes lors d'un voyage à Malte.