Le gouvernement sortant de la Coalition avenir Québec a beau mener dans les sondages, des luttes serrées se dessinent dans bon nombre de circonscriptions. À Montréal, l’effondrement des appuis au Parti libéral du Québec pourrait entraîner la chute de plusieurs châteaux forts, tandis qu’en région, le Parti québécois joue son avenir. Québec solidaire parviendra-t-il à garder ses gains de 2018 et à en faire d’autres ? Le chef du Parti conservateur du Québec fera-t-il son entrée à l’Assemblée nationale ?
L’île de Montréal va-t-elle prendre des couleurs ?
Plusieurs circonscriptions de l’Île et de Laval historiquement favorables aux libéraux pourraient passer aux mains d’autres partis. Et l’offensive provient de toutes les directions, tant dans les quartiers centraux, où Québec solidaire (QS) fait une poussée, que dans les circonscriptions plus à l’est, que la Coalition avenir Québec (CAQ) tente de ravir. Les Québécois pourraient se réveiller le 4 octobre avec une métropole beaucoup plus colorée politiquement que ce qu’on a connu par le passé.
Maurice-Richard
Députée sortante : Marie Montpetit (indépendante, ex-PLQ), qui ne se représente pas
Majorité en 2018 : 530 voix
Alors que la circonscription avait été remportée en 2018 par l’ancienne députée libérale devenue indépendante Marie Montpetit, par une mince majorité de 530 voix, le Parti libéral du Québec (PLQ) ne serait même plus dans le coup, selon le modèle de Qc125. On s’attend plutôt à une lutte serrée dans ce secteur du nord de l’île de Montréal entre la candidate de la CAQ, l’avocate Audrey Murray, et le candidat de Québec solidaire, vice-président adjoint de la Banque de développement du Canada, Haroun Bouazzi. Reste à voir si les commentaires malheureux du ministre de l’Immigration sortant, Jean Boulet, la semaine dernière, feront pencher la balance en faveur de l’opposition dans cette circonscription où les immigrants et les membres des minorités visibles sont plus présents que dans le reste du Québec.
Camille-Laurin (anciennement Bourget)
Député sortant : Richard Campeau (Coalition avenir Québec)
Majorité en 2018 : 500 voix
Dans sa quête pour entrer à l’Assemblée nationale, le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a reçu un coup de main inattendu de la part de Québec solidaire. La candidate du parti de gauche, Marie-Ève Rancourt, s’est retirée après avoir été filmée en train de voler un dépliant de son adversaire dans une boîte aux lettres, ce qui devrait bénéficier au chef péquiste. Malgré tout, la lutte reste serrée. Le député caquiste sortant, Richard Campeau, le talonne dans cette circonscription du sud-est de Montréal où la CAQ l’avait emporté par une courte avance de 500 votes en 2018.
Saint-Henri–Sainte-Anne
Députée sortante : Dominique Anglade (Parti libéral du Québec)
Majorité en 2018 : 4424 voix
La cheffe libérale, Dominique Anglade, pourra-t-elle conserver ce château fort dans le giron du parti alors qu’elle se trouve au coude-à-coude avec QS et la CAQ ? Elle a déjà annoncé qu’elle resterait à la tête du Parti libéral du Québec (PLQ) peu importe le résultat de lundi soir, mais que restera-t-il de cet engagement si elle n’est pas élue dans sa propre circonscription ? Le co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, y a consacré plusieurs visites afin de donner un coup de pouce à son candidat, l’avocat Guillaume Cliche-Rivard.
Verdun
Députée sortante : Isabelle Melançon (PLQ)
Majorité en 2018 : 3597 voix
La lutte s’annonçait chaude dans Verdun, où QS avait terminé deuxième il y a quatre ans. La présidente du parti de gauche, Alejandra Zaga Mendez, tente de déloger la libérale Isabelle Melançon. La CAQ est aussi une menace très sérieuse pour la députée sortante : sa candidate est Véronique Tremblay, conseillère municipale dans Verdun et membre de l’équipe de la mairesse Valérie Plante. Il s’agit d’ailleurs d’une des rares circonscriptions que le premier ministre sortant, François Legault, a visitées à Montréal. À la veille du scrutin, les trois partis sont à égalité statistique selon le modèle de Qc125.
Des batailles qui s’annoncent serrées
La Coalition avenir Québec (CAQ) mène outrageusement dans les sondages à l’extérieur des grands centres urbains, mais la lutte pourrait être serrée dans certaines circonscriptions excentrées. C’est le cas notamment en Estrie, où Québec solidaire (QS) détient la circonscription de Sherbrooke et tente une percée dans celle de Saint-François. Dans le 450, le gouvernement sortant pourrait toutefois rafler les quelques circonscriptions qu’il ne détient pas déjà.
Le 450
Joliette
Députée sortante : Véronique Hivon (PQ), qui ne se représente pas
Majorité en 2018 : 4431 voix
Laporte
Députée sortante : Nicole Ménard (PLQ), qui ne se représente pas
Majorité en 2018 : 2479 voix
Les chefs ont consacré très peu de temps dans leur campagne respective à courtiser les électeurs des banlieues de Montréal, peut-être parce que la CAQ risque d’y faire table rase. Seules deux circonscriptions sont d’ailleurs susceptibles d’y changer de couleur, en faveur du gouvernement sortant : Laporte, sur la Rive-Sud, et Joliette, où le départ de la très aimée députée Véronique Hivon risque de coûter cher au Parti québécois (PQ), malgré plusieurs visites du chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon.
Hull
Députée sortante : Maryse Gaudreault (PLQ)
Majorité en 2018 : 2281 voix
Qui eût cru, au début de cette campagne, que la circonscription de Hull, libérale depuis 1956 à l’exception d’un bref intermède du PQ, puisse être en jeu ? Pourtant, c’est bien le cas, alors que les candidats de la CAQ et de QS soufflent dans le cou de la députée sortante Maryse Gaudreault. Si le PLQ perd cette circonscription, qui englobe une partie du centre-ville de Gatineau, le député de Pontiac, André Fortin, deviendrait donc le seul représentant de la formation politique en Outaouais, une région où elle dominait pourtant autrefois.
La bataille de l’Estrie
Sherbrooke
Députée sortante : Christine Labrie (QS)
Majorité en 2018 : 3450 voix
Saint-François
Députée sortante : Geneviève Hébert (CAQ)
Majorité en 2018 : 4450 voix
La nuit électorale risque d’être longue à Sherbrooke. La question du vote sur les campus a divisé la principale ville de l’Estrie alors que la candidate de la CAQ et ex-mairesse de Longueuil, Caroline St-Hilaire, a reproché à de nombreuses reprises à son adversaire solidaire, la députée sortante Christine Labrie, d’encourager des manœuvres électorales frauduleuses. Dans la circonscription voisine de Saint-François, la caquiste Geneviève Hébert espère retenir son siège devant la montée de QS qui y présentait une candidate très connue localement, l’ancienne directrice de la santé publique de l’Estrie Mélissa Généreux.
Une mer bleu poudre tachetée de foncé ?
Convertie presque entièrement au bleu poudre de la Coalition avenir Québec (CAQ) aux dernières élections, la grande région de Québec risque encore une fois d’être remportée en grande partie par le gouvernement sortant, à l’exception des deux circonscriptions solidaires du centre-ville de Québec. Le Parti conservateur du Québec (PCQ) y fonde tout de même de grands espoirs, notamment d’y faire élire son chef, Éric Duhaime, dans la circonscription de Chauveau, où de récents sondages placent malgré tout le député caquiste sortant, Sylvain Lévesque, en tête. Mais les quelques endroits où les luttes sont serrées se trouvent à être des courses à deux, ce qui désavantage le PCQ.
Jean-Lesage
Député sortant : Sol Zanetti (QS)
Majorité en 2018 : 699 voix
Tout comme en 2018, lorsque le solidaire Sol Zanetti l’avait emporté par une mince avance de 699 votes, la soirée s’annonce longue dans Jean-Lesage, où QS espère répéter son exploit. Le parti de gauche y est toujours projeté en avance, mais la candidate de la CAQ, Christiane Gamache, le suit de près, selon le modèle de Qc125. Si, comme plusieurs le prédisent, le vote libéral s’effondre, reste à savoir vers quel parti se tourneront ses supporteurs. Le PCQ pourrait également brouiller les cartes.
La Beauce
Beauce-Nord
Député sortant : Luc Provençal (CAQ)
Majorité en 2018 : 15 310 voix
Beauce-Sud
Député sortant : Samuel Poulin (CAQ)
Majorité en 2018 : 13 978 voix
La grande région de Québec sera-t-elle la porte d’entrée du Parti conservateur du Québec à l’Assemblée nationale ? Outre la circonscription de Chauveau, où le chef conservateur Éric Duhaime tente de déloger le député caquiste sortant Sylvain Lévesque, le parti se retrouve dans une course serrée en Beauce. Tant dans Beauce-Nord que dans Beauce-Sud, le PCQ chauffe la CAQ et pourrait y faire des percées. Éric Duhaime réussira-t-il là où Maxime Bernier et son Parti populaire du Canada ont échoué ? Les Beaucerons risquent de se coucher tard ce lundi.
Chauveau
Député sortant : Sylvain Lévesque (CAQ)
Majorité en 2018 : 9627 voix
Le PCQ fonde beaucoup d’espoir sur cette circonscription de la banlieue nord de Québec où son chef, Éric Duhaime, a choisi de se présenter. C’est là que le parti comptait le plus grand nombre de membres avant que ce dernier prenne la tête du parti. C’est aussi là que son prédécesseur, Adrien Pouliot, se présentait. Or, le chef conservateur tire de l’arrière face au député sortant, Sylvain Lévesque. Celui-ci récolte 42,7 % des intentions de vote, contre à 34,6 % pour M. Duhaime, révélait un sondage de la Segma publié la semaine dernière.
Le PQ joue son avenir en région
Loin des grands centres urbains, des luttes régionales se dessinent, particulièrement dans l’est du Québec où le Parti québécois (PQ) joue son avenir en Gaspésie et sur la Côte-Nord.
L’est du Québec
Gaspé
Députée sortante : Méganne Perry Mélançon (PQ)
Majorité en 2018 : 41 voix
Îles-de-la-Madeleine
Député sortant : Joël Arseneau (PQ)
Majorité en 2018 : 15 voix
Bonaventure
Député sortant : Sylvain Roy (ex-PQ, indépendant), qui ne se représente pas
Majorité en 2018 : 2830 voix
Grâce à une remontée tardive, mais marquée, dans les sondages, le PQ peut espérer l’emporter dans quelques-unes de ces circonscriptions qu’il avait réussi à conserver malgré la défaite historique encaissée par son ancien chef, Jean-François Lisée, en 2018. Dans Bonaventure, le parti fonde de grands espoirs dans l’élection de l’avocat Alexis Deschênes. Dans Gaspé et les Îles-de-la-Madeleine, deux circonscriptions remportées par de faibles avances, les députés sortants Méganne Perry Mélançon et Joël Arseneau sont à égalité statistique avec leurs adversaires de la Coalition avenir Québec (CAQ), selon le modèle de l’agrégateur de sondages Qc125. Malgré plusieurs visites de Gabriel Nadeau-Dubois et de Paul St-Pierre Plamondon dans Rimouski, la candidate de la CAQ et ex-mairesse de Sainte-Luce, Maïté Blanchette Vézina, semble aussi y mener la course face à ses adversaires.
La Côte-Nord
René-Lévesque
Député sortant : Martin Ouellet (PQ), qui ne se représente pas
Majorité en 2018 : 1623 voix
Duplessis
Députée sortante : Lorraine Richard (PQ), qui ne se représente pas
Majorité en 2018 : 127 voix
Les départs des deux députés péquistes sortants de la Côte-Nord, Martin Ouellet et Lorraine Richard, pourraient bien faire mal à la formation politique dans cette région autrefois considérée comme un château fort du PQ. La CAQ est donnée en avance dans ces deux circonscriptions. Dans René-Lévesque, l’élection provinciale pourrait bien être suivie d’une autre, municipale cette fois, alors que le maire de Baie-Comeau, Yves Montigny, qui représente la CAQ, tente de ravir la circonscription face à l’adjoint de la députée fédérale du coin, le péquiste Jeff Dufour Tremblay. Dans Duplessis, les électeurs pourraient porter au pouvoir la première femme autochtone de l’histoire du Québec, en la personne de la caquiste Kateri Champagne Jourdain.
Ungava
Député sortant : Denis Lamothe (CAQ)
Majorité en 2018 : 46 voix
La CAQ avait arraché la circonscription en 2018 à l’issue d’une lutte à trois contre le Parti libéral et le Parti québécois. Or, le candidat sortant Denis Lamothe a à peine fait campagne en raison d’enjeux familiaux, tandis que Québec solidaire place ses espoirs dans la candidature de l’autrice crie Maïtée Labrecque-Saganash, fille de l’ancien député fédéral Romeo Saguanash. Pour sa part, le PLQ a recruté l’ex-maire de Kuujjuaq, Tunu Napartuk, qui a reçu un coup de pouce inespéré de sa cheffe en cette fin de campagne alors que Dominique Anglade a choisi de lui rendre visite. Elle est donc la seule cheffe à avoir fait acte de présence dans le Grand Nord du Québec durant cette élection.
Rouyn-Noranda–Témiscamingue
Députée sortante : Émilise Lessard-Therrien (QS)
Majorité en 2018 : 506 voix
La députée solidaire sortante Émilise Lessard-Therrien réussira-t-elle à conserver les gains de son parti en Abitibi-Témiscamingue ? Rien n’est moins sûr alors que le candidat caquiste et ancien député libéral sous Jean Charest, Daniel Bernard, est projeté en tête par le modèle de Qc125. Le dérapage de François Legault lors d’une entrevue à une station de radio locale en toute fin de campagne pourrait-il faire pencher la balance en faveur des solidaires ? Le lendemain du 3 octobre s’annonce pour être le début d’un nouveau chapitre dans la controverse entourant la Fonderie Horne, alors que le premier ministre sortant a ouvert la porte à la tenue d’un référendum local pour laisser la population décider de l’avenir de l’usine.