(Grande-Rivière et Fatima) À deux jours du scrutin, Dominique Anglade a fait le choix étonnant de faire campagne dans Gaspé et Îles-de-la-Madeleine. Deux anciennes circonscriptions rouges où des luttes à deux se profilent, mais entre le Parti québécois et la Coalition avenir Québec.

Après avoir concentré ses efforts dans le Grand Montréal où plusieurs forteresses libérales sont menacées, Dominique Anglade a choisi de finir la campagne à l’offensive en visitant les circonscriptions de Gaspé, des Îles-de-la-Madeleine et d’Ungava, samedi et dimanche. « [Le message qu’on veut lancer, c’est qu’]on est partout au Québec, on est capables de porter cette voix [libérale] partout », a lancé la cheffe avant son départ.

Accompagnée de son équipe de candidats du Grand Montréal, la leader libérale a voulu faire une démonstration de force avant de s’envoler pour la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine, samedi. Elle a lancé un appel au vote en opposant une nouvelle fois son style à celui de François Legault. « Je vais vous dire franchement, ça n’a même plus l’air de lui tenter », a-t-elle décoché envers le chef caquiste.

« Il a l’air tanné de faire ça, il n’a pas l’air de vouloir répondre aux questions ; moi, j’ai répondu à toutes vos questions, on a fait des townhalls [assemblées de cuisine]… Honnêtement, on a pris des risques, on a fait des bains de foule, on a pris de vraies questions, là, pas des questions plantées, parce qu’on n’a pas peur. La job, elle nous tente ! », a-t-elle ajouté dans une envolée particulièrement sentie.

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

Dominique Anglade

« On regarde vers l’avant en Gaspésie »

La partie est loin d’être gagnée pour les libéraux de Dominique Anglade en Gaspésie, où les luttes traditionnelles entre les rouges et les bleus font place cette année à un duel CAQ-PQ. Selon le site de projections Qc125, de chauds affrontements se préparent entre la Coalition avenir Québec et le Parti québécois, qui défend ses derniers bastions.

En 2018, les libéraux avaient bien failli l’emporter dans Gaspé en terminant derrière Méganne Perry Mélançon (PQ), qui a obtenu une majorité de 41 voix seulement. Le scénario a été semblable aux Îles-de-la-Madeleine, où Joël Arseneault a battu son adversaire libéral avec 15 voix seulement. Quatre ans après la défaite du gouvernement Couillard, les troupes libérales sont encore en reconstruction en Gaspésie.

« [C’est] moins fort », admet le militant Pierre Pelletier, rencontré à Grande-Rivière samedi.

Les libéraux sont en dormance pour la pure et simple raison que pendant des années, on a traité les libéraux de magouilleurs, de voleurs… Nathalie Normandeau, c’était la nôtre, ça, les gens étaient comme gênés de dire qu’ils restaient des libéraux, et là, ça se réveille.

Pierre Pelletier, militant libéral

Nathalie Normandeau, ex-ministre libérale et ex-députée de Bonaventure, avait à l’époque été éclaboussée par la commission Charbonneau sur l’attribution de contrats publics dans l’industrie de la construction. « C’est le passé », estime maintenant M. Pelletier.

La marque libérale porte-t-elle encore des cicatrices de cette sombre époque pour le parti ? « Je pense qu’on est rendu ailleurs, on regarde vers l’avant en Gaspésie », a résumé brièvement Dominique Anglade, en compagnie de ses candidats Michel Marin (Gaspé) et Christian Cyr (Bonaventure). Ces deux candidatures ont été confirmées une fois les élections déclenchées, début septembre.

« Deux, trois semaines de plus pour moi, comme candidat dans le comté de Gaspé, ça aurait fait une différence significative », a soutenu Michel Marin en mêlée de presse. De l’avis de plusieurs, les deux dernières semaines de campagne ont été meilleures pour Dominique Anglade. « Elle contribue significativement à rebâtir, à redonner confiance aux libéraux », ajoute M. Marin.

Legault a « ignoré » les Madelinots

À Fatima, l’ex-député libéral des Îles-de-la-Madeleine, Germain Chevarie, déplore que François Legault ait « ignoré » les Madelinots pendant quatre ans. « Il est venu dernièrement suite à l’ouragan Fiona et il était venu il y a quelques semaines, avant la campagne. Alors on va dire qu’il n’a pas tellement porté attention à l’archipel des Îles-de-la-Madeleine », a exprimé M. Chevarie.

Aux Îles, une lutte à deux se profile entre le maire Jonathan Lapierre, qui défend la bannière de la CAQ, et le député sortant du PQ, Joël Arseneau. « Ça crée une dynamique spéciale que, moi, je ne trouve pas très saine », dit le candidat libéral Gil Thériault. « Je pense que les gens sur le terrain voient ça, j’ai l’impression qu’il y a des gens qui se disent que ça serait bien d’élire quelqu’un qui veut travailler avec tout le monde. »

Selon M. Chevarie, il ne faut pas sous-estimer le vote libéral aux Îles-de-la-Madeleine, qui est « plus secret et qui a tendance à ne pas s’afficher dans les médias ». Depuis des années, libéraux et péquistes s’échangent le pouvoir aux Îles-de-la-Madeleine.