(Québec) La distorsion du mode de scrutin qui pourrait priver le Parti conservateur du Québec d’élus à l’Assemblée nationale malgré un appui populaire non négligeable choque le chef du Parti québécois, qui prend la défense d’Éric Duhaime. Des voix qui ne sont pas entendues au Parlement risquent d’affecter le tissu social et de provoquer des manifestations, croit Paul St-Pierre Plamondon.

« J’ai très, très peu en commun avec les conservateurs sur le plan des idées. Mais je pense que si un parti obtient 15 % dans les sondages, il mérite d’être entendu à l’Assemblée nationale. Il mérite un espace. Sinon, ce n’est pas légitime. Même quand on n’est pas d’accord, un parti qui représente la voix de plusieurs citoyens doit être entendu et obtenir son espace à l’Assemblée nationale », a estimé M. St-Pierre Plamondon lors d’une conférence de presse à Québec.

« Il y a un vieux dicton qui dit que si des voix ne se font pas entendre dans le Parlement, là où les choses se décident, elles se font souvent entendre dans la rue », a-t-il ajouté.

Le système électoral uninominal à un tour a tendance à favoriser le parti en avance, et avec la multiplication des partis de l’opposition, la Coalition avenir Québec pourrait théoriquement obtenir un appui populaire moins important qu’en 2018, mais faire élire davantage de députés.

Paul St-Pierre Plamondon en veut d’ailleurs à François Legault d’avoir renoncé à sa promesse de réformer le mode de scrutin pour y introduire un élément de proportionnalité et réduire cette distorsion. « On est tous en train de discuter du mode de scrutin qui pose problème. La population le sait. François Legault a affirmé que c’était un débat d’intellectuels qui n’intéresse personne. C’est un manque de respect pour l’intelligence des gens », a-t-il dénoncé.

Et M. St-Pierre Plamondon s’inquiète davantage de la démobilisation que du « soulèvement ». « Ce que je crains le plus, moi, ce sont des taux de participation, comme en Ontario, de 43 %. Ce n’est plus une démocratie. […] [Avec] le potentiel d’avoir des voix qui ne se font pas entendre alors qu’elles existent dans la société, l’enjeu principal, c’est la démobilisation. Les gens qui n’écoutent plus ne participent plus. C’est très mauvais pour le tissu social parce que ce sont des gens qui ne s’écoutent plus », a-t-il dit.

Le chef du Parti conservateur du Québec a qualifié l’intervention de son rival de « très classe ». « C’est très rare qu’un adversaire politique souhaite la victoire d’un de ses opposants, a-t-il fait remarquer. Je pense que ça l’honore dans le contexte actuel. » Il s’inquiète de ne pas faire élire de député alors qu’il pourrait récolter de 15 à 20 % du vote. Éric Duhaime dénonce depuis samedi l’abandon de la réforme du mode de scrutin par le gouvernement caquiste.

Avec Mylène Crête, La Presse