Tout au long de la campagne, La Presse visite des circonscriptions où rien n’est joué, à la rencontre des électeurs, des candidats, et des enjeux qui leur tiennent à cœur. Aujourd’hui : Maurice-Richard.

« Il se passe quelque chose dans Maurice-Richard. » Cette phrase, on l’entend souvent dans cette circonscription du nord-est de Montréal, où la députée Marie Montpetit, expulsée du caucus libéral en novembre, ne se représentera pas. Une lutte à plusieurs semble cette fois s’y dessiner, avec les solidaires et les caquistes au sommet. Mais les libéraux et les péquistes ne s’avouent pas vaincus pour autant.

« On a perdu par moins de 1 %, la dernière fois. Et on était déjà en pleine croissance. Cette fois, on voit bien que la réponse est ultrapositive. On est vraiment là pour gagner », lance le candidat de Québec solidaire Haroun Bouazzi, qui est vice-président adjoint en architecture d’entreprise et de solutions de la Banque de développement du Canada (BDC).

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Haroun Bouazzi, candidat solidaire dans Maurice-Richard

Le retrait de la vie politique de Marie Montpetit, exclue en novembre du caucus libéral dans la foulée d’allégations de harcèlement, lui donne espoir de faire entrer « l’orange » pour de bon cette fois.

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Marie Montpetit, députée sortante de Maurice-Richard

Dans cette circonscription souvent baromètre, on s’est plutôt traditionnellement échangé les députés libéraux et péquistes au fil du temps. « On sent un sentiment d’urgence d’essayer de nouvelles choses », évoque M. Bouazzi.

Face à lui, on trouve l’avocate et ex-présidente de la Commission des partenaires du marché du travail Audrey Murray, qui se présente pour la Coalition avenir Québec (CAQ). Elle se dit touchée par la « maturité politique » avec laquelle les électeurs de Maurice-Richard votent.

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Audrey Murray, candidate caquiste dans Maurice-Richard

Ici, les gens votent pour la personne avant le parti. Et oui, il y a une reconfiguration qui est en marche. Ça amène une ouverture à voir autre chose.

Audrey Murray, candidate caquiste dans Maurice-Richard

« J’arrive avec un bagage et une démonstration que j’ai livré la marchandise dans mes emplois antérieurs. Mon comté, je pense, a envie d’être du côté du gouvernement, parce qu’on a des choses importantes à faire. Je ne suis pas idéologique, je suis capable d’écouter, d’avoir des solutions réalistes », dit Mme Murray.

« Combattre le cynisme »

Chez les libéraux, c’est le jeune Jonathan Marleau qui tentera de conserver le siège de Marie Montpetit. Impliqué depuis 10 ans en politique, notamment auprès des jeunes libéraux, le principal intéressé veut « tout faire pour combattre le cynisme ».

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Jonathan Marleau (à droite), candidat libéral dans Maurice-Richard, et un électeur de la circonscription

Le public a trop souvent l’impression qu’un député, il est élu, puis on ne le revoit plus. Moi, je m’engage à tenir une assemblée citoyenne chaque mois, pour rester connecté sur les besoins d’ici. Les engagements que je prends, ils viendront des gens.

Jonathan Marleau, candidat libéral dans Maurice-Richard

Sur son site, M. Marleau donnera d’ailleurs son numéro personnel, afin que chaque électeur puisse le joindre. « Ça fait un flux d’appels important, dit-il en rigolant. Mais en même temps, je tiens à être accessible. Je veux montrer que la politique, ce n’est pas obligé d’être fait derrière des portes closes. Quand les gens sentent qu’ils ont leur place, ils sont plus investis », dit-il.

Avec les péquistes, l’ex-commissaire scolaire Chantal Jorg tente sa chance cette année. Celle qui a aussi été présidente du parti Coalition Montréal en 2013 n’en est pas à ses débuts en politique. « Maurice-Richard, c’est un bastion péquiste d’abord. Et je pense qu’au fond, il l’est toujours », affirme-t-elle en entrevue.

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Chantal Jorg, candidate péquiste dans Maurice-Richard, et Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois

« Tout est possible pour le Parti québécois, ajoute-t-elle. On sent que la place est vide, qu’il y a beaucoup d’indécis. On va être très présents jusqu’à la fin. »

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Louise Sexton est la candidate conservatrice dans Maurice-Richard.

Le Parti conservateur d’Éric Duhaime, enfin, présente Louise Sexton, adjointe à la direction du CRC Maison Essor, une maison de transition pour hommes judiciarisés de statut fédéral.

Quel avenir pour Sophie-Barat ?

Un enjeu revient cette année sur toutes les lèvres : la rénovation et l’agrandissement de l’école Sophie-Barat, dont l’état de décrépitude ne fait plus de doute. Une partie du bâtiment principal a même été condamnée en 2020 en raison de risques d’effondrement, ce qui a forcé de nombreux élèves à suivre leurs cours dans un autre bâtiment. « Il y a eu un laisser-aller terrible depuis plus d’une décennie, estime M. Bouazzi, candidat solidaire. Les gouvernements ont laissé pourrir ce joyau. Nous, on va s’assurer de l’imputabilité des personnes qui seront responsables de corriger la situation. »

« Ma priorité numéro 1, ça sera de la rénover. Et pendant qu’on la rénove, d’offrir des mesures d’atténuation significatives en marge du gros chantier. Je veux aussi mener une évaluation rapidement pour ouvrir une deuxième école secondaire », explique quant à elle Audrey Murray.

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L’école secondaire Sophie-Barat, boulevard Gouin

Les péquistes, eux, comptent justement sur une ancienne commissaire scolaire en la personne de Chantal Jorg. « Des écoles dans le quartier, j’ai contribué à en agrandir plusieurs. En fait, il nous restait Sophie-Barat, sauf que les commissions scolaires ont été abolies avant. On avait presque tous les sous. Ce qu’on a vécu, c’est de la violence politique », dénonce-t-elle. Elle promet, si elle est élue, d’utiliser tous les « leviers » dont elle dispose pour « relancer le projet » rapidement.

« C’est déplorable qu’on ait une seule école secondaire publique dans le quartier. En ce moment, il y a des parents qui doivent choisir entre le public et le privé, juste parce qu’il y a une question d’espace. Ce n’est pas normal », évoque quant à lui M. Marleau.