À deux semaines du scrutin, la leader libérale Dominique Anglade en appelle au vote stratégique pour « bloquer » le chef caquiste. Paul St-Pierre Plamondon et Gabriel Nadeau-Dubois rejettent de leur côté tout appel au vote stratégique.

Dominique Anglade a fait une chose étonnante mardi : elle a commenté le dernier sondage Léger, qui place François Legault loin devant avec 38 % des intentions de vote. « Je vais faire quelque chose que les politiciens ne font jamais : je vais commenter les sondages », a-t-elle lancé d’emblée lors d’une entrevue sur les ondes de WKND 99,5 FM.

« Ce qui me marque, c’est que tu as 62 % des Québécois qui ne veulent pas François Legault comme premier ministre. 62 %, c’est énorme. La raison pour laquelle c’est comme ça, c’est parce qu’on est tous divisés. Ce que j’aimerais voir, c’est qu’on soit capable de se rassembler et de bloquer François Legault », a poursuivi la cheffe du Parti libéral du Québec (PLQ).

La Coalition avenir Québec (CAQ) obtient 38 % dans les intentions de vote, selon le sondage Léger publié mardi dans les médias de Québecor. Le PLQ, Québec solidaire et le Parti conservateur du Québec sont pour une première fois tous à égalité à 16 %. Le Parti québécois ferme la marche avec 13 % des intentions de vote. L’exercice a été mené du 16 au 18 septembre, après le Face-à-Face de TVA.

En mêlée de presse, Mme Anglade a même ouvert la porte à réformer le mode de scrutin si elle prend le pouvoir le 3 octobre. « Je pense que ce sont des choses à considérer dans le contexte actuel parce qu’on voit les distorsions qui sont réelles », a-t-elle dit. En 2018, les chefs des partis, incluant François Legault, s’étaient engagés à réformer le mode de scrutin pendant que les libéraux de Philippe Couillard gouvernaient.

La cote de St-Pierre Plamondon à la hausse

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Paul St-Pierre Plamondon

Le chef péquiste voit de son côté sa cote de popularité augmenter. À la question « Quel chef actuel de l’opposition préférez-vous ? », 21 % ont répondu Paul St-Pierre Plamondon, un bond de 9 points de pourcentage depuis le début de la campagne électorale. Il a profité du débat pour voir son parti se rapprocher du peloton des partis d’opposition, ce qui est tout de même en deçà de son résultat aux élections générales de 2018 (17 %, 10 députés).

M. St-Pierre Plamondon rejette complètement la notion de vote stratégique. « Je ne suis pas dans ce registre. […] On mène la campagne qu’on voulait mener, authentique, sur les sujets qui sont essentiels pour l’avenir. On parle du français ce matin, l’environnement, les changements climatiques, la dignité des aînés, le droit des Québécois de décider par eux-mêmes. On ne changera pas d’un pouce notre campagne. », a-t-il dit.

Considère-t-il que dans les régions du Québec, le Parti québécois se trouve à être dans une lutte à deux avec la CAQ ? « On demeure humbles. On vous dit qu’on va continuer à mener une campagne de qualité, et on laisse ça entre les mains des gens. Si des analystes veulent déterminer si ce sont des luttes à cinq, trois, deux, ça appartient aux analystes », a-t-il dit.

Se rassembler autour du PLQ

Mais Dominique Anglade, elle, affirme que « grosso modo », l’aiguille des intentions de vote « ne bouge pas » tellement ni pour elle ni pour ses adversaires des partis d’opposition. La cheffe libérale en appelle au vote stratégique à deux semaines du scrutin du 3 octobre. « Est-ce qu’on a besoin de se rassembler autour du Parti libéral ? », a demandé l’animatrice Mélanie Maynard. « Ben, pourquoi pas ? », a répondu la cheffe libérale.

« Ça n’a pas de bon sens de voir ça. [La CAQ] va se retrouver avec un nombre de sièges énorme », a-t-elle ajouté. Selon le site de projections Qc125, un gouvernement caquiste au 3 octobre pourrait gagner près d’une centaine de sièges sur 125. « Il faut qu’on se réveille, il faut qu’on se réveille », a lancé la cheffe libérale.

On a besoin de se rassembler pour bloquer François Legault, c’est le message que j’envoie.

Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec

« Il faut qu’on se rassemble. Moi, je n’arrête pas de dire qu’il faut se rassembler et ce que j’offre aux Québécois et à tous ceux qui nous écoutent, c’est de rassembler le monde. Rassembler, d’avoir un leadership qui va faire qu’on va collaborer, qu’on va avoir des discussions », a-t-elle fait valoir, invitant les Québécois à choisir son option politique.

Nadeau-Dubois invite à voter QS

PHOTO PATRICE LAROCHE, LE SOLEIL

Gabriel Nadeau-Dubois

Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a pour sa part affirmé mardi que son adversaire libérale « va vite en affaires ».

« Il reste un débat encore jeudi, il reste deux semaines de campagnes, bien des choses sont encore possibles. Nous, on va continuer à faire campagne et parler de notre projet de société », a-t-il dit mardi lors d’un point de presse dans Viau, à Montréal, une circonscription actuellement détenue par le Parti libéral.

M. Nadeau-Dubois a ajouté : « Les appels au vote stratégique, on regardera ça la veille de l’élection. Là, c’est le temps de parler de notre projet pour les Québécois. »

À ses yeux, un rapprochement stratégique entre le Parti québécois et Québec solidaire est également impossible. La question lui a d’ailleurs été posée lundi, lors d’une assemblée publique, alors qu’un militant s’inquiétait de voir les deux partis indépendantistes se séparer des votes.

« Moi, j’invite les gens à voter pour Québec solidaire dans les 125 circonscriptions. Ça tombe bien, on a 125 candidats, nous autres », a-t-il dit, rappelant ainsi que les libéraux n’ont pas de candidat dans la circonscription de Matane-Matapédia.

De son côté, le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime estime qu’il est trop tôt. « Je ne pense pas qu’on en est rendu là. Il reste 13 jours de campagne. On va voir comment ça va évoluer », a-t-il dit. « On est dans des luttes serrées [avec la CAQ] et souvent les libéraux ne sont pas très présents dans les circonscriptions », a-t-il décoché.

De son côté, François Legault « aime bien [la] position » dans laquelle il se trouve dans les sondages. « Je ne l’échangerais pas avec personne d’autre. Maintenant, on ne prend rien pour acquis. On continue de travailler fort. Et c’est la première fois que je me retrouve dans une situation où j’ai quatre chefs de parti qui s’attaquent à moi en même temps. Donc, quand même ! », a affirmé le chef caquiste lors d’une conférence de presse à Orford.

Avec Mylène Crête et Tommy Chouinard, La Presse