Une équipe de journalistes de La Presse a vérifié pour vous les déclarations des chefs pendant ce premier débat de la campagne

Les affirmations de François Legault

« Il y a de moins en moins de Québécois qui parlent français. »

Faux. Il faut faire la distinction entre nombre de locuteurs et proportion de la population. En nombres absolus, il y a plus de Québécois aujourd’hui qu’en 2016 qui disent pouvoir parler français. Le nombre de francophones est passé de 7,6 millions à 7,9 millions, selon le plus récent recensement. Mais la proportion de francophones, elle, est en baisse. Elle est passée de 94,5 % à 93,7 % de 2016 à 2021 au Québec.

Judith Lachapelle, La Presse

« Quand on est arrivés, il n’y avait même pas d’inventaire des écoles qui sont en bon état et en mauvais état. On a doublé le budget de la rénovation des écoles et il y a encore 59 % du travail à faire. »

Faux. Selon les Plans annuels de gestion des investissements publics en infrastructures 2022-2023 du gouvernement, 59 % des écoles préscolaires et primaires sont effectivement en mauvais état. Mais ce genre de données n’est pas une nouveauté. Au printemps 2018, la Coalition avenir Québec affirmait sur le site du parti qu’« une école sur deux au Québec est dans un mauvais ou très mauvais état ». Le député Jean-François Roberge, alors porte-parole en matière d’éducation, dénonçait le fait qu’« un élève sur deux étudie dans une école vétuste aujourd’hui », en s’appuyant sur le Plan québécois des infrastructures.

Ariane Krol, La Presse

Les affirmations de Dominique Anglade

PHOTO PAUL CHIASSON, LA PRESSE CANADIENNE

Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec

« En 2018, il y avait 400 000 personnes qui attendaient d’avoir un médecin de famille, et aujourd’hui c’est plus d’un million. »

Faux. Selon les données du ministère de la Santé et des Services sociaux, le nombre de patients sur la liste d’attente du Guichet d’accès à un médecin de famille était effectivement de 1 088 945 personnes le 30 juin dernier. Par contre, selon le plus récent relevé du Ministère, au 31 août, la liste était repassée sous la barre du million, à 849 184 personnes. Le guichet comptait bel et bien 407 236 personnes au début de 2018, mais ce chiffre avait grimpé à 474 187 juste avant la fin du mandat du gouvernement Couillard en septembre.

Ariane Krol, La Presse

« Il y a une augmentation de 30 % du décrochage scolaire. »

Vrai. Selon une enquête menée par Le Journal de Québec, le taux de décrochage scolaire au Québec au cours des deux dernières années a augmenté de 30 %. Le nombre d’abandons a augmenté de 29 % entre 2019 et 2022, selon l’enquête. Les résultats relèvent toutefois de chiffres préliminaires obtenus à la suite d’une demande d’accès à l’information auprès de 72 centres de services scolaires. Le ministère de l’Éducation a observé une légère amélioration entre les années scolaires 2018-2019 et 2019-2020, le taux de décrochage scolaire étant passé de 14,2 % à 13,5 % après avoir augmenté au cours des trois années précédentes.

Delphine Belzile, La Presse

Les affirmations de Gabriel Nadeau-Dubois

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Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire

« À Montréal, un appel sur trois au 911, c’est pour une situation de santé mentale. »

Faux. Selon les statistiques du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), 8 % des appels au 911 concernent directement une personne en crise ou dont l’état mental est perturbé. En 2021, plus de 1,4 million d’appels ont été traités par le centre d’urgence 911. De ce nombre, le SPVM estime qu’un peu plus de 425 000 ont nécessité l’intervention des policiers, qui répondent annuellement à plus de 33 000 appels concernant la santé mentale. Toutefois, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, affirmait récemment sur Twitter que la santé mentale était à l’origine de 30 % des appels aux services d’urgence.

Léa Carrier, La Presse

« Depuis 1990, le nombre de véhicules ultrapolluants a triplé sur les routes du Québec. »

Vrai. La consommation moyenne des camions légers a peut-être diminué au cours des trois dernières décennies, mais on en retrouve beaucoup plus sur les routes de la province, alors que le nombre de voitures diminue. Selon le rapport État de l’énergie au Québec – Édition 2022, réalisé par la Chaire de gestion de l’énergie de HEC Montréal, le nombre de ventes de camions a plus que triplé au Québec depuis 1990. Les ventes de camions ont surpassé les ventes de voitures il y a six ans. Le document n’offre pas de définition d’un véhicule « ultrapolluant », mais les émissions des camions sont supérieures à celles d’un plus petit véhicule.

Julien Arsenault, La Presse

Les affirmations de Paul St-Pierre Plamondon

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Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois

« C’est inacceptable, c’est gênant d’avoir 50 000 enfants sur la liste d’attente [pour une place en CPE]. »

Faux. Il y avait 52 000 enfants inscrits au guichet provincial d’accès aux services de garde jusqu’à tout récemment, mais 18 000 enfants ont été retirés de la liste d’attente. Cela ne veut pas dire que ces enfants ont trouvé une place en garderie : Québec a changé sa façon de comptabiliser les inscriptions, en tenant compte des enfants qui n’ont pas besoin d’être placés de façon urgente. L’ancienne méthode de calcul surestimait le nombre des enfants en attente et incluait beaucoup d’enfants de moins de 9 mois, a indiqué le ministère de l’Éducation à Radio-Canada.

Léa Carrier, La Presse

« Il y a un surplus de 6 milliards généré par l’inflation dans les coffres de l’État. »

Faux. L’inflation a poussé à la hausse les revenus de taxes et d’impôt, selon le rapport préélectoral du ministère des Finances, mais l’impact positif est estimé à 4,7 milliards pour l’exercice qui se terminera le 31 mars prochain. Le chiffre évoqué par le chef péquiste est une prévision pour 2024-2025 du rapport. Rien n’indique que ce scénario se matérialisera. Le rapport préélectoral prévient à plus d’une reprise que la situation économique de la province pourrait se détériorer en raison d’une multitude de risques, comme une récession et l’inflation galopante.

Julien Arsenault, La Presse

Les affirmations d’Éric Duhaime

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Éric Duhaime, chef du Parti conservateur du Québec

« Alors que présentement l’Allemagne se demande comment ils vont chauffer cet hiver, on aurait l’opportunité au Québec, au lieu d’avoir du transfert des centrales présentement en Allemagne qui vont fonctionner au charbon, d’envoyer du gaz, de réduire la charge environnementale de 60 %. »

Faux. Même si la demande de gaz naturel liquéfié a grimpé depuis le début de l’année, la construction d’un terminal gazier et des gazoducs nécessaires à son transport (comme le projet Énergie Saguenay, du promoteur GNL-Québec) prendrait trop de temps pour qu’on puisse répondre aux besoins pressants des Européens, qui ont besoin de gaz à très court terme. Le temps de construire ces nouvelles infrastructures, les experts s’attendent à ce que la demande des marchés européens soit en déclin en raison de la croissance des énergies renouvelables. Par ailleurs, Énergie Saguenay a estimé que 60 % de son GNL aurait servi « au remplacement de sources d’énergie plus polluantes comme le charbon et le pétrole en Asie et en Europe ».

Judith Lachapelle, La Presse

« Vous savez qu’on a eu plus de morts [dues à la COVID-19] per capita que partout ailleurs au Canada. »

Faux. Les dernières données de Statistique Canada indiquent en effet que le Québec compte 190 décès liés à la COVID-19 pour 100 000 habitants, le taux le plus élevé au pays (la moyenne canadienne est de 115 décès pour 100 000 décès). Sauf que des disparités faussent ces données. Les provinces n’utilisent pas toutes la même méthode pour comptabiliser les décès liés à la COVID-19, et la méthode québécoise est réputée particulièrement rigoureuse. Ce qui transparaît lorsqu’on compare les récentes données sur la surmortalité au pays, une donnée considérée comme plus fiable. Depuis le début de la pandémie, le Québec compte 4 % de décès de plus que la normale, alors que l’Ontario a recensé une surmortalité de 8 %, et l’Alberta, de 13 %.

Judith Lachapelle, La Presse